L'histoire se déroule après la fin de la saison 1.
Lorsque Elora a vaincu The Crone, et Kit sauvé Airk.
Tous se préparent à la grande guerre à venir.
Mais cette aventure leur a laissé des blessures avec lesquelles ils doivent désormais vivre avec.
Bien sûr cette aventure qui peut être considérée comme la saison 2 provient totalement de mon imagination.
Ayant adoré la série Willow, j'ai voulu continuer à faire vivre cette magnifique aventure à travers ma plume.
J'intégrerai de nouveaux personnages comme un magicien sorcier, une guerrière sorcière, ainsi que le roi de Cashmere et bien d'autres.
Je remonterai dans le passé et le présent.
J'essaierai au mieux de rester fidèle aux personnages et à l'histoire.
Merci à tous de continuer à faire vivre cette magnifique aventure.
Toutes les images sont ma création AI Copyright
WILLOW Fanfiction Story
Autrice : Corinne Ecrivaine
Chapitre 1
Rentrons à la maison
Le retour était long et fastidieux. Chacun savait qu’ils venaient de gagner une victoire mais ce n’était que le commencement d’une terrible guerre à venir. Il fallait rester plus unis que jamais, trouver une armée qui les suivrait, s’allier et compter les uns les autres. Il fallait redoubler d’efforts, s’entraîner encore plus, être prêt au combat qui les attendait.
Mais comment ? Tous étaient en proie à des questions existentielles.
Willow venait de sacrifier son bâton pour sauver Airk. Comment allait-il pouvoir utiliser sa magie, la retrouver ? Il devait rentrer chez lui, retrouver Mims, son village, son peuple et se recentrer sur lui-même, comprendre qui il était réellement. Un sorcier qui s’était menti à lui-même toutes ses années ou juste un fermier.
Elora avait perdu trop de gens autour d’elle, trop de personnes s’étaient sacrifiées pour la sauver. Graydon. Il lui était impossible d’effacer de sa mémoire cette terrible scène de sacrifice. Sa présence et celle du Wyrm la hantaient. Elle les ressentait au tréfonds de son âme.
Kit désormais protectrice d’Elora, une tâche importante lui incombait. Encore une fois un choix qui n’était sien mais qu’elle acceptait. Que se passera-t-il dès qu’elle sera rentrée ? Entre son rôle de princesse, de protectrice et Jade ? Allait-elle rester avec elle ou rejoindre sa véritable famille.
Jade toute sa vie fut un mensonge. Désormais elle savait qui elle était, qui était son père, sa famille. Ballantine n’était plus. Elle était déchirée entre son devoir de chevalier, sa véritable famille et Kit.
Airk qui avait était possédé, allait-il pouvoir oublier tout ce que The Crone lui avait montré ? Oublier ses peurs, le roi qu’il pouvait être, la vie qu’il aurait pu avoir ?
La nuit tombait.
Tous trouvèrent un abri pour dormir. Mais le sommeil ne vint pas.
Elora était hantée. Une présence. Soudain, une voix :
— Elora….
Elle se réveilla en sursaut :
— Graydon !!!!
Elle se prépara à partir, à l’insu de ses compagnons de route, retourner vers The Immemorial City, retrouver Graydon.
Mais Kit qui ne dormait pas se leva, et cria son nom :
— Elora que fais-tu ?
— Graydon, je dois y retourner.
Elle l’attrapa par le bras afin de l’en empêcher.
— Elora, Graydon est….. Graydon est mort. Tu ne peux plus rien faire.
Elora se mit en colère
— Non !!!!!! Je sens sa présence !!!!! Je dois y retourner.
— Je t’en empêcherai.
Tous se réveillèrent face à la dispute entre les deux amies.
Sous l’emprise de sa colère, Elora utilisa ses pouvoirs contre Kit mais la cuirasse qu’elle portait toujours la protégea et l'Impératrice fut touchée en retour par sa magie. Toutes les deux furent projetées à terre.
Jade accourue pour sauver Kit tandis que Boorman et Willow s’approchèrent d’Elora.
— Nous devons la ramener à Tir Asleen afin de la protéger de l’emprise du Wyrm, suggéra Willow.
— Nous devons tous rentrer, nous sommes tous épuisés et voulons retrouver les nôtres. Mais nous sommes de nouveau au milieu de nulle part !!!!! rétorqua Boorman.
Devant eux, s’étendait un vaste désert sans fin.
*******
Pendant ce temps à The Immemorial City, Elora se tenait debout face à un Graydon abasourdi. La jeune Impératrice lui tendait la main.
— Viens avec moi. Je te veux à mes côtés. Ensemble nous créerons une nouvelle ère. Ma Nouvelle Ère.
Il la fixait, si belle, si sombre, son regard jadis plein d’amour et de compassion, reflétait aujourd’hui la colère et l’agressivité. Lentement, il s’approcha d’elle et lui prit la main tendrement. Le visage d’Elora ne fut jamais aussi près du sien. Son regard s’éternisait dans celui de Celle qu’il aimait mais un amour impossible. Sans qu’il ne s’y attende, elle l’embrassa.
— Mon roi, lui souffla-t-elle.
Graydon changea. Du prince doux, amoureux de musique et de littérature, il devint un homme sombre, au regard obscurci par la noirceur qui désormais s’écoulait dans son âme.
— Ma reine.
*******
La malédiction qui empêchait Airk de quitter ce lieu maudit semblait ne plus subsister. Soudain, une brise se leva. Un frissonnement envahit les landes, suivit d’un tremblement qui résonna jusque dans les entrailles de la terre. Un souffle d’une puissance inouïe surgit des profondeurs et fissura le sol. Prit dans le tourbillon de la tornade naissante, le sable du désert sans fin s’éleva jusqu’aux cieux, en tournant sur lui-même comme absorbé par une spirale infernale de plus en plus violente. Tout ce qui subsistait était englouti dans la panse géante de cet ouragan. Perdus au cœur de ce cyclone, nos aventuriers, sentaient le souffle brûlant de la tempête tourner autour d’eux, les enrober, les frôler mais sans ne jamais les atteindre, les épargnant, étrangement. Cela en était presque irréel.
— Restons unis. Attrapons nous. Formons un bouclier humain ! s'écria Willow.
— Nous allons tous mourir !!!! s'affola Airl. Je vous avais dit qu’il était impossible de s’échapper de ce lieu maudit !!!!
— Tais-toi et attrape moi ! le réprimanda Kit.
— Elora, fais quelque chose ! demanda Willow.
Instinctivement, la jeune Impératrice, donna vie à un dôme de lumière qui enveloppa et protégea le groupe d’amis.
Il leur semblait être transportés dans un autre espace temps.
— Willow, pour atteindre The Immemorial City nous avons dû faire un acte de foi avant de sauter par dessus le mur d’eau !!!! s'exprima la jeune Bone Reaver.
— Pensez à ceux que vous aimez, qui vous sont chers, ceux que vous avez laissés pour suivre cette quête !!! ordonna le sorcier.
— Personne ne m’attend à Tir Asleen ! pensa Elora à haute voix.
— Faux !!! Sorsha t’aime et t’attend. Nous avons besoin de toi. Tir Asleen est ta demeure, jeune impératrice, lui répondit Kit.
Soudain la terre se fissura sous leurs pieds et tous furent projetés dans un vide obscur.
Part 2
Tir Asleen
Ils échouèrent au bord d’une rivière à la lisière d’une forêt, épuisés, vidés de toute force. Une armée de chevaliers face à eux. Jade et Boorman essayèrent de se lever arme au point pour les combattre mais s’écroulèrent aussitôt.
— Je n’ai plus la force de me battre, souffla Jade
— Moi non plus, rétorqua Boorman
Et perdirent connaissance.
— Ramenons-les, ordonna le commandant des chevaliers.
*******
Lorsque Kit ouvrit lentement les yeux, elle vit le visage de sa mère, assise à ses côtés. La jeune princesse se retrouvait chez-elle, dans sa chambre.
— Mère… Est-ce bien vous ?
— Oui c’est bien moi. Vous êtes tous sains et saufs.
Kit se mit à pleurer et se jeta dans les bras de sa mère.
Voyant que sa fille portait la cuirasse, Sorsha comprit le devoir qui lui incombait et qui allait mettre en cause son rôle de princesse.
— Ton père t’a laissé un lourd tribu à porter. (Elle lui caressa le visage et repoussa une mèche de cheveux retombant sur son front.) Il ne t’a jamais abandonnée. Il est parti à ma demande, chercher cette fameuse cuirasse. Je te demande pardon. J’aurais dû me rendre compte de ta souffrance, de cette absence qui te pesait tant. Il a toujours était fier de la personne que tu allais devenir. Jamais il n’a perdu foi en toi. Tu lui ressembles tellement mon enfant. Fougueuse, impulsive, mais avec un cœur et une loyauté sans limite pour tous ceux que tu aimes.
— J’ai… J’ai entendu sa voix. Il est là quelque part. Je le sais.
Après avoir enlacé sa mère de toutes ses forces, Kit lui demanda si elle avait la solution pour enlever cette fameuse cuirasse.
Sorsha se mit à sourire.
— La seule personne qui puisse te l’enlever et celle-là même qui a activité la Lux Arkana. Ce que je sais de cette cuirasse c’est que non seulement il faut être digne de courage pour la porter mais aussi l’amour d’une personne qui croit tellement en nous, bien plus que nous ne croyons en nous-mêmes.
Elle déposa un baiser sur le front de sa fille puis rejoignit Jade dans le couloir. Elle posa ses mains sur les épaules de la jeune femme.
— Vas-y. Elle t’attend.
Jade hésitait. Elle qui n’était qu’un chevalier, non autorisée à se retrouver en ces lieux du palais. Elle qui avait passé son enfance à s’occuper des écuries, des chevaux jusqu’à ce que Ballantine lui apprenne l’art des combats et la forme à la chevalerie.
— Je te dois bien ça, lui dit Sorsha.
Avançant d’un pas hésitant jusqu’aux appartements de son amie. Avant de passer la porte, elle se retourna vers Sorsha qui lui rendit un sourire. Elle s’arrêta sur le pas de la porte. Kit la regardait sans mot dire. Mais leurs regards parlaient d’eux-mêmes. Remplis de tendresse l’une pour l’autre, de cet amour profond, enfoui toutes ces années.
Jade s’approcha du lit de son amie et posa sa main à l’emplacement de la Lux Arcana et l’autre main sur l’épaule de Kit. Tout d’un coup, un éclair de lumière verte les entoura. Leurs regards se fondaient l’un dans l’autre, comme si leurs corps fusionnaient sans se toucher. Sous l’emprise de cette puissante sensation, instinctivement, Kit attrapa la main de Jade. La Luxe Arcana se retira de son emplacement, aussitôt, la jeune princesse fut libérée de la cuirasse.
Sans un mot, sans détourner le regard, Kit prit Jade au dépourvu en l’embrassant. Lorsque leurs lèvres se séparèrent, Jade lui prit le visage entre ses mains.
— Je ne peux pas.
Puis elle quitta la pièce laissant la jeune princesse seule, le cœur lourd.
Jade n’exprimait jamais ce qu’elle ressentait, gardant au fond d’elle toutes ses émotions, colère, amour. Elle n’était qu’un chevalier et Kit une princesse, son devoir était de servir Sorsha, Tir Asleen, être loyale et protéger. Où était la place de son amour ? Le plus difficile n’était pas l’amour qu’elle éprouvait pour sa princesse mais le fait de pouvoir vivre avec.
*******
Tous se retrouvèrent dans la salle du trône face à la reine, ses enfants à ses côtés.
Sorsha s’adressa à chacun d’eux.
— Boorman, tu n’es pas la crapule que tu veuilles bien faire croire. Je te pardonne tous tes crimes. Tu es libre.
— Libre… Je… Je peux…
Sorsha acquiesça de la tête puis s'adressa à la jeune chevalière.
— Jade, tu étais la plus grande fierté de Ballantine (Jade eut un pincement au cœur). Je sais que tu as été acceptée au sein de la Shining légion afin de rejoindre les chevaliers de Galladoorn, si tel est ton souhait, je ne t’en empêcherai pas, (Kit lança un regard désespéré vers sa mère et Jade) mais sache que tu as aussi ta place à Tir Asleen en tant que chevalière officiel de la Pacalcade. (Les deux amies se regardèrent).
Sorsha s’approcha de Willow et d’Elora
— Mon ami je suis désolée de ne pas t’avoir écouté. Peut-être n’aurais-je pas dû lui cacher sa véritable identité et te laisser lui enseigner toute la magie qui sommeil en elle.
— J’imagine que je n’ai plus ma place à la cuisine.
Sorsha sourit tout en prenant les mains de la jeune impératrice.
— Ta place est ici à mes côtés. Je t’aiderai à supporter tout le poids de ta nouvelle vie. Tu ne seras pas seule.
— Ma reine, il y a eu trop de sacrifices pour me protéger, Silas, Graydon… Je pense que j’aurais dû écouter Willow et rester avec lui, chez-lui, le temps de bien maîtriser tous ces pouvoirs.
Tous les 3 se regardèrent.
Willow sourit à Elora.
— Je veillerai sur elle, dit-il en se retournant vers Sorsha.
Boorman était sur le point de s’en aller lorsque Kit l’interpella.
— Boorman, je…
— T’inquiète jeune fille. J’ai une visite à faire. Nos chemins se croiseront de nouveau.
Puis la jeune princesse s’approcha de Willow et d’Elora.
Willow lui sourit.
— Tu es bien la fille de Madmartigan.
Elle prit Elora dans ses bras, sa façon à elle de se faire pardonner son comportement.
— Je suis désolée.
— Ça va aller. On se reverra.
Elora, attends, l'interpella Airk.
Il s’approcha de le jeune femme
— Je… Nous deux…
— Beaucoup de choses ont changé. Je ne suis plus cette cuisinière naïve amoureuse de son prince. Mais toi qui es-tu réellement ? Cette personne assoiffée de pouvoir, prête à tout, même à se retourner contre les siens ou ce jeune prince, amoureux de toutes les femmes, insouciant face à ses véritables responsabilités ?
Elle partit accompagnée de Willow, laissant Airk face à lui-même.
Sorsha emmena Jade dans une pièce à part, sous le regard inquiet et accablé de Kit.
— Assieds-toi.
— Pourquoi m’avoir caché qui je suis vraiment ?
Sorsha s’assit face à Jade et lui prit les mains
— Dans ma vie j’ai dû prendre des décisions dans l’unique but de protéger les miens. Mais ils s’avère que certains de mes choix furent des erreurs. Nous étions en guerre, mon mari contre ton père.
— Mais ma mère…
— Je ne suis pas fière de certaines actions que nous avons commises. Je ne pourrai réparer le mal qui a été fait. Mais ce qui est sûr, je suis fière de la chevalière que tu es devenue. À aucun moment je n’ai hésité à mettre la vie de ma fille entre tes mains.
Jade fut grandement touchée à l’entente de ces paroles.
— Je sais que je vais t’en demander beaucoup mais si tu désires rejoindre les tiens je ne t’en tiendrai pas rigueur.
— Les Bone Reavers sont les ennemis de Tir Asleen.
— Oui, mais ils sont aussi ta famille. Peut-être qu’avec ton aide, tu pourrais les rallier à notre cause.
Jade resta silencieuse. Mais dans ce silence, Sorsha comprit que la jeune femme s’inquiétait pour Kit.
— Je vous voyais grandir, devenir amies. Je voyais ma fille être heureuse de tous ces moments qu’elle passait à tes côtés. Je ne voulais pas briser tout cela.
— Elle est une princesse et… moi, je ne sais plus… Une Bone Reavers, une chevalière.
— Regarde qui tu es au fond de ton cœur.
Part 3
Jade
Seule assise sur les rochers du Labyrinthe du Canyon où elle avait pour habitude de s’entraîner avec Kit, Jade observait l’immensité du royaume de Tir Asleen.
Elle avait grandi avec cette vengeance en elle de détruire ceux qui avaient assassinés sa famille, The Bone Reavers. Elle avait appris à canaliser toute sa colère dans le but de l’utiliser le jour où elle se retrouverait devant ces meurtriers. Mais sa vie entière n’était que mensonge.
Elle entendait encore les dernières paroles de sa mère : « Jade, cours !!!! ». Ces paroles qui n’avaient jamais quitté son esprit, ni les terribles images de cette journée. Elle ne put abandonner sa mère et resta, en pleurs, assise aux côtés de ce corps sans vie, lui tenant les mains. Puis, au milieu des cadavres, elle le vit, cet homme en armure, s’approcher d’elle.
— N’aie pas peur.
Tout en douceur, il la prit dans ses bras. Cette voix et cette chaleur humaine qui l’enveloppaient, l’apaisa et la réconforta. Se sentant en sécurité, elle ferma les yeux et sombra dans un profond sommeil.
L’enfance de Jade se passa à nettoyer les écuries, s’occuper des chevaux et se battre afin de se faire accepter, dû à sa différence, dans un monde qui n’était pas le sien. Jusqu’au jour, où elle fit cette rencontre qui changea sa vie.
La petite Kit comme à ses habitudes, s’amusait avec son frère en dehors du palais, au moment où ses yeux se posèrent sur une fille étrange en train de se battre contre les garçons du royaume.
— Qui est-ce ? demanda-t-elle.
— On dit que c’est une sauvage. Elle ne laisse personne l’approcher, lui répondit Airk.
— Il faut l’aider.
— Non ! Kit, attends !
Trop tard, la petite princesse était déjà partie pour défendre cette fille étrange.
— Laissez la tranquille !!!! s'écria la jeune princesse.
Tout le monde se mit à rire et continua la bagarre.
— Je suis Kit Tanthalos, ma mère est la reine !
Tous se figèrent et partirent en courant.
— Oui c’est ça fuyez !!!! s'exclama son frère
— Je n’ai pas besoin d’aide. J’aillais tous les massacrer !!! rétorqua Jade
— Ce n’est pas ce que j’ai vu !!!! ironisa Kit
À l’instant même Ballantine arriva.
— Jade, ça suffit. Excuse-toi auprès de la princesse !!!
— Mais…
Le regard de son mentor, suffisait à la faire céder.
— Pardon.
— Va m’attendre aux écuries. Quant à vous 2 je vous ramène au palais dit-il fermement.
Sorsha ne cacha pas sa colère envers ses enfants.
— Qu’est ce qui vous a pris !!!
— Ils se moquaient d’elle !!! Je ne pouvais pas laisser faire !!! s'écria la petite princesse.
La reine donna l’ordre à une gouvernante d’emmener les deux jumeaux dans leur chambre. Puis une fois seuls, elle s’adressa à Ballantine.
— Plus elle grandit, plus elle ressemble à son père. Qu’allons nous faire de la petite Jade ?
— Ma reine, je sais comment canaliser sa colère et la rendre utile.
Sorsha acquiesça d’un signe de la tête.
De retour aux écuries, Ballantine s’assit aux côtés de Jade et entama la discussion.
— Tu ne peux pas frapper tout le monde.
— Je n’ai pas ma place !!!! Les gens ne m’acceptent pas !!! Je ne suis pas comme eux !!!
— Viens avec moi.
Il l’emmena sur le terrain d’entraînement des chevaliers et lui donna un bâton de bois.
— Frappe ce mannequin de paille. Libère toute ta colère sans limite.
La petite Jade laissa exprimer toute sa rage. Elle frappa et frappa sans s’arrêter, de plus en plus violemment ce mannequin sous le regard de son mentor. Puis elle s’écroula à terre et se mit à pleurer.
Ballantine la prit dans ses bras:
— Je te donnerai ta place dans ce royaume et ta colère t’aidera.
C’est ainsi que commencèrent les entraînements qui firent de Jade la meilleure chevalière de Tir Asleen.
*******
Kit avait rejoint son amie au Labyrinthe du Canyon
— Je savais que je te trouverais ici.
Jade la regarda, sourit mais ne dit mot. La jeune princesse posa sa main sur le bras de sa bien aimée.
La jeune chevalière tourna son regard vers celle qui comptait le plus dans sa vie.
— Je… Je ne me suis jamais excusée de t’avoir menti sur nos entraînements.
Kit haussa les épaules, tout cela n’avait plus d’importance.
— Tu obéissais aux ordres.
— Oui, les ordres. Toute ma vie je n’ai fait qu’obéir… aux ordres.
La jeune princesse était si blessée de voir son amie en souffrance, qu’elle aurait voulu partager cette tristesse et la soulager.
— Et si on chevauchait jusqu’à l’arbre de vie. La première qui arrive a gagné, lui proposa-t-elle.
— Une compétition. Elle gagne quoi ?
Kit lui sourit et partit.
— On se retrouve là-bas.
Arrivées à l’arbre de vie, les deux amies se blottir l’une contre l’autre, adossées à ce gigantesque arbre de magie qui, suivant la légende, apportait la vie à Tir Asleen.
— Te rappelles-tu notre 1re rencontre ? questionna Jade.
— Comment oublier tu m’as crié dessus.
Toutes deux se mémorisaient cette amitié grandissante, devenant au fil des ans de plus en plus intense, inséparables l’une sans l’autre. Une force qui les unissait si puissamment. Toutes ces nuits qu’elles passèrent dans la chambre de Jade à refaire le monde, à vivre d’aventures épiques. Ces moments d’entraînements que l’une et l’autre chérissaient plus que tout, les seuls instants où elle se retrouvaient, seules, loin du palais, loin de tous ces devoirs princiers que Kit avait toujours rejetés. Cette nuit, où la petite princesse, allongée sur le lit, aux côtés de son amie, s’éclata en sanglots à cause du départ de son père sans en connaître les véritables raisons.
— Il m'a abandonnée, s'exprima-t-elle, la voix brisée.
Ce soir là, Jade lui offrit le collier de sa défunte mère, qu’elle porta à son cou et firent le serment de ne jamais s’abandonner.
— Il appartenait à ma mère. Je l’ai pris sur son corps afin de ne jamais oublier. Je te le donne, en guise de notre amitié. Toi et moi, jamais nous ne serons séparées. Quoi qu’il arrive.
— Toi et moi, toujours présentes l’une pour l’autre. Quoi qu’il arrive.
*******
Les souvenirs s'estompaient.
Hésitante, Jade finit par se confier à la jeune princesse.
— Tu… Tu as changé ma vie. Pendant que tous me rejetaient, toi, princesse de Tir Asleen, tu m’as acceptée telle que je suis. Avec mes différences. Tu es la seule dans ma vie qui ait comptée.
Kit se releva et plongea son regard dans celui de Jade avant de s'exprimer tendrement.
— Tu as comblé le vide qui subsistait en moi. Tu as été et tu es ma seule et unique dans ma vie.
Puis, d’abord hésitantes, leurs lèvres se rejoignirent. Mais à l’instant où Kit devenait plus demandeuse, Jade la stoppa tout en douceur.
— On ferait mieux de rentrer.
*******
De retour chez-lui, Wiilow fut accueilli en grand Aldwin et Elora en tant qu'impératrice.
Mims se jeta dans les bras de son père : Popa !!!
— Tu… Tu vas bien, s'exprima Willow.
Le sorcier se retourna vers la jeune Impératrice. Tous deux comprirent que sa vision lors de la traversée de Shattered Sea n’était qu’un leurre. Son village, sa fille, tout le monde étaient sains et saufs. Puis Mims s’approcha de la jeune impératrice.
— Soyez la bienvenue.
Quelques heures plus tard, Elora se retrouvait seule dans les jardins privés de Wiilow, tenant la flûte de Graydon dans ses mains. Mais lorsque Mims la rejoignit, elle essuya aussitôt les larmes qui coulaient sur son triste visage.
— Il n’y a pas de honte à pleurer. Nous ne pouvons pas tout le temps être fortes.
— Je… Tout ce pouvoir et je n’ai pas pu le sauver.
— Il n’a pas agit dans le but d'être sauvé.
Elora lui sourit.
— Vous êtes tellement tous gentils et accueillants à mon égard. (Elle regarda la flûte). Je ne veux plus de sacrifices. Je dois apprendre à maîtriser cette magie.
— Popa vous aidera. Maman s’est occupée de vous bébé avant de vous confier à Tir Asleen, je veillerai sur vous aujourd’hui. Même si vous n’êtes plus un bébé.
Toutes deux se sourirent.
Lorsque Willow se retrouva seul avec Mims, il lui fit part de ses doutes.
— Comment puis-je l’aider, je n’ai plus ma pierre, ma magie ? le ton de sa voix était empreint d'Inquiétude.
— Popa, Fin Raziel et Cherlindrea avaient foi en toi. N’oublie pas Elora t’a choisi.
— Et si j’avais tout perdu. Elora serait la seule. Tant de responsabilités reposeraient sur ses épaules, ses yeux ne pouvaient cacher ses craintes.
— La magie est en toi. Tu es le grand Aldwin. Et s’il en restait d’autres, quelque part. Le monde est vaste, un sourire réconfortant se dessina sur les lèvres de la jeune Nelwyn.
Part 4
Elora
Les entraînements étaient de plus en plus intenses et épuisants pour Elora qui n’arrivait toujours pas à maîtriser sa magie. Chaque fois qu’elle pensait la contenir, elle lui échappait et provoquait des catastrophes. Comme ce fut le cas dans les Mines de Skellin où ils faillirent tous perdre Kit.
Elle se sentait tellement responsable d’avoir perdu Graydon, Silas, Ballantine. Elle s’en voulait au tréfonds de son âme, d’avoir empêché Kit de rejoindre son père. Elle ne pouvait lui en vouloir, cette colère ce jour là envers elle. Une colère qui contenait une terrible souffrance.
Elle s’écroula à terre et se mit à pleurer.
Mims s’approcha de la jeune impératrice et la prit dans ses bras.
— Je n’y arrive pas. Je… Tout est de ma faute, s’exprima-t-elle, anéantie.
— Vous n’êtes pas responsable.
— Bien sûr que si !! J’ai faillit tuer Kit. (Elle essuya ses larmes). Graydon, Silas… Tous…morts. Pour moi, pour me sauver. Plus j’essaie de la contrôler, plus elle m’échappe. Comment je vais pouvoir vaincre le Wyrm si je ne contrôle pas cette puissance qui est en moi.
Willow s’approcha.
— Alors ne la contrôle pas.
Elora le regarda.
— Cette magie fait entièrement partie de toi. Tu es elle. Elle est toi.
— Je n’ai jamais voulu tout ça. Je n’ai jamais voulu être Elora Danan. Je voulais juste… être moi.
À l’entente de ces paroles, Willow ne put s’empêcher d’être colérique.
— Là est tout le problème !!! Accepte Celle que tu es !!!
Puis il partit, laissant Elora seule avec Mims.
— Il s’inquiète beaucoup pour toi. Il t’aime énormément. Il refuse de perdre une personne de plus dans sa vie, la réconforta Mims.
— Que s’est-il passé, Mims.
Il y a eut un court instant de silence avant que la jeune nelwyn raconte.
— Popa n’a jamais cessé de veiller sur toi. Depuis le jour où il t’a laissée à Sorsha et Madmartigan, il venait te voir aussi souvent qu’il le pouvait. Il n’acceptait pas tous ces changements physiques que Sorsha avait décidé d’entamer. Te transformer en une personne que tu n’étais pas afin d’oublier celle que tu étais réellement : Elora Danan. Un jour, popa et Sorsha se disputèrent à ton sujet. Blessé par les propos qu’elle lui tint, il ne revint plus jamais à Tir Asleen. Le stratagème de Sorsha fonctionna puisqu’au fil des ans, Elora Danan finit par disparaître. Beaucoup de rumeurs circulèrent alors à ton sujet. Certaines disaient même que tu étais… morte.
Une secte vénérant une ancienne magie maléfique, l’ordre du Wyrm vit le jour. Pendant des lunes ils semèrent le trouble, incendiant des villages, causant attaques sur attaques, ne laissant sur leur passage, que mort et destruction, et la peur. Toi, disparue, plus rien ne pouvait les arrêter. Une ère de terreur naquit. Cette secte grandissait de jour en jour, ralliant de plus en plus de soldats voire des royaumes entiers s’alliaient à leur cause. Il nous était impossible de faire confiance à qui que ce soit. Leur objectif était d’anéantir tous les sorciers existants en ce monde. D’éradiquer toute personne susceptible de faire de la magie. Sans magie, plus personne ne pourrait les arrêter.
— Mais comment se fait-il que nous n’en n’ayons jamais entendu parler ?
— La barrière, ce champ de force créé par Fin Raziel et Cherlindrea protégea Tir Asleen. Qui devint un refuge pour tout ceux qui voulaient vivre. Un jour des soldats de Cashmere vinrent chercher mon père afin de lui demander de mettre en lieu sûr tous les sorciers et sorcières encore vivants. Avec l’accord de maman, il partit. Ce fut la dernière fois qu’il la vit.
*******
Cashmere était une magnifique cité, réputée pour sa belle tour d’ivoire, ses rues longées de pierres de lunes, les paladins, ces chevaliers de très haut grade religieux. L’ordre régnait tant que chacun respectait les règles. Le peuple ne manquait de rien caché par les murailles qui les protégeaient des attaques mais les isolaient également.
Lorsque Willow arriva à Cashmere, il fut aussitôt amené à la cours royale où Hayrald Saigur, roi de Cashmere l’attendait.
— Merci d’être venu. Mon inquiétude ne cesse de grandir. Le mal non seulement rôde en dehors de ces murs, mais j’ai le sentiment qu’il est déjà à l’intérieur de la cité. Je ne sais plus à qui faire confiance. J’ai entouré Cashmere d’une muraille afin de nous protéger mais j’ai bien peur que cela ne suffise plus. Si je t’ai fait venir, c’est pour m’aider à protéger le peu de sorciers qui nous restent. La plupart ayant étaient tués par les adeptes de cette secte qui ne cesse de s’accroître.
Hayrald Saigur était un roi d’une grande prestance, un charisme, source de respect mutuel partagé entre lui et ses hommes. Aucun n’aurait hésité à donner sa vie pour leur roi. Cheveux et barbe dorés, au regard perçant mais un visage marqué par les années et son allure imposante. Tout de muscle, dont sa tenue, une tunique rouge et dorée qui descendait jusqu’à un pantalon sombre, recouvert de bottes noires et or, suffisait à impressionner n’importe quel adversaire. Mais Willow, le connaissait trop bien pour savoir que derrière son allure de personne effrayante, Hayrald était un roi juste et droit dans ses décisions. Du moins essayait-il de l’être le plus possible.
— Je les mènerai au Refuge d’Auzuris, le rassura Willow.
Soudain un paladin entra en courant dans la salle du trône.
— Mon Seigneur, nous sommes assiégés !
— Wiilow occupe toi des sorciers, ils sont dans la tour d’ivoire, nous allons retenir l’armée des ténèbres. (S’adressant au paladin) Prends deux hommes avec toi et accompagne-le.
— Bien Mon Seigneur.
L’armée des ténèbres avait réussi à passer la muraille de Cashmere. Ce qui donnait confirmation au roi. Le mal était à l’intérieur de la cité. Des milliers de soldats morts jonchaient le sol. Les habitations à feu et à sang. Ce fut une véritable hécatombe. Hayrald n’hésita pas un seul instant, à la tête de son armée, il fit face à ces hordes de démons, défendant sa cité et ses habitants.
Au milieu de tout ce carnage, lorsque Willow arriva à la tour d’ivoire accompagné des trois chevaliers, les sorciers qu’il découvrit n’étaient que des enfants, cinq en tout, apeurés, recroquevillés les uns contre les autres.
— Cette secte maléfique a déjà fait exécuter la plus part de nos sorciers adultes. Ils ne restent plus qu’eux. Venez suivez-moi, nous allons sortir par le passage souterrain, s’exclama tristement le chef des paladins.
Willow prit chacun des enfants et suivit les chevaliers jusqu’au souterrain. Ils prirent chacun une torche et longèrent les couloirs de pierres obscurs. Lorsqu’ils atteignirent la sortie, tous se retrouvèrent en dehors des murs de Cashmere. Willow se retourna et eut une pensée pour Hayrald. « J’espère te revoir mon ami ».
La pluie se mit à tomber en trombe et l’orage gronda. Willow s’adressa au chef des paladins
— Nous devons atteindre le Refuge d’Auzuris !
Mais il n’eut pas le temps de sauver les enfants. Le traite n'était autre que le chef des chevaliers. Il se retourna contre les siens en s’écriant : « Le Wyrm délivrera ce monde de la souffrance et du désespoir. Il guérira ce monde ! » D’un geste brutal et rapide, il tua ses deux compagnons, ainsi que tous les enfants. Willow cria devant l’horreur qui venait d’être commise.
— Merci de me les avoir offerts. Tu ferais mieux de rejoindre les tiens, si tu veux les sauver tous !!!
Willow eut soudainement une vision de son village détruit et d’un champs de cadavres Nelwyns.
Ne pouvant plus rien faire pour les enfants, il s’enfuit en courant retrouver les siens. Juste au moment où le paladin allait transpercer le jeune sorcier de sa lame, ce dernier fut arrêté par l’un des deux chevaliers, utilisant le peu de vie qui lui restait pour lancer son épée qui s’enfonça dans le dos du traite.
Willow arriva trop tard. Tout son village avait été détruit par les flammes, mis à feu et à sang. Le sol recouvert des corps Nelwyns. L’odeur du sang versé et des habitations brûlées infectaient l’air. Il s’écria «Kiaya!!!! »
Silas l’interpella et le stoppa
— Nous n’avons rien pu faire. Ils étaient trop nombreux. Je… Je suis désolé.
Et parmi tous ces morts, il trouva le petit corps inerte de sa bien aimée. Il s’écroula à terre et prit Kiaya dans ses bras et la serra aussi fortement qu’il le pouvait comme pour ne pas la voir s’échapper, ne pas la perdre. Ses larmes se mêlant à la pluie tombante sur son visage et le visage inerte de sa femme.
— Non !!!! Non !!!! Non !!!! Kiaya !!!!
Silas à ses côtés ne pouvait l’aider à contenir toute cette souffrance qui submergeait son meilleur ami. Willow se mit à crier de douleur. Un cri qui résonna jusqu’au fin fond de la vallée.
*******
Elora était dévastée par ce qu’elle venait d’apprendre sur le passé de Willow. Elle ne put contenir ses larmes.
— Depuis, nous vivons sous terre afin de nous protéger de ces démons, poursuivit Mims tristement. Quelques jours après cette terrible journée, Ranon, lui a reproché de nous avoir encore abandonnés pour une quête de plus. Ce jour là, il partit brisant le cœur de popa pour la deuxième fois. Nous ne l’avons jamais revu.
Elora prit Mims dans ses bras
— Je suis tellement désolée.
— Ce combat est bien plus grand qu'on ne peut l'imaginer. Le monde entier dépend de toi. Toi seule peut tous nous sauver. Je sais… Nous savons tous que c’est un lourd fardeau à porter mais tu ne seras jamais seule dans cette épreuve. Tes amis, popa, moi et bien d’autres encore se joindront à toi.
Part 5
Boorman
Boorman était enfin rentré chez-lui. Il allait pouvoir revoir sa mère qu’il n’avait pas vue depuis trop longtemps. Rien n’avait changé à par lui.
Il marchait à travers les ruelles, toujours aussi sombres et ces demeures faites de pierre grises et de bois aux toitures couvertes de chaume. Un endroit qui lui rappelait trop la misère dans laquelle il avait grandit. Il se souvenait toutes les fois, lorsque enfant, il s’enfuyait en courant afin d’échapper aux commerçants dont il leur volait le pain, le fromage, la viande séchée dans le but de nourrir sa mère. Son père les ayant abandonnés quelques années après sa naissance. Il connaissait les moindres recoins de son village, les moindres ruelles à emprunter afin de disparaître.
Il reconnut au loin, le fameux marchant de fruits et légumes, à qui il volait toujours ses produits.
Il se déplaçait tout en restant sur ses gardes, son visage dissimulé sous sa capuche afin de ne pas être reconnu. Il n’avait jamais été apprécié par les habitants mais il en était la cause. Il avait passé sa vie à voler et mentir pour servir ses propres intérêts, n’hésitant pas un seul instant à abandonner ceux qui lui faisaient confiance.
Il se mémorisait sa rencontre avec Madmartigan. Jeune et maigrichon, il travaillait comme cabaretier auprès de sa mère afin de l’aider à la taverne. Il vit cet homme d’une grande prestance entrer accompagné de deux amis qui l’impressionnèrent.
Il se débrouilla pour les servir et écouter leur conversation. Tous trois étaient en quête d’une relique ancienne. Désireux de faire partie de cette aventure et accompagner cet homme majestueux, sans hésiter, il prit part à la discussion.
— Je peux vous aider, leur avait-il dit sans crainte.
— On ne t’a rien demandé gamin. Sers-nous à boire, lui répondit irrespectueusement Allagash
Mais cet homme respectable, fit taire Allagash d’un simple geste de la main.
— Je t’écoute, s’exprima fermement Madmartigan
— Je connais tous les recoins de ce monde. Je pourrais vous accompagner. Je suis un chercheur de trésors.
— Un pilleur de tombes, l’invectiva Blaylock
— Non, un chercheur de trésors, s’adressant à Madmartigan. Je vous serai utile. Je pourrais être votre écuyer.
C’est ainsi que Boorman devint l’écuyer officiel de Madmartigan et partit avec lui, quittant Tir Asleen de nuit, à la recherche de la Kymerian cuirass.
*******
Il s’arrêta devant la taverne Chop-Chop. La fameuse taverne que tenait sa mère pour vivre ou plutôt survivre. Combien d’heures il avait passées à l’aider. Combien de jours, de mois à attendre la bonne rencontre qui lui permettrait de rendre sa mère fière de lui. Comment allait-elle réagir en le voyant, et lui, qu’allait-il pouvoir lui dire. Une personne de plus qu’il avait abandonnée. Finalement, il entra, son visage toujours dissimulé sous sa capuche et s’assit au fond de la pièce dans un coin sombre et isolé.
L’endroit n’avait pas changé. Toujours autant de monde, à boire, à rigoler et passer un bon moment. Tels étaient les objectifs de sa mère lorsqu’elle reprit cette taverne, remplir de joie l’âme et le cœur des gens de passage.
Toujours ces tables de bois, la cheminée qui apportait un peu de chaleur. La cave derrière le bar et les chambres à l’étage. Non seulement cette taverne était leur gagne-pain mais également leur demeure.
Une jeune serveuse lui offrit à boire. Il attendit, devant sa chope de bière que la taverne se soit vidée.
A la fermeture, sa mère vint s’asseoir face à lui.
— Alors poupon !
— Ne m’appelle pas comme ça maman.
— Tu comptes rester ainsi toute la nuit ou tu vas enfin me regarder ?
Boorman découvrit son visage et fixa droit sa mère dans les yeux.
Le temps avait eu une emprise sur elle. Fatiguée et vieillie mais elle avait toujours cette excentricité et cette ténacité ainsi que son fort caractère qui lui avait permis de survivre toutes ces années. Rondelette et petite dans sa tenue ocre, composée d’une longue jupe verte recouverte d’un tablier orange vif noué à l’aide d’un cordon, d’un corsage blanc chiffonné serré aux manches par des bandelette orange et d’un corset marron attaché par des lacets entrelacés. Sans oublier tous ces bijoux, bracelets, bagues et colliers qu’elle portait.
— Tu comptes me parler un jour, mon fils ?
Boorman détourna les yeux quelques secondes, il avait ce regard d’une personne submergée par les regrets
— Je suis désolé d’être parti en pleine nuit pour suivre Madmartigan dans sa quête. Je voulais… Je voulais que tu sois fière de moi. Toute ma vie, je n’ai fait que mentir, voler, servir mes propres intérêts. J’ai abandonné des gens qui comptaient sur moi. Je croyais qu’avec cette cuirasse, je pourrais racheter mes fautes mais, non, elle ne m’était pas destinée. Cette armure attendait une autre personne bien plus courageuse et loyale que je ne l’ai jamais été dans ma vie. Un vieux grincheux m’a même dit que j’étais un être loyal et dévoué.
— Et toi, qui crois-tu être mon fils ? Qu’as-tu réellement trouvé lors de cette quête ?
Boorman resta silencieux.
*******
Sorsha se retrouvait dans la salle du trône en compagnie de Prunella qui avait veillé sur Elora tout au long de sa vie. La seule à connaître sa véritable identité avec la reine.
Elle ne pouvait contenir sa tristesse et son désarroi. Le retour de sa fille venait de lui faire prendre conscience que son époux ne reviendrait pas.
— Qu’ai-je fait ? Avoir vu ma fille porter la Kymerian cuirass cela signifie que mon mari… Je l’ai perdu à jamais. Mes enfants, par ma faute ont perdu leur père.
— Ma reine, il reste toujours de l’espoir. Kit a entendu la voix de son père.
— Et si ce n’était qu’un leurre ? Si l’envie lui prenait de partir à sa recherche. La connaissant, je ne pourrai l’en empêcher. Mes enfants sont tout ce qui me reste. Je ne supporterai pas de les perdre.
Un garde de la Pacalcade entra
— Ma reine, le roi Hastur vient d’arriver.
Avant de donner l’ordre de faire entrer le roi, Sorsha demanda à Prunella de faire venir ses enfants.
— Ma reine, s’exprima Hastur.
— Sir Hastur.
Zivian Hastur s’adressa à Kit et Airk
— Prince Airk, ravi de vous savoir en vie, princesse Kit.
Puis se tourna vers Sorsha
— Où est mon fils ?
Les deux jumeaux se regardèrent, attristés.
— Je suis vraiment navrée, Zivian, mais il n’a pas survécu.
Le roi Hastur resta silencieux quelques instants.
— Comment mon fils est-il mort ?
— Il est mort avec honneur, en se sacrifiant pour sauver Elora…, s’empressa Kit de répondre.
Airk donna un léger coup de pieds à sa sœur afin de la faire taire.
— Vous voulez dire, Elora Danan !!! Où est-elle ?
— Nous l’ignorons, répondit expressément Sorsha.
Soudain, Zivian Hastur s’en prit violemment à la Reine.
— Tout cela est de votre faute !!! Pendant deux cents lunes Galladoorn fut les alliés de Tir Asleen, combattant à vos côtés afin de sauver le royaume des ténèbres. Nous avons eu trop de pertes, Airk Thaughbaer et aujourd’hui mon fils !!!! Tout cela pour la folie d’un seul homme, votre époux, qui s’était mis en tête de sauver un bébé d’une prophétie !!!
— Mon mari a défendu seul Tir Asleen contre les hordes de Bavmorda et les trolls. Airk Thaughbaer a combattu à ses côtés défendant le royaume !
— Est-ce que vos enfants savent qui étaient réellement leur père ! Un chevalier déshonoré qui préférait traîner avec des parias. Votre époux qui s’est amouraché de la princesse Carissima de Cashmere a brisé le code des chevaliers de Galladoorn en trahissant les siens !!!!
— Ça suffit !!!! s’écria Airk.
Le jeune prince dégaina son épée et s’attaqua au roi.
— Airk non !!!! hurla Sorsha.
Un terrible combat s’ensuivit entre les deux hommes.
— Je vois que tu as pris de l’assurance et de l’agressivité, jeune prince.
— Vous ne pouvez imaginer ce que je viens d’endurer. Je ne vous laisserai pas vous adresser de la sorte à ma mère, ni parler de mon père en ces termes !
L’affrontement était virulent. Mais Airk se laissa déstabiliser par les propos du roi qui le désarma et le fit trébucher. Sans qu’il n’ait pu anticiper l’attaque, Sorsha stoppa Zivian dans coup sec de son épée.
— Quittez mon royaume et ne vous avisez plus de vous en prendre à mon fils.
Hastur s’adressa directement au jeune prince
— Tu es comme ton père, un incapable et un faible !
Avant de quitter la pièce, il lança un regard noir à Sorsha
— À compter de ce jour, Galladoorn ne seront plus les alliés de Tir Asleen !
Lorsque Kit s’approcha de son frère afin de l’aider à le relever, ce dernier la repoussa durement et quitta la salle.
— Airk, attends !!!! murmura la princesse.
*******
Kit avait rejoint son frère dans la salle d’armes. Très peinée par son attitude et sa douleur. Elle s’approcha de lui tout en douceur, silencieuse.
— Hastur a raison. Personne n’attend rien de moi. Je ne suis qu’un faible. A part toutes mes conquêtes qu’ai-je fait de concret ? Je me suis laissé endoctriner par The Crone. J’ai combattu ma propre sœur. Elle.. Elle m’a montré le roi que j’aurais pu être. Je ne suis pas digne de notre père.
Kit posa une main de réconfort sur le bras de son frère
— Tu es un homme loyal et digne de ce royaume. Et tu seras un roi juste et bon. Tu es… un frère sur lequel j’ai toujours pu compter. Même si je t’en ai fait un peu baver durant notre enfance et encore aujourd’hui. Tu es mon frère. Ensemble nous serons plus forts.
— Pourquoi mère nous a-t-elle dissimulé toute la vérité ? Peut-être aurions-nous été plus à même de combattre ce qui nous attendait. Ne crois-tu pas qu’il serait temps que mère nous dise tout.
Kit resta silencieuse mais son regard était une affirmation à la question de son frère.
*******
Pendant ce temps à The Immemorial City, Dark Elora et Graydon, assis sur leur trône de gloire, savouraient ensemble, leur victoire à venir. Regardant leur armée de démons, de trolls, de Eborsisk, The Doom, The Scourge The Death Dogs et The Gales, se lever et se lier à leur grand pouvoir afin de délivrer le monde de la souffrance et du désespoir. Apporter la Nouvelle Ère celle du Wyrm.
Le grand éveil avait commencé.
Part 6
Révélations
Galladoorn était un magnifique royaume, prospère, connu pour sa culture et sa Shining Legion. Terre d’accueil, lieu de paix et d’une grande diversité culturelle. Toute personne qui cherchait refuge, pouvait rester à Galladoorn tout en conservant ses traditions et ses coutumes. Il était donc possible d’y trouver des produits de tout horizon ainsi que des vêtements aussi différents les uns des autres et d’avoir un grand enrichissement de récits et de savoir-faire de chaque voyageurs.
L’ordre était maintenu par la Shining Legion. Mais, malheureusement, il y avait un côté sombre à cette magnifique existence. Galladoorn possédait des esclaves qui se retournèrent contre leurs maîtres en rejoignant l’armée de Bavmorda en échange de leur liberté.
Lors de leur dernier combat entre la Shining Legion et les hordes de Bavmorda, Galladoorn fut entièrement détruit.
Lorsque Bavmorda fut vaincue, le château fut reconstruit et Zivian Hastur fut proclamé roi de Galladoorn. La reconstruction se fit de façon à protéger la famille royale ainsi que le peuple.
Un somptueux château, aux murs de pierres blanches, surplombant une colline entourée d’eau. Après la défaite face à Bavmorda, la protection fut renforcée. Ainsi, pour pénétrer dans le château, il fallait passer par une passerelle et un pont-levis. L’entrée était protégée par une immense herse. Entouré d’une courtine et d’un chemin de ronde sur lequel des sentinelles circulaient jour et nuit. Quatre tours de garde situées aux quatre coins du château habitées par des gardiens. Ainsi qu’une tour, la plus haute du domaine, dans lequel des gardes pouvaient scruter l’horizon aussi loin que possible. Des meurtrières le long des murailles par lesquelles les archers pouvaient tirer à l’arc ou verser de la chaux-vive sur les assaillants.
Zivian Hastur se trouvait seul, dans le donjon, les bras croisés dans le dos, regardant à travers la fenêtre, les yeux rivés sur l’horizon. Il avait perdu ses deux fils. Son projet d’avoir un héritier à Tir Asleen n’était plus.
Soudain, l’atmosphère s’assombrit, une épaisse fumée noire surgit de l’âtre et envahit la pièce entière. La fumée prenait la forme d’une ombre anthropomorphe, hideuse et effrayante. Un torse humain aux bras minces et déformés, aux mains aux griffes lacérantes, dans le dos, deux ailes biscornues qui pouvaient entailler n’importe quel ennemi d’un coup sec et violent.
Zivian se retourna, nullement effrayé par cette entité diabolique en son domaine et ces deux iris rouges qui le fixaient de façon repoussante et menaçante.
Il s’adressa à cette créature sur le ton de la fureur
— J’ai sacrifié pour vous mes deux fils. Par le pacte qui nous unis, vous m’aviez promis Tir Asleen !!!
La créature s’approcha au plus près du visage du roi Hastur en poussant un féroce cri qui ne le fit ni sursauter ni bouger.
Elle s’exprima avec une voix d’outre tombe
— Le Wyrm honore ses loyalistes. Tir Asleen vous sera donnée. Apportez-nous la fille et le sorcier.
Le démon disparut, la fumée se dissipa et la lumière éclaira de nouveau la salle du donjon.
*******
Le combat était rude et violent. La pluie tombait en trombe, l’orage éclata violemment, de ces orages menaçants. Le tonnerre grondait à déchirer le ciel et les éclairs fissuraient le sol. Willow était épuisé, agenouillé à terre, il ne trouvait plus aucune force de se relever, ni de combattre. Il fixait son adversaire, Celle pour qui il avait tout donné, sacrifié ceux qu’il aimait et sa vie pour la protéger : Elora. Elle le dévisageait, mais son regard ne reflétait plus aucun sentiment d’amour ni de compassion, seuls une terrible noirceur et animosité s’exprimaient dans ses yeux. Sans un mot, la jeune impératrice foudroya son ami d’un coup sec de sa magie. Un éclair rouge sang surgit de ses mains et frappa le sorcier en plein cœur qui s’écroula, sans vie.
Elora se réveilla en sursaut et en sueur, apeurée par le cauchemar qu’elle venait d’avoir. Un cauchemar ou une vision ? Effrayée par ces images, le souffle coupé, elle accourut chercher Willow. Où était-il ? L’espace d’un instant, elle crut l’avoir réellement perdu, lorsqu’elle croisa le chemin de Mims.
— Où est Willow ? demanda-t-elle à la Nelwyn.
— Dans son jardin. Que se passe t-il Elora ?
La jeune fille ne répondit pas mais courut vers les jardins.
Lorsqu’elle vit Willow, un soulagement s’empara d’elle. Tous deux se regardèrent, quelques secondes avant que la jeune impératrice n’entame la conversation.
— Je… Je viens d’avoir une terrible vision ou cauchemar.
Willow l’écoutait sans mots dire.
— Willow, Je…
— Tu me tuais, lui répondit le sorcier calmement.
Elora resta silencieuse. Il poursuivit.
— J’ai eu la même vision.
La jeune fille s’approcha du sorcier.
— Comment est-ce possible ?
— Le Wyrm grandit en puissance.
— Et… Et si c’était le cas… Si je m’en prenais à ceux que j’aime.
Mims intervint.
— Elora, cela n’arrivera jamais. Nous sommes là. Nous t’aiderons.
— Et si je devais m’éloigner de vous tous, disparaître. Peut-être est-ce la solution pour sauver vos vies.
— Non. Nous devons rester ensemble. Je te protège depuis ta naissance. Ma place est à tes côtés, peu importe ce qui arrivera, rétorqua Willow.
— Je ne peux me permettre un tel risque, insista Elora.
— Elora, j’ai toute confiance en toi. Je sais que tu ne nous feras jamais de mal, la rassura Mims.
— Et si vous vous trompiez sur moi. Si je n’étais pas Celle que vous croyez tous. Qui suis-je vraiment ?
Le sorcier regarda sa fille qui lui fit un signe d’approbation de la tête, et prit la parole.
— Après avoir vaincu Bavmorda et t’avoir laissée auprès de Sorsha et Madmartigan, je rejoignis ma famille. Je n’ai jamais cessé de penser à toi, de m’inquiéter. Je ne comprenais toujours pas pourquoi tu m’avais choisi. Je n’étais pas un grand sorcier, juste un fermier. Les mois passèrent. Puis un soir, Cherlindrea m’apparut en songe.
— Je sais que tu es triste Willow mais ne le sois pas. Elora est en sécurité désormais. Viens avec moi, lui proposa Cherlindrea.
— Elle me mena à Kymeria, dans une chambre où trois fées entouraient une jeune femme, allongée sur un lit, si belle à la peau lumineuse et aux cheveux rouges, descendante de Kymeria et appartenant aux fées de The Grove.
La fée Aveline (amour) s’adressa à la jeune femme
— Es-tu prête Sallyanna.
— Tel est mon choix pour sauver le monde des ténèbres grandissantes, répondit Sallyanna.
La fée Anja (espoir) : À l’issue du rituel, tu ne feras plus partie des nôtres. Tu oublieras tout de ta vie, de ton passé. Tu deviendras une Daikini.
— Je renonce à ma vie passée et accepte ma vie future.
La fée Aela (lumière) : Tu ignoras la véritable identité de ton enfant.
— J’accepte ce choix. Je chérirai l’enfant que je mettrai au monde. Je lui offrirai ma protection, ma force, mon amour.
La cérémonie débuta.
Aveline, fée de l’amour, si douce dans sa façon de s’exprimer, peau blanche aux longs cheveux et yeux roses, vêtue d’une tunique au bustier lilas et à la jupe blanche, aux ailes rosace, s’exprima la première
— Sallyanna, par ma volonté, ton enfant aura la force de l’amour, la force la plus puissante de l’univers qui guidera son combat contre les ténèbres.
Elle souffla une pluie de diamants qui enveloppèrent le corps de Sallyanna.
Anja, fée de l’espoir, peau cuivrée, aux longs cheveux orangé tombant jusqu’au bas de ses reins, vêtue d’une longue robe verte, entourée d’un voile cristallin, de la même couleur que ses ailes prit la parole
— Sallyanna, par ma volonté, ton enfant sera porteuse d’espoir à travers chaque contrées, chaque peuple, chaque demeure lorsque le doute la submergera.
Elle commença à jouer quelques notes de musique de sa lyre. Aussitôt la mélodie se répandit sur la jeune femme tel un nuage de cristal la recouvrant comme pour la protéger.
Aela, fée de lumière, peau satinée, aux longs cheveux dorés tout comme sa robe bustier, attachée par des roses oranges, entourée d’un voile d’argent scintillant. Elle tenait dans sa main une colombe, parla à son tour.
— Sallyanna, par ma volonté, ton enfant sera porteuse de lumière. Elle éclairera les âmes dans l’obscurité, les cœurs dans la pénombre. Elle apportera la lumière lorsque le monde sombrera dans les ténèbres.
La colombe se posa sur le cœur de la jeune femme, aussitôt une multitude d’étoiles enveloppa sa poitrine.
Un homme, resté dans la pénombre, son visage caché par la capuche de sa tunique châtaigne, s’avança
— Sallyanna, tu nommeras ton enfant Elora Danan. Moi, Aniel, je lui fais don du courage, de la force et de la toute puissance de la magie. Elora Danan, tu seras l’arme ultime contre les ténèbres.
Il s’approcha de la jeune femme et apposa ses mains sur le front et le ventre. Aussitôt, le corps de Sallyanna fut pris de spasmes assez violents. Elle s’évanouit.
— Pourquoi m’avoir montré tout cela ? demanda Willow.
— Pour que tu saches et comprennes. Elle t’a choisi parce que tu es un homme courageux au cœur pur. Nous savons tous, que tu seras toujours présent pour elle.
*******
— Je suis… Je suis la magie.
— Tu es née de l’amour, de l’espoir et de la lumière, expliqua Willow à Elora.
*******
Elora grandit à Tir Asleen dans le plus grand secret. Afin de la protéger des ténèbres, Sorsha, décida de lui donner un nouveau nom : Brunhilde et de lui changer sa couleur de cheveux, du roux au blond, teints avec du jus de citron et du sang de coléoptère.
Sorsha et Madmartigan firent appel à un sorcier démon du nom d'Aniel afin qu’il la protège en dissimulant sa marque de naissance et interdisant toute utilisation de la magie qui fut mise en sommeil.
Fin Raziel et Cherlindrea unirent leurs forces et créèrent une barrière magique tout autour de Tir Asleen afin de protéger le royaume et Elora.
En grandissant, Elora devenait une enfant, espiègle, souriante, gentille et douce qui préférait passer son temps en cuisine avec sa nourrice Prunella que dehors où elle était souvent sujette aux moqueries des autres enfants.
Un jour, en voulant échapper aux sarcasmes des ses camarades, elle se mit à courir aussi vite qu’elle le pouvait. Elle voulait aller le plus loin possible, s’évader, disparaître. Dans sa fuite, Brunhilde croisa le chemin d’une autre petite fille, à l’écart de tout le monde, en train de frapper un bonhomme de paille avec son épée de bois. Elle s’approcha d’elle, essoufflée, des larmes ruisselantes sur son visage.
La petite Jade s’arrêta aussitôt de s’entraîner.
— Hé ! Tu n’as pas le droit d’être ici ! l’interpella la petite Jade
— Je veux m’en aller, loin de cet endroit.
— Pourquoi veux-tu partir ?
— Ils n’arrêtent pas, tous, de se moquer de moi.
— Pourquoi se moquent-ils de toi ?
— À cause de mon nom.
— C’est quoi ton nom ?
La petite fille hésita avant de lui dire. De peur qu’elle aussi ne se moque d’elle. Mais il n’en fut rien bien au contraire, elle l’encouragea.
— Hooo ! Moi aussi tout le monde se moque de moi parce que je ne suis pas comme eux. Alors je reste là et je m’entraîne. Ça m’évite de tous les frapper. Faut pas avoir honte de qui tu es. Les imbéciles ce sont eux pas toi, Brunhilde.
Brunhilde afficha un sourire
— Tu es qui ?
— Je m’appelle Jade et je serais la plus grande chevalière de Tir Asleen.
— Tu me protégeras contre tous ces gens.
— Je te protégerai et je les combattrai tous pour toi.
Les deux petites filles se mirent à rire, lorsqu’elles entendirent au loin la voix de Prunella qui cherchait Brunhilde.
— Il faut que j’y aille. On se reverra Jade chevalière.
Prunella ramena l’enfant au palais.
— Tu sais que tu ne dois pas t’éloigner.
Sorsha était furieuse, mais une colère mélange d’inquiétude et de peur d’avoir perdu la petite.
A ce moment là, Madmartigan arriva.
— Sorsha, arrête. Elle est saine et sauve.
Il prit Brunhilde dans ses bras, se dirigea vers les écuries, monta à cheval et l’emmena en dehors du château. Il s’arrêta au pied de l’arbre de vie.
— Hé ! Tu ne dois pas t’enfuir ainsi Sticks, c’est ainsi qu’il nommait Brunhilde depuis sa naissance.
— Je ne veux plus rester ici. Je veux un endroit où personne ne me verra et ne pourra se moquer de moi.
— Écoute-moi Sticks. Ne laisse jamais personne te dire qui tu es, qui tu n’es pas. Sache que tu es une enfant spéciale qui un jour accomplira de grandes choses.
Il marqua un petit instant de silence.
— Tu sais quoi, j’ai l’endroit tout rêvé pour toi où tu pourras être toi.
Il proposa à Sorsha de la prendre comme apprentie aux cuisines sous la tutelle de Prunella.
*******
Madmartigan se retrouvait seul à l’extérieur du palais en compagnie d'Aniel, son visage dissimulé sous sa tunique à capuche châtaigne.
— Qu’avons-nous fait Aniel. La priver de ses pouvoirs, lui cacher sa véritable identité. Est-ce là, la solution pour la protéger et protéger ainsi le monde ? Le mal reviendra. Il est là tapi dans l’ombre, attendant son heure. Sera t-elle prête ce jour venu ?
— Elle ne sera jamais seule dans son combat. Elle est la magie. Ses pouvoirs sont juste endormis. Le moment venu, elle saura les utiliser.
— Je vais devoir m’absenter. Je dois partir en quête de la fameuse Kymerian cuirass. Je vais devoir abandonner mes enfants, ma femme, Elora. Si c’est la seule solution pour la protéger, donner à ma famille et au monde un endroit sain où vivre et combattre les ténèbres, je me dois de le faire.
— Tu pars quand ?
— Demain dans la nuit je quitterai Tir Asleen. Je vais devoir partir comme un simple voleur. Je n’aurai pas la force de prendre mes enfants dans mes bras. Je sais qu’ils vont souffrir de mon absence, surtout ma fille. De toute ma vie, c’est la chose la plus difficile que je m’apprête à faire.
— Je ne peux rester à Tir Asleen, pour leur protection. Les forces du mal sentiraient ma présence. Mais n’oublie pas, je serai à tes côtés et auprès de Sorsha. Je veillerai sur tes enfants et Elora.
Madmartigan embrassa sa femme pour la dernière fois.
Part 7
The Bone Reavers
La nuit était tombée sur Tir Asleen, calme et apaisante. Une multitudes d'étoiles filantes scintillaient la voûte céleste. Tout le royaume était endormi. Exceptée Kit qui n’arrivait pas à trouver le sommeil. Pensant à la souffrance de son frère, le conflit avec le roi Hastur, la perte de Graydon, l’absence d’Elora et son père qui lui manquait toujours autant. Elle aurait tant aimé l’avoir à ses côtés, écouter ses conseils, s’entraîner et combattre avec lui. Elle avait grandit sans réellement le connaître, ignorant tout de sa vie, de son passé. Tous ces moments qui lui avait été volés. Elle repensait aux paroles de son frère. Oui, pourquoi Sorsha ne leur avait-elle rien dit ? Pour les protéger, certes. Mais à quel prix ? Elle restait persuadée que tous ensemble, ils auraient pu éviter la montée des ténèbres. Madmartigan lui avait laissé un vide immense qu’elle ne put jamais réellement combler. Même si la rencontre de Jade lui avait apporté tant de bonheur. Elle ne pouvait s’empêcher d’être rongée par la crainte que son amie ne l’abandonne également, maintenant qu’elle connaissait ses véritables origines. Elle la sentait tellement distante depuis qu’ils étaient tous rentrés.
Comme à son habitude, depuis son plus jeune âge, Kit se vêtit d’une tunique noire à capuche afin de dissimuler son visage et quitta sa chambre pour rejoindre celle de Jade. Elle avait besoin d’entendre sa voix, d’être à ses côtés. Jade représentait bien plus encore pour la princesse, elle était son soutien moral, sa présence la réconfortait et la rassurait. Non seulement, elle se sentait protégée, mais elle avait besoin d’elle dans sa vie. La dernière pièce du puzzle de son existence qui venait combler ce dernier espace vacant. Elle qui voulait tout simplement être aimée, ignorait qu’elle l’était depuis un certain temps par la personne qui comptait le plus. Jade était la seule à pouvoir combler une partie du vide que lui avait laissé l’absence de son père. Mais lorsqu’elle arriva, son cœur se brisa en mille morceaux.
Jade s’apprêtait à partir.
Leurs regards se croisèrent. Elle put lire dans les yeux émeraude de sa bien-aimée, toute la souffrance qui venait de lui déchirer le cœur.
La jeune chevalière fut prise au dépourvu.
— Kit… Je…
Comme à son habitude, Kit dissimula sa douleur par la colère.
— Qu’est ce que...Tu m’abandonnes... comme… une… lâche !!!
— Kit, écoute-moi… Je… Je me dois de le faire.
— Je viens avec toi ! s’exprima la princesse fermement.
— Non. Je dois le faire seule. Je suis désolée. Tu… Tu as un royaume à gouverner et moi je...
Kit laissa éclater sa colère
— Je n’en veux pas de ce royaume si tu n’es pas à mes côtés !!! Je… Je suis ta princesse. Tu es ma chevalière et je t’ordonne de rester !!!
— Je n’obéirai pas à cet ordre, répondit la jeune Bone Reaver tout en gardant son calme.
Elle s’avança pour partir, mais Kit s’interposa en la repoussant.
— Kit, je t’en prie, ne fais pas ça.
— Faire quoi !!!! Ça !!!! elle la frappa de nouveau.
— Arrête. Je ne veux pas me battre contre toi.
— Mais fuir comme une lâche, ça tu peux !!!!
La princesse continuait à provoquer son amie en la repoussant par des coups aux épaules à répétition.
— Kit, arrête !!!
— Que fais-tu de notre serment sacré !!!! Et ce collier que tu m’as donné !!!!! elle arracha le collier et le jeta à terre.
— Kit, je t’en prie. Je ne brise pas notre serment !!!
— T’enfuir en pleine nuit comme…
— Je ne suis pas ton père… On vivra ces aventures, rien que toi et moi. Je te le promets.
Dans sa rage, Kit ne l’écoutait plus et la frappa de plus en plus violemment. À un point que Jade fut obligée de riposter. Par un croche pied, la jeune princesse la fit trébucher sur le lit. Leurs regards se soutenaient, chargés de douleur, de rage et de désir.
Sans un mot, la princesse embrassa passionnément sa chevalière. Baissant sa garde l’espace de quelques secondes, Jade en profita pour la faire basculer sur le dos et la bloqua par les poignets. Leurs respirations se mêlaient, leurs corps se frôlaient et Kit pouvait sentir le cœur de Jade battre contre le sien.
— Je t’aime Jade, supplia-t-elle dans un murmure, sa colère laissa couler quelques larmes qu’elle ne put dissimuler.
— J’attendais ce moment depuis si longtemps, lui répondit Jade, les yeux brillants d'émotions.
Lorsque leurs lèvres se rejoignirent, pour la première fois de sa vie, Kit n’émit aucune résistance et se laissa envahir par une puissante sensation de plaisir qui se propageait dans tout son corps et fit naître aux creux de ses reins un profond désir. À l’instant même où Jade rompit le contact, un léger trouble envahit la princesse, une sensation de manque, similaire à une aspiration qui aurait arraché une partie de son âme.
— Un seul mot et j’arrête, la rassura Jade d'une voix douce.
— Non. Je… Je veux dire, n’arrête pas.
Tout en douceur, de crainte qu’elle ne se braque, enfermée dans son silence, elle la déshabilla tendrement. Kit la laissa faire. Son corps libéré de ses vêtements, respirait pleinement la fraîcheur de l’air qui venait la frôler. Jade la caressa de ses yeux noisette, comme si elle voulait imprimer chaque contour, chaque courbe dans sa mémoire. Sans un mot, elle commença à embrasser chaque parcelle de son corps. Le contact de ses lèvres tièdes, effleurant son épiderme comme une brise légère, éveilla chez la jeune princesse, de nouvelles sensations, exquises, jamais connues à ce jour, libérant les premiers gémissements d’un plaisir inexploré.
Les corps frémissaient sous l’effervescence d’une délicieuse extase. Chaque caresse de Jade engendrait des vagues de délices faisant trembler la jeune princesse.
Une tempête de désir immergea Kit tout d’un coup. Elle plongea dans un tourbillon d’une jouissance merveilleuse. Ses sens s'affolèrent, sa respiration se fit haletante, tandis que Jade l’aimait avec toute la tendresse et la douceur qu’elle pouvait lui offrir. Leurs mains se rapprochèrent et leurs doigts s’entrelacèrent comme si elles voulaient se fondre l'une dans l'autre.
Puis, la tempête de sensation s'apaisa. Leurs corps rassasiés se reposèrent, l’une contre l’autre, bercées par le rythme saccadé de leurs respirations, témoignant de l'intensité de leur amour.
Jade embrassa tendrement Kit endormie et apaisée. Elle se leva, s’habilla, déposa le collier à côté de sa dulcinée
— Pardonne-moi Kit pour ce que je vais faire. Je t’aime.
Et partit sans se retourner. Faisant galoper son cheval aussi vite qu’elle le pouvait comme pour chasser sa douleur et ses larmes qui coulaient le long de son visage.
*******
Le chemin fut rude, long et éreintant.
Jade ne cessait de penser à Kit. Elle avait conscience que son absence allait lui déchirer le cœur. Qu’elle prendrait comme une trahison son agissement, mais elle ne pouvait procéder autrement. Kit représentait tout ce contre quoi les Bone Reavers se battaient.
Lorsqu’elle arriva enfin au campement, exténuée, elle s’écroula. Lori accourut aussitôt pour la récupérer.
— Scorpia !!!! Viens vite !!! hurla-t-il.
Dès que Scorpia vit Jade dans les bras de son acolyte, elle la prit immédiatement dans les siens.
— Amenons-la dans ma tente, s'adressant tendrement à sa sœur, je vais m’occuper de toi, petite sœur.
Sous la tente, Jade éclata en sanglots.
— Je l’ai abandonnée.
— Ça va aller, petite sœur. Ça va aller, elle serra Jade tout contre elle comme pour la protéger.
Une fois reposée et rassasiée, Jade rejoignit sa sœur à l’extérieur, assise sur le perron, le regard droit devant, et se posa à ses côtés.
— Comment te sens-tu ? lui demanda Scorpia.
— Brisée mais reposée.
— Petite sœur, tout cela est à toi si tu acceptes ton héritage.
Toutes deux contemplaient le campement, leur unique demeure ainsi que tous ces Bone Reavers qui avaient appris à vivre cachés pour survivre.
— Scorpia, parle-moi de ma famille, de mon peuple. Qui suis-je réellement ?
— Aussi loin que je m’en souvienne, nous avons toujours été des esclaves en quête de liberté. D’un côté, utilisés pour assouvir des desseins maléfiques et de l’autre, poursuivis, traqués comme des hors-la-loi dans le but de nous anéantir. Nous avons dû apprendre à survivre, faire de ces bois sauvages notre demeure et de ces masques notre symbole de peur. Quoi que tu aies pu entendre, notre père était las de tous ces combats, ces meurtres qu’il commettait au nom de cette sorcière. Tout ce qu’il a fait, ce fut pour notre liberté mais jamais Bavmorda ne nous aurait affranchis. Je me souviens, la dernière fois que je l’ai vu, il m’a demandé de tenir sa promesse : celle de libérer notre peuple. Promesse que j’essaie d’honorer depuis que je suis devenue leur cheffe.
Elle tourna son regard vers Jade
— Avec toi à mes côtés, nous tiendrons cette promesse. Mais avant tout, tu ne dois plus porter, ni cette tenue, ni ces couleurs.
La jeune chevalière resta silencieuse et suivit sa sœur.
Jade n’était plus une chevalière mais une Bone Reaver. Si majestueuse dans sa nouvelle tenue aux couleurs de l’automne. Une longue tunique verdâtre qui s’étendait jusqu’au bas de ses reins, une cuirasse châtaigne avec des épaulettes afin de protéger sa poitrine jusqu’à sa taille, des protections aux avant-bras et des jambières qui recouvraient son pantalon chocolat, vêtue d’une longue cape à capuche noire et tenant l’épée que Ballantine lui avait offerte.
Scorpia était émerveillée devant sa nouvelle sœur
— Il te manque ceci.
Elle lui donna trois poignards qu’elle attacha à sa cuisse droite.
— Je t’apprendrai à t’en servir, elle sourit, tu es enfin chez-toi petite sœur.
Toutes deux marchaient au milieu de leurs semblables.
— Je ne pourrai jamais imaginer ce que tu as vécu à Tir Asleen, ni celle que tu as été obligée d’être. Oublie tout ce que tu as pu entendre sur nous. Regarde par toi-même. Ici, tu es leur souveraine. Personne ne te demandera d’être celle que tu n’es pas.
Jade ne voyait aucune agressivité en chacun. Juste des personnes qui essayaient de survivre et de s’entraider, partageant des repas, des soirées à parler tous ensemble, une communauté unie et loyale. Elle qui avait dû se battre pour se faire accepter à Tir Asleen, ici, elle se sentait chez-elle, à sa place. Elle pouvait tout simplement être, elle, pas d’ordres à suivre. Elle pouvait enfin libérer la personne qu’elle était vraiment.
— Tu as pu tous les libérés ? questionna Jade.
— Malheureusement non. Certains ont perdu la vie dans les mines. Ce fut un véritable carnage. Nous tuâmes autant de trolls que nous pûmes mais plus je libérais mes frères, plus j’en voyais périr sous les lames de ces créatures. Il y eut un tremblement, des rochers tombèrent, entraînant avec eux nos ennemis mais aussi nos semblables. J’ai tout de suite pensé à toi et… Boorman. J’ignorais si vous vous en étiez sortis.
*******
Lorsque Scorpia descendit dans les mines, elle se réfugia dans une crevasse et attendit. Dès qu'un troll arriva en sa direction, elle l’attaqua par derrière et l’égorgea avec son poignard, prit les clés et commença à libérer les premiers prisonniers. Ce fut le début d’affrontements violents et sanglants. Les captifs étranglaient les trolls de leurs chaînes, qui les avaient retenus depuis tellement d’années dans ces mines obscures où le temps n’avait plus d’emprise où la lumière n’étais qu’une illusion et l’air un souvenir qui se perdait au fil des ans. Libérant toute leur rage qu’ils avaient étouffée au fond d’eux sans aucune pitié pour leurs bourreaux.
D’un seul coup, un tremblement entraîna le détachement des roches qui, en tombant emmenaient sur leur passage aussi bien les trolls que les prisonniers.
L’un d’eux s’adressa à Scorpia
— Nous devons sortir ou nous allons tous mourir ici !!!
— Il nous faut trouver une issue !!! ordonna Scorpia.
Elle scruta du regard les alentours
— Là bas !!!!
Ils empruntèrent une sorte de tunnel creusé dans la roche, au bout duquel, ils se retrouvèrent devant un lac.
— Nous allons plonger. Restons bien unis, s’exclama la cheffe des Bone Reavers.
Tous plongèrent. Quelques mètres plus loin, Scorpia vit une lueur scintiller en surface. Elle se dirigea vers cette clarté et se retrouva hors du lac, loin des profondeurs des mines.
Ils étaient enfin libres.
*******
La nuit était tombée sur les Wildwoods.
Scorpia et Jade, allongées à même le sol, l’une à côté de l’autre, scrutaient les étoiles.
— Scorpia, je…
— Tu penses à Kit.
Jade hésita
— Tu es ma sœur et Kit est ma…
— Tu es une Bone Reaver avant tout. Le sang qui s’écoule dans tes veines est le même que le mien, celui de notre père. La famille de ta bien-aimée, nous ont pourchassés pour nous anéantir. Ils t’ont volé à ta famille et t’ont menti. J’ai cru que j’étais la dernière de notre lignée jusqu’au jour où je t’ai retrouvée.
— Nous ne pouvons continuer à commettre les mêmes erreurs que nos aînés. Nous pouvons instaurer un nouveau règne, toutes ensemble. Kit n’est pas comme sa mère ou son père.
— Fugueuse, impulsive, arrogante mais amoureuse de toi. Crois-tu que Sorsha acceptera votre liaison ? Crois-tu qu’elle laissera sa princesse de fille s’amouracher d’une Bone Reaver ? Crois-tu que Tir Asleen acceptera cela ? Nous sommes des hors-la-loi à leurs yeux. Nous sommes ceux qui avons combattu aux côtés de Bavmorda. Toi, ma petite sœur, tu étais remplie de haine et de colère envers nous.
Jade resta un instant pensive
— Et toi Scorpia… Accepteras-tu ?
Scorpia resta silencieuse.
Les deux sœurs s’amusèrent à compter les étoiles.
Part 8
Graydon
Galladoorn.
Le roi Hastur faisait les cents pas dans la salle du trône, préoccupé. Quel plan allait-il pouvoir mettre en place afin de répondre aux attentes du Wyrm, lui apporter Willow et Elora ?
Lorsqu’un garde entra, affolé, essoufflé, impossible de s’exprimer clairement
— Mon Seigneur…. Je…. Il… Le… Prrrrr…
Hastur s’énerva.
— Parle !!!!!! Où je te fais mettre aux fers !!!!!!
Le jeune garde n’eut pas le temps de s'expliquer. Les portes de la salle du trône s’ouvrirent brutalement, ébranlées par une violente bourrasque. Deux êtres entrèrent.
Le roi reconnut la voix masculine et se retourna aussitôt.
— Bonjour père, la voix de Graydon résonnait comme un écho sinistre.
A la vue de son fils, Zivian, fut stupéfié. Il prit quelques secondes avant de reprendre ses esprits et répondre.
— Tu es mort !!!!
— Ho non, je suis bien vivant, père, et plus puissant que jamais.
Graydon n’était plus le même. D’une personne effacée, manquant entièrement de courage et de confiance, Zivian avait devant lui, un être au regard obscur et maléfique. Tout vêtu de noir, les cheveux en arrière. il portait un tallcoat gothique brodé avec des soieries, le col relevé, un gilet de satin noir et une chemise rouge sang. Des boutons dorés représentaient le sigle du Wyrm. Un pantalon de cuir noir, recouvert par des bottes montantes jusqu’aux genoux.
À ses côtés, Dark Elora, les cheveux courts, oranges, vêtue d’une combinaison de cuir, noire, échancrée, se fondant parfaitement aux courbes de son corps. Elle avait le regard si sombre et si pernicieux, tout indiquait dans ses yeux, la froideur, le désespoir, les ténèbres et la haine.
Hastur ouvrit la bouche pour parler
— Non. Tu n’es pas mon...
Mais Graydon le coupa d'un ton sarcastique, sa voix tranchante.
— C’est ainsi, que vous accueillez le retour de votre fils. Ne suis-je pas devenu celui que vous vouliez que je sois !!!!!
— Ce que je voulais de toi, c’est que tu me donnes un héritier à Tir Asleen afin de me rendre ce que tu m’as enlevé !!!!!
Le rire diabolique de Graydon résonna dans la salle du trône, glaçant l’atmosphère et figeant le roi de terreur.
— Dermot, le fils prodige, l’héritier du trône, celui qui était voué à gouverner Galladoorn et Tir Asleen, Ce n’était qu’un faible !!!! cracha-t-il avec mépris. Refusant les combats et les armes !!!! il arbora un sourire diabolique, ce fut si facile pour moi de le balancer de l’arbre. Je n'ai eu qu'à utiliser sa faiblesse, la confiance qu’il avait en moi.
Zivian ne put contenir sa colère et se jeta sur son fils, mais Graydon le propulsa violemment contre le siège du trône, d’un éclaire rouge surgissant de sa main. Hastur vacilla, ne pouvant résister à la force surnaturel de son fils. Grayon se rapprocha de lui, son visage à quelques centimètres de celui de son père, ses yeux brûlant d'une flamme maléfique.
— Toute ma vie vous n’avez fait que me discréditer, m’humilier. Je n’étais pas le fils digne de porter le nom des Hastur. Je n’étais qu’une honte pour vous.
Il prit le visage de son père entre ses mains, l’obligeant à le fixer droit dans les yeux et s’écria
— Regardez-moi !!!! Vous avez voulu me contrôler. Je suis le résultat de vos attentes !!!! sa voix était glaciale et dépourvue de toute émotion.
À ce moment là, la reine Arianna, informée du retour de son fils, entra dans la salle.
— Graydon, mon fils, vous êtes vivant.
Heureuse de le retrouver, elle accourut vers lui.
Surpris, le jeune prince eut un geste d’hésitation et laissa sa mère le prendre dans ses bras. Dark Elora, s’apercevant du changement, s’adressa aussitôt au jeune homme.
— Graydon, reste à mes côtés. Comment peux-tu oublier ce qu’ils t’ont fait ! Le sacrifice de ton corps et de ton âme !
La rage, la colère l’envahirent de nouveau et il repoussa sa mère, toute affolée, avec hargne.
Arianna s’adressa à Dark Elora
— Qui êtes-vous, qu’avez-vous fait à mon fils !
— Je suis… Votre impératrice Elora Danan, dit-elle sur un ton sarcastique. Votre fils s’est juste libéré de toutes ses peurs. Il a tout simplement compris qui il pouvait être réellement. Je n’ai fait que terminer ce que vous aviez commencé à sa naissance.
Arianna fut interloquée par les paroles qu'elle venait d'entendre.
— Vous… Elora Danan… L’impératrice !!! De quoi parlez-vous !
Dark Elora s’adressa à Zivian sur un ton narquois
— Vous ne lui avait rien dit, mon Roi.
— Vous n’êtes pas Elora Danan.
Graydon prit la parole.
— Mère, laissez-moi vous raconter une histoire.
Il existe dans les catacombes de notre château, une pièce dédiée aux sacrifices de l’Ordre du Wyrm. Le jour de ma naissance, mon cher père, me mena en ce lieu et me posa sur un temple de pierre. Des prêtres, six en tout, cachés sous leurs tuniques à capuche grise anthracite, l’un d’eux me déposa dans un baptistère rempli du vermiscus et commença une incantation en Pnakotic. Ce fut ainsi, tous les ans, à la date de ma naissance, je subissais ce rituel ignoble.
Lorsque j’atteignis l’âge de dix ans, ce que père me fit subir fut un véritable calvaire. Régulièrement il me mena dans cette pièce aux supplices, enchaîné sur cette dalle des tortures, bâillonné afin de ne pas être entendu, les prêtres marquèrent mon torse des incantations inscrites dans le Malatrium tout en les fredonnant à haute voix.
Je suppliais père d’arrêter tout cela. Je pleurais. Je me mettais à genoux. Mais il ne m’écoutait pas. Il me traitait telle une offrande.
Les soirs, seul, dans ma chambre, j’implorais la mort de venir me chercher pour mettre un terme à toute cette abomination. J’étais sujet à des visions me représentant comme une personne démoniaque, assassin, voire diabolique. La seule force qui m’a permis de tenir fut votre amour, mère. Cet amour que vous me procuriez chaque jour. Je ne savais plus qui j’étais. Je sentais ce pouvoir, cette force grandir en moi. Me rendre invulnérable, puissant.
Puis vint cet instant maudit, où je poussai mon frère de cet arbre. Ce jour où je ressentis toute cette force et cette satisfaction dans mon geste. Ce jour où je n’eus aucun remords.
Ce jour là, père me mena pour la dernière fois dans cet enfer. Il expliqua aux prêtes ce que je venais de faire subir à mon frère. De nouveau, enchaîné, bâillonné. Cette fois-ci, les prêtes firent une incantation afin de mettre en sommeil toute cette puissance qui grandissait en moi.
Mais lorsque je fus contaminé par le Lich et que Willow et Elora utilisèrent le Malatrium pour me libérer, des flashs de ces instants de tortures me vinrent à l’esprit. Je mettais cela sur la peur, le manque de courage, le faible que j’étais. Tout au long de cette quête pour sauver le prince, j’écoutais les enseignements de Willow à Elora. J’apprenais. Petit à petit je sentais toute cette magie s’éveiller, m’enivrer d’un intense pouvoir. Lors de mon sacrifice pour sauver Elora…
— L’autre Elora, la gentille pas moi, ironisa Dark Elora.
— Tout me revint, tout ce que père m’avait fait subir. Tous ces cauchemars n’étaient en fait que mon passé. Un passé dissimulé par la magie mais que le Wyrm avait enfin libéré. Je compris qui j’étais réellement. Le Wyrm m’avais libéré de toutes mes peurs et croyances. Toute une vie de mensonges. Il me permit de découvrir ma nouvelle vérité. Mes peurs et les choix que j’avais faits.
Arianna était toute abasourdie par ses révélations et se tourna vers on époux.
— Zivian, je t’en prie, dis-moi que c’est faux.
— Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait pour notre famille !!!!
— Faux !!!! Vous ne l’avez fait que pour le pouvoir. Vous êtes tellement assoiffé de pouvoir que vous n’avez pas hésité à vendre vos fils !!!!! hurla Graydon.
Dans sa fureur, Graydon attaqua son père, lançant des éclairs de ses mains. Voyant son mari se faire torturer par son fils et toute cette animosité qui vibrait dans le regard du jeune prince, Arianna essaya de le ramener à la raison.
— Graydon, je t’en prie !!!! Arrête !!!!
Mais il ne l’écoutait pas.
Elle radoucit le ton de sa voix
— Graydon, mon fils, je t’en prie.
Le jeune prince se retourna, vit le visage apeuré de sa mère et laissa son père, à moitié abattu par la force de frappe qu’il venait de subir. Le roi trouva la force pour appeler les gardes.
— Gardes !!!! À l’aide !!!!
D’un simple geste, Dark Elora, fit apparaître the Scourge, the Doom and the Lich accompagnés des Death dogs.
Les gardes entrèrent, un combat s’amorça contre les sbires d’Elora. Un affrontement meurtrier et épouvantable. Chacun des chevaliers de la garde périssaient sous les armes des Gales et les attaques des Death dogs. Les cadavres jonchaient le sol de la salle du trône. Des corps transpercés, déchiquetés, démembrés, décapités, le sang des morts s’écoulait sur le sol. Cet affrontement vit la défaite des chevaliers de Galladoorn et la victoire des Gales.
— Seriez-vous prêt à sacrifier tous vos hommes, cher père ? l’interrogea Graydon.
Zivian resta silencieux tandis que son fils poursuivit :
— Je te laisse la vie sauve, pour l’instant. Ramène nous le sorcier et l’Impératrice et je déciderai de ton sort. Désormais Galladoorn m’appartient.
*******
Assis sur le trône de Galladoorn, Graydon se concentrait profondément, fermant les yeux pour ralentir sa respiration. Une lueur d'énergie imprégnait l'air. Soudain, il rouvrit les yeux brusquement et prononça le nom d’Elora. Laissant l'écho de sa voix inonder la pièce.
Au même instant, la jeune impératrice, aux côtés de Willow, pour parfaire son entraînement à la magie, eut la vison du visage de Graydon et tomba, déstabilisée.
— Graydon, murmura-t-elle.
Part 9
Le Serment Secret de Tir Asleen
— Willow… Graydon est en vie. Je le sais, je le sens. Toi aussi tu le ressens n’est-ce pas. Je dois l’aider.
Willow hésita avant de répondre à Elora.
— Si tel était le cas et j’en doute fort, il n’est plus l’homme que tu as connu, infecté par le Wyrm. Tu as vu les effets qu’il a produits sur Ballantine, Merrick et… Airk, Graydon… Il n’a pas la force de lutter.
— C’est pour cela que je dois l’aider. Si il y aurait ne serait-ce qu’une petite lueur d’espoir alors je me dois de le faire. Nous devons retourner à Tir Asleen.
Willow s’approcha de la jeune Impératrice et prit son visage entre ses mains
— Tu n’es pas prête. Tant que tu n’accepteras pas Celle que tu es, tu ne maîtriseras pas cette magie qui vit en toi.
Elora le supplia
— Lorsque j’ai regardé à travers la lumière croyant y trouver le corps de Graydon, je n’ai vu qu’un monde apocalyptique, en flamme, en cendres. Je ne laisserai pas le Wyrm détruire notre monde. J’ai vaincu The Crone, j’anéantirai le Wyrm. Mais j’ai besoin de toi. Je t’en prie.
Mims les rejoignit à cet instant précis.
— Je t’accompagnerai, Elora.
Willow se mit en colère
— Non Mims. Il est hors de question !
Mims haussa le ton de sa voix
— Je le ferai Popa. Je suivrai notre Impératrice. Elle aura besoin de nous tous. Seule, elle n’y arrivera pas. Il nous faut réunir une armée qui se battra à ses côtés. Que tu le veuilles ou non, je ferai partie de cette armée. Tir Asleen, a besoin de nous. Tu le ressens, tout comme Elora, Le Wyrm grandit en puissance.
Willow fixa la jeune Impératrice qui l’implorait du regard.
— Ma place est à tes côtés. Comment pourrais-je t’aider sans ma magie.
— Willow, tu me l’as toujours dit, la magie est en toi, il suffit que tu y croies.
*******
Airk se rendait à la bibliothèque du château dans l’espoir de trouver des réponses à ses questions. Tous ces mystères que sa mère lui avait cachés. Depuis qu’il avait été sous l’emprise du Wyrm un changement s’était produit en lui. Un changement qui le poussait à connaître la vérité sur sa famille, son passé. Les paroles du roi Hastur ainsi que celles d’Elora ne cessaient de tourmenter son esprit. Depuis qu’il était rentré, il ne cessait d’être hanté par d’horribles cauchemars dans lesquels il entendait sans relâche la voix de The Crone, voyait le visage de Lili, le combat avec sa sœur, le roi qu’il aurait pu être et toute cette puissance qui l’avait habité sans aucun ressenti de peurs et de faiblesse. Mais ce qui l’oppressait le plus et l’effrayait était la vision de cet affrontement dans lequel Kit succombait. Jamais il ne put voir son assaillant. Il était terrorisé. Toutes les nuits il redoutait de s’endormir et avoir ces horribles images de sa sœur, inerte, tout de noir vêtue, une tunique, protégée par une cuirasse, des gants en cuir recouvrant ses mains jusqu’aux coudes, un pantalon par dessus lequel des cuissardes et un heaume enveloppant son visage. Il s’était refusé d’en parler à sa mère. Quant à Willow ou Elora, les seuls qui pourraient peut-être l’aider n’étaient plus à Tir Asleen. Il se devait de la sauver par tous les moyens, même si pour cela, il devrait sacrifier sa vie.
L’endroit était assez lugubre, poussiéreux. Cela faisait bien des lunes que personne ne s’était aventuré en ce lieu, presque oublié. Des centaines de livres sur des étagères et d’autres posés en vrac sur une table de bois. La bibliothèque, la lecture, n’était pas la passion première du jeune prince. Comment allait-il pouvoir trouver le grimoire qu’il cherchait.
Il se mit face au rayonnage et soupira : « Allez Airk, lance toi. »
Cela faisait des heures qu’il cherchait, jetant par terre tous les manuscrits en tous genres, des recettes de cuisines, l’astronomie, l’astrologie, la phytothérapie, la naturopathie mais rien sur sa famille ou Tir Asleen.
Sous l’emprise soudaine d’une terrible colère, le jeune prince balança d’un revers de la main tous les livres se trouvant sur la table. Il fallait à tout prix qu’il se procure ce manuscrit, peut-être était-ce le seul moyen de sauver sa sœur.
Tout d’un coup, il remarqua un tiroir cadenassé. Il essaya d’arracher la cadenas avec la main, mais sans succès. Examinant du regard chaque recoin de la pièce, rien. Agacé, il prit un presse papier, frappa aussi fort qu’il le put. Fou de rage, il balança l’objet, qui se brisa contre le mur et libéra un couperet d’argent ressemblant à une clef. Il s’en empara et ouvrit le tiroir.
Se trouvait, un magnifique grimoire à la couverture en cuir sur lequel était représenté le symbole de la royauté : L’Arbre de Vie à l’intérieur d’un cercle de lys de la paix entouré d’un octogone, intitulé : The Secret Oath of Tir Asleen (Le Serment Secret de Tir Asleen). Le manuscrit était fermé par une serrure qu’il poussa sur le côté, dévoilant ainsi ses secrets enfouis. Des parchemins d’or calligraphiés relatant l’histoire de la famille Tanthalos et Tir Asleen. Airk se mit à feuilleter le grimoire et plongea dans le passé.
*******
Tir Asleen était un magnifique royaume prospère, de paix et d’abondance, le plus puissant d’Andowyne, possédant de riches terres agricoles et gouverné depuis des lunes par des monarques bienveillants. Réputé pour son hospitalité, chacun pouvait y trouver un abri. Renommé pour sa richesse culturelle et ses enseignements, de nombreux sorciers étudièrent dans la bibliothèque du château. Ce fut en ces lieux que Fin Raziel et Bavmorda apprirent la magie aux côtés de Cherlindrea.
Mikal Tanthalos fils de Tanthalos VIII, fut le dernier souverain de Tir Asleen. Homme aimant la culture, les arts et les lettres, reconnu pour sa grandeur d’âme, sa bonté, sa compassion et sa générosité. C’était un souverain qui s’efforçait toujours d’agir le plus justement possible. Mais tout changea à l’arrivée de Bavmorda.
Enfant prodige, curieuse, intelligente, elle assimilait de façon si incroyable la magie, qu’elle obtint le respect de Cherlindrea. Chacun voyait en elle une enfant des Cieux, l’Élue qui apporterait la paix dans tout l’univers. Mais Bavmorda était vouée à un tout autre destin. Lors de sa venue au monde, de nombreuses créatures de la nuit, entourèrent sa mère et assistèrent à sa naissance. Cette enfant avait été conçue par les ténèbres.
Un soir, tandis qu’elle se trouvait à la bibliothèque du château, le Malatrium, un grimoire contenant des incantations de la sorcellerie maléfique, lui apparut. C’est ainsi qu’elle commença à étudier cette magie interdite et plus elle s’en imprégnait, plus la noirceur obscurcissait son âme ainsi que son cœur et les ténèbres s’écoulaient dans ses veines. Non seulement elle se nourrissait du Malatrium mais cette magie dangereuse se nourrissait de Bavmorda.
Au fil des ans, elle devint une sorcière maléfique si puissante qu’elle attisa l’intérêt d'une secte naissante, l’Ordre du Wyrm qui la rallia à sa cause. Le jour où elle porta allégeance à cette secte, Bavmorda se tourna définitivement vers les ténèbres. Utilisant sa magie noire pour anéantir les parents de Mikal, seul héritier du trône de Tir Asleen. Le jeune prince, sous l’envoûtement de Bavmorda, finit par l’épouser.
C’est ainsi qu’elle s’empara du trône et instaura une ère de violence et sanglante. À la naissance de sa fille Sorsha, elle quitta Tir Asleen, emmenant son enfant avec elle et piégea son époux ainsi que tous les habitants dans des blocs de glace. Elle s’installa à la forteresse volcanique de Nockmaar d’où elle continua son règne de terreur.
*******
Airk avait grandi dans une bulle dorée dans laquelle les secrets les plus sombres de sa famille ne pouvaient l’atteindre. Mais aujourd’hui tout ce qui avait été enfoui, oublié, venait de lui être dévoilé. Le jeune prince découvrait une facette de sa mère qu’il n’aurait jamais soupçonnait qu’elle puisse exister. Il avait était élevé, éduqué par une personne au passé ténébreux, agissant aux côtés de la sorcière la plus maléfique, dans l’unique but d’anéantir la jeune Elora. Cette même Elora qu’elle protégeait aujourd’hui. Tout n’était que tromperies et mensonges. La colère le submergea.
Il continua à parcourir le grimoire et comprit l'une des raisons pour lesquelles Tir Asleen était si convoité. L’Arbre de Vie, n’était pas seulement l’emblème de la royauté de la famille Tanthalos, bien plus que cela, il était l’essence même de la magie qui façonna The Wand de Cherlindea. Qui possédait Tir Asleen, possédait la magie.
La présence de Bavmorda en ces lieux, attisée par le monde obscur, utilisant la magie pour assouvir ses funestes ambitions, noircit les racines de l’Arbre de Vie et réveilla le Malatrium qui attendait sa venue. Son avidité, sa soif de pouvoir le nourrissait un peu plus à chaque usage.
Le Malatrium était un manuscrit à la couverture faite de peau de Satyre, qui contenait les incantations d’une magie oubliée, trop dangereuse pour être pratiquée. Quiconque se laissait séduire par cette magie interdite, sombrait sous l’emprise du Malatrium qui avivait l’envie, le pouvoir, la domination, les ténèbres. Il fut créé par les Malevoiy, un peuple de fées très ancien qui se délectait de la mort et de la cruauté. En ces temps anciens, les Malevoiy régnaient sur le monde jusqu’à ce que les Daikinis les chassèrent de Nockmaar, mais leurs esprits continuèrent d'hanter les lieux, attendant leur retour qui leur redonnera leur gloire.
En feuilletant cette partie sinistre du grimoire de sa famille, les pages s’assombrissaient tout comme les calligraphies. Airk fut parcouru d’un effroyable frisson dans tout le corps, lorsqu'il découvrit que Willow et Elora avaient à eux deux, utilisé cette magie interdite pour sauver Graydon.
« Elora, non, tu n’as pas fait ça. » murmura-t-il
Le manuscrit s’était réveillé et se remplissait seul des aventures de sa famille et tout ce qui s’y reportait. Son kidnapping à sa libération. Tout y était. La dernière page se dessina lentement sous ses yeux. Ce qu’elle lui dévoila, le remplit de terreur. Le grimoire venait de reproduire son abominable cauchemar, sa sœur inerte, succombant aux attaques de son assaillant caché dans l’ombre.
Airk referma brutalement le manuscrit pour chasser ces affreuses images. Sa famille avait un lien direct avec le Wyrm. Peut-être que, cette magie qui coulait dans les veines de sa grand-mère, pourrait aussi subsister en lui et en sa sœur. Peut-être lui fallait-il tout simplement la réveiller.
Il lui faillait le Malatrium pour sauver sa sœur.
Il devait retourner à Nockmaar.
Part 10
Le Commencement de la Guerre
Un épais brouillard, menaçant, s’épaississait, enveloppant tout dans son voile obscur. Au milieu de toute cette brume dense, une présence maléfique se dévoilait peu à peu. L’ombre de Bavmorda émergea, révélant son visage d’une grande noirceur, sans âme ni compassion, ses yeux sombres. La noirceur de son âme répandait une aura de malveillance et de perfidie. Elle s’avançait lentement, sa démarche empreinte d’une confiance arrogante, son sourire malfaisant.
Elle s’exprima, froidement, dans un murmure « Kit… Mon enfant, rejoins-moi. Tu es liée à moi par le sang des six qui coule dans tes veines. Je te dévoilerai l’étendue de ton pouvoir. Ta destinée est bien plus grande que tu ne le penses. »
Kit se réveilla en sueur, le souffle coupé, cherchant instinctivement la présence réconfortante de Jade à ses côtés. Mais son cœur se serra douloureusement lorsqu’elle découvrit un espace vide.
La colère la submergea, se mêlant à la peur persistante du cauchemar qui la tourmentait. Elle aperçut le collier, posé sur le lit, à ses côtés. Elle le récupéra, le serra fortement dans sa main jusqu’au sang et s’écria.
« Jade, non !!!! »
Les émotions tumultueuses déferlaient en elle. Elle se sentait inondée par la peur de l’abandon et de la trahison. La blessure causée par le geste de Jade était profonde. Kit se sentait meurtrie dans l’âme.
Elle se leva et s’habilla hâtivement. À l’instant même où elle s’apprêtait à partir, son frère fit irruption dans la pièce et la plaqua précipitamment contre le mur. Posant sa main sur sa bouche, sans qu’elle n’ait eu ni le temps de réagir ou de s’en prendre verbalement à lui.
— Ne crie pas. Ok.
Connaissant sa sœur, elle se débattit et le repoussa.
— Qu’est ce qui te prends !
Le jeune prince jeta un œil vite fait aux alentours et lorsqu’il vit le lit de Jade défait, il ne put s’empêcher de taquiner sa sœur.
— Je vois que tu as passé une excellente nuit.
La jeune princesse lui lança un regard froid et désabusé. Ce n’était pas le moment ni l’endroit pour ce genre de plaisanterie. Accablée par l’absence de Jade, elle refoulait ses larmes, en serrant dans sa main blessée ce collier, dont sa valeur venait d’être brisée.
— Quoi… Non… Il ne s’est rien passé… Et puis arrête ! Comment sais-tu que je suis ici !!!
— Tu crois que je n’étais pas au courant de tes petites virées nocturnes ? Cette tension entre vous deux. Enfin, il était grand temps que tu acceptes tes sentiments envers Jade. Il faudra qu’on en parle mais là...
— Je n’ai pas à en parler avec toi ! répondit sèchement la jeune femme.
Soudain, des cris de douleurs retentirent à l’extérieur. Kit voulut sortir mais son frère la retint. Son attitude était incompréhensible. Il s’agitait, préoccupé et s’exprimait sans se calmer.
— Écoute-moi attentivement. Nous sommes assiégés, murmura-t-il.
— Quoi !!! Maman, il faut aller l’aider !
Lorsque Airk vit la tenue que portait sa sœur, celle de ses cauchemars, les terribles images qui hantaient ses nuits se superposèrent, et brutalement, sa gorge et l’estomac se nouèrent, suivis de tremblements dans tout son corps.
— Qu’est ce qui t’arrive ? demande Kit, inquiète.
— Je m’occupe de maman. Je vais l’éloigner de Tir Asleen. Ils sont trop nombreux. Nous ne pouvons les combattre seuls. Toi, pars chez les Bone Reavers, va la retrouver.
— Elle m’a abandonnée ! la voix de Kit se brisa.
Le jeune prince posa une main compatissante sur l’épaule de sa sœur, sentant sa peine et sa détresse. Il voyait toute cette souffrance dans son regard, causée par l’absence de Jade. Il essaya de la réconforter.
— Non, crois-moi. Elle ne t’a pas abandonnée. Elle… Parfois les devoirs nous imposent des choix difficiles. Ne laisse pas la peur obscurcir l’amour qui vous unit. Viens avec moi.
Il la prit soudainement par le bras et la mena en courant aux écuries qui n’avaient pas encore été prises d’assaut.
Il prit son cheval, un bel étalon à la robe noire brillante qu’il donna à sa sœur
— Tiens, pars avec Midnight et surtout ne te retourne pas, quoi qu’il arrive, il lui donna l’épée de leur père qu’il avait cachée dans un des box. Prends la, je l’ai récupérée à la salle d’armes. Je sais combien elle compte pour toi.
Kit était un peu perdue par le comportement de son frère et ne comprenait pas trop ses agissements.
— Airk… Que vas-tu faire ? Je reste avec toi…
Il s’emporta, jamais il n’avait agit de la sorte envers elle.
— Pour une fois dans ta vie, fais ce que je te demande. Va-t’en !!!
Il frappa si ardemment Midnight que ce dernier partit violemment au galop.
Sa sœur, enfin loin, le jeune prince s’exprima à lui-même « Je vais tout arranger petite sœur. Je vais sauver maman, je vais te sauver toi et notre royaume. C’est ce que doit faire un grand roi. Va la retrouver. Elle t’aime autant que tu l’aimes. Votre amour est puissant. »
*******
Airk n’avait pas pu donner les véritables raisons qui avaient poussé Jade à partir. Honorant la promesse qu’il avait faite à la jeune chevalière lors de leur dernière discussion, avant qu’elle ne s’en aille. Connaissant sa sœur, elle aurait explosé de colère et aurait agi sous l’impulsivité.
Jade s’entraînait à l’endroit même où elle avait l’habitude de le faire avec Ballantine. Le mannequin de paille était toujours là, usé, inutilisable mais la jeune chevalière s’était refusée de l’enlever. Il lui rappelait la présence de son mentor, toutes les leçons qu'il lui avait enseignées et comment canaliser sa colère pour les combats. Mais aujourd’hui, elle en voulait au monde entier. Elle se sentait tellement dévastée et démunie. L’absence de Ballantine créait un vide immense dans le royaume et dans son cœur.
Elle se mémorisait tous ces moments passés à ses côtés, ses sages paroles, son écoute attentive. Toutes les fois où il l'avait réconfortée, soutenue dans ses choix. Il ne lui restait que ses souvenirs et ce lieu avec ce pantin de paille. Elle ne put retenir ses larmes mélange de rage et de tristesse.
Le royaume avait perdu un grand homme, un guide et un protecteur. Mais pour Jade il était sa figure paternelle, son pilier. Elle s’attendait à le voir débarquer aux écuries, en colère, comme il le faisait trop souvent lorsqu’elle était enfant.
Elle se devait d’honorer sa mémoire en continuant à puiser dans les valeurs et la sagesse qu’il lui avait transmises. Mais un dilemme se posait.
Lorsque Airk arriva, il hésita un instant avant d’entamer la conversation, ne sachant quoi lui dire, ne voulant surtout pas la blesser encore plus qu’elle ne l’était.
— Je suis désolé, lui dit-il tendrement.
— Je vais bien, Votre Altesse Royale
Airk leva l’index tout en s’approchant de Jade
— En fait, Airk, ça m’ira tout aussi bien. Surtout que tu es amenée à faire partie de notre famille.
La jeune fille lui lança un regard noir.
— Bon j’avoue c’est un peu prématuré. Mais…
— S’il te plaît, arrête.
— Pourquoi refuse-tu d’exprimer tout simplement tes émotions ? Tu as vécu en camouflant ton amour. Je me rappelle encore nos conversations comme si elles avaient eu lieu la veille. Pourquoi t’interdis-tu de vivre pleinement cet amour.
— Tu ne comprends donc pas ! Vous êtes de sang royal destinés à gouverner et moi, je… Je n’appartiens même pas à Tir Asleen. Vous représentez tout ce pour quoi ma famille se bat et moi… Je représente l’ennemi de votre royaume. Où est la place de mon amour dans tout cela ?
— Tu as toujours été là pour ma sœur, la protéger, supporter ses humeurs, et crois-moi ce n’est pas chose facile. N’oublie pas, tu as abandonné tes rêves pour la suivre et pour tous les guider jusqu’à Immemorial City pour me sauver. Tu as autant ta place dans ce royaume que ton amour.
— Je n’ai fait que mon devoir.
— Ho, non tu as fait bien plus que ça. Je sais que c’est compliqué pour toi en ce moment. Ne penses-tu pas, que tu as droit, ne serait-ce quelques instants, de vivre pleinement ce que tu désires.
— Je ne peux pas. Que se passera-t-il après, si je cède ? Et sans vous manquer de respect Votre Altesse, vous êtes très mal placé en matière de conseils amoureux.
— Là, je dois avouer que tu n’as pas bien tort.
Le jeune prince cessa ses plaisanteries et prit un air bien plus sérieux.
— Qu’est-ce que tu ne me dis pas.
Jade ne répondit pas et lui tourna le dos. Le jeune homme n’eut pas d’autres choix que d’insister, obligeant son amie à lui répondre.
—Chevalière, ton Prince t’a posé une question.
Jade se retourna et le fixa droit dans les yeux.
— Je dois quitter Tir Asleen. Il me faut comprendre qui je suis, découvrir mon passé, ma famille. Savoir qui était mon père, apprendre qui est ma sœur, qui sont les Bone Reavers. Je sais que ça va briser le cœur de Kit mais je n’ai pas le choix. Et... ce n’est pas tout. Je dois les convaincre de se rallier à notre cause. Kit ne doit pas savoir.
Airk ne cessait de gesticuler
— Kit par ci, Kit par là, briser le cœur de Kit, et le tien Jade, qui va recoller les morceaux de ton cœur.
Le jeune homme s’approcha et posa ses mains sur les épaules de la jeune chevalière.
— Ce n’est pas ton Prince qui te parle mais ton ami. Je te promets que je ne lui dirai rien. Ce ne sera pas la première fois que je te fais cette promesse, dit-il en souriant. Mais cette fois-ci je te demande quelque chose en retour. Promets-moi de te laisser transporter par tes sentiments, sans penser à l’après. Ne choisis pas cette souffrance à la place de ton amour. Cet endroit est devenu ton foyer. Tu es autant une Bone Reavers qu’une chevalière de Tir Asleen.
— Je partirai ce soir. Sois là pour elle, lorsqu’elle découvrira mon absence.
*******
Des démons, les sbires du Wyrm, s’élevaient, leurs silhouettes sinistres se dessinaient dans les ténèbres qui envahissaient les alentours de Tir Asleen. Leurs yeux rouges brillaient d’une lueur maléfique tandis qu’il poussaient des rugissements démoniaques qui semblaient faire trembler et céder la barrière de Cherlindrea.
Le garde de Sorsha entra précipitamment dans la chambre, son visage empreint d’inquiétude.
— Votre Majesté, nous sommes assiégés ! Vous devez fuir, il n’y a pas de temps à perdre ! s’écria-t-il tentant de la convaincre.
Sorsha se redressa d’un bond, son esprit en alerte et déclara d’une voix déterminée
— Je ne fuirai pas. Je défendrai Tir Asleen au péril de ma vie. Qui nous attaque !!!
Le garde ne s’attendait pas à une autre réaction de sa Reine, sachant qu’elle était une combattante, prête à défendre son royaume et tous ceux qu’elle aimait. Il hésita avant de lui répondre.
— Sir Hastur, ma Reine, entouré d’une armée de démons.
Alors que Sorcha assimilait cette terrible révélation, une profonde tristesse s’empara d’elle. Comment avait-il pu trahir leur alliance et leur amitié de si longue date. Elle ressentit un sentiment d’amertume face à cette trahison, cependant elle devait se concentrer sur la stratégie de défense. Elle ne pouvait pas se laisser submerger par ses émotions. Son royaume était en danger.
Des démons surgissaient de toutes parts, semant le chaos et la destruction dans leur sillage. Le ciel autrefois éclairé par la lueur des étoiles et de la lune était maintenant assombri par les nuages noirs qui semblaient s’abattre sur la cité royale.
Les rues de Tir Asleen étaient plongées dans le chaos, les maisons brûlaient et les cris de désespoir emplissaient l’air. Les habitants cherchaient désespérément à fuir cette violence qui s’abattait sur leur ancien havre de paix.
Les combats étaient acharnés, les créatures monstrueuses, semblaient innombrables, une force déchaînée qui ne connaissait ni la fatigue ni la pitié. Chaque coin de la cité, longuement fleuries, était le théâtre d’une bataille sanglante, témoin du sang versé.
Au fur et à mesure des attaques, l’espoir semblait vaciller. Pourtant les cœurs de ceux qui défendaient Tir Asleen, ne fléchissaient pas. Ils puisaient leur force dans leur amour pour leur royaume, leur famille et pour leur Reine.
Les flèches, fusaient dans les airs, se mélangeant aux flammes que crachaient les monstres surgis des enfers. La fureur de la guerre se déchaînait, les cris des démons, le fracas des armes résonnaient dans les airs.
Au centre de cet enfer, le roi Hastur se tenait aux côtés de ses chevaliers, il savait que l’issue de ce combat déterminerait son avenir. Il s’écria avec une telle violence que ses hommes tremblèrent.
— Trouvez l’Impératrice et amenez la moi !!!, je me charge de la Reine !!!
Ses gardes s’éparpillèrent à la recherche d'Elora.
Hastur était déterminé à obtenir le contrôle de Tir Asleen. Ses plans ayant échoués. Il ne devait pas faillir, il irait jusqu’au bout de ses ambitions. Il avait trop longtemps attendu cet instant.
Sous sa direction impitoyable, ses hommes fouillaient chaque rue, chaque recoin, semant la peur et des cadavres à chacun de leur passage.
Airk se rendit à la salle d’armes du palais, ses pensées s’entremêlant les unes, les autres, sa mère, sa sœur, son père, ainsi que ses émotions, la peur, le courage. Au milieu des armes étincelantes et des boucliers, se trouvait une armure royale que son père avait faite tout spécialement pour lui. Elle était magnifique. La cuirasse était ornée avec minutie des symboles de Tir Asleen. Des feuilles d’argent finement ciselées couraient le long des bords, représentant la croissance et la prospérité du royaume. Les épaulières étaient sculptée avec soin, imitant la forme des ailes d’un aigle, en hommage à la liberté. Des motifs en forme de rosaces ornaient le métal. Au centre de la poitrine, l’emblème en or de Tir Asleen, Le heaume argenté, représentait la tête d’un aigle avec une visière décorée de pierres précieuses comme pour symboliser le regard de l’oiseau royal.
Le jeune prince contempla l’amure avec émotion, se souvenant des dernières paroles de Madmartigan en ce lieu. Il n’était alors qu’un enfant, ignorant que ce serait l’ultime fois où il verrait son père. « Mon fils, cette armure, sera tienne. Mais tu ne devras la porter que lorsque tu t’en sentiras digne, quand tu seras prêt à prendre tes responsabilités de futur roi, protéger ton royaume et tes sujets. »
Le moment était venu pour Airk d’être le prince que tout le royaume attendait, de prouver sa valeur et de se battre pour sa famille, pour son héritage. Le doute s’immisça en lui. Est-ce que les chevaliers le suivront ? Avec détermination, il saisit l’armure et la revêtit. Elle s’ajustait parfaitement avec son corps. Longtemps oubliée, aujourd’hui elle devenait le symbole de son dévouement envers Tir Asleen. Il était prêt à se montrer digne de son titre et de son peuple.
Alors qu’il s’apprêta à affronter les dangers qui l’attendaient sur le champ de bataille, Airk ressentit un profond désir d’avoir son père à ses côtés, de le guider dans ses décisions. C’était comme si en revêtant cette armure, il se sentait connecté à Madmartigan et ressentait sa présence, son courage et sa force.
Il se lança dans la bataille, sentant le force mentale de son père l’envahir, le protéger et surmonter ses peurs. Déterminé à sauver sa mère, il se fraya un chemin à travers les démons. La lame tranchante de son épée forgée dans un acier d’une qualité exceptionnelle, scintillait à la lueur des flammes démoniaques. Chaque coup que le jeune prince portait, démontrait ses compétences et son agilité de guerrier. Airk combattait avec ferveur. Il esquivait les attaques démoniaques, se faufilant entre les rangs des ennemis.
Les soldats de la Pacalcade se figèrent un instant, n’ayant jamais vu cette armure, et ignorant qui se cachait dessous. L’un d’eux ayant entendu la voix du prince appelant à le rejoindre pour sauver la Reine, rapidement la nouvelle se répandit sur le champ de bataille.
« C’est le Prince !!!! Le Prince est avec nous !!!! »
Soudain, ce à quoi Airk ne se serait jamais attendu, les chevaliers se rallièrent à ses côtés, formant une force unie. Le jeune prince, entouré de ses défenseurs loyaux, au milieu des cris, des épées s’entrechoquant, se traçait un chemin jusqu’au palais.
Le petit groupe, Airk en tête, gravissait les escaliers, traversait les couloirs plongés dans l’obscurité. Après une lutte acharnée, ils atteignirent la salle du trône, où Sorsha se battait contre des démons aidées de ses gardes.
Sous l’emprise d’une puissante colère, le jeune prince, suivit de ses hommes, entamèrent un duel épique, l’acier contre les griffes de ces créatures. Finalement, ils réussirent à vaincre les sbires des ténèbres.
Airk s’approcha de sa mère prête à le combattre « Mère c’est moi c’est Airk !!! » Il souleva la visière de son heaume. Sorsha était affaiblie mais son visage, tout d’abord stupéfait, s’illumina à la vue de son fils.
— Mère nous devons partir !!!! Nous ne pouvons sauver Tir Asleen !
— Kit… où es ta sœur !!! demanda Sorsha, affolée.
— Elle n’est pas au royaume. Je… Je l’ai envoyée chez les Bone Reavers
Sorsha ne cacha pas son étonnement, mais se sentit rassurée de savoir sa fille saine et sauve.
— On en discutera plus tard. Il faut partir !!! s'exclama le jeune homme.
Juste au moment où ils s’apprêtaient à quitter les lieux, la grande porte s’ouvrit violemment, révélant Hastur, accompagné de ses gardes. Son regard furieux et fielleux se posa sur Sorsha.
La reine se redressa fièrement sans vaciller ni démontrer la moindre peur et faiblesse.
Le silence s’installa dans la salle, lourd, pesant, accablant. Tous attendaient. Tous se dévisageaient.
Sorsha faisait face à Hastur son ancien allié aujourd’hui ennemi œuvrant pour le Wyrm. La déception est la tristesse se mêlait sur son visage, alors qu’elle se tenait, l’épée à la main, prête à l’affronter. Le roi avançait d’un pas rassuré, ses yeux autrefois emplis d’amitié, fixés désormais la reine avec froideur et ambition. Elle s’en voulait terriblement de ne pas avoir prédit l’action de son ancien ami. De ne pas avoir préparé son domaine à cette éventualité. Elle qui était prête à forcer sa fille à un mariage arrangé avec le fils de ce traître pour unir leurs deux monarchies. La colère brûlait ses veines. Comment avait-elle pu être si aveugle ? Comment avait-elle pu accepter de sacrifier la liberté de sa fille pour cette alliance sordide ?
Le désir de s’emparer du trône de Tir Asleen avait corrompu l’esprit, autrefois noble du roi de Galladoorn.
— Ta soif de pouvoir te rend aveugle Zivian. Dire que j’étais prête à te donner ma fille. J’avais confiance en toi.
— Ce mariage n’avait que peu d’importance tout ce que je voulais, c’était un héritier. Dès que leur union aurait était consommée et l’enfant né, ta fille aurait eu un terrible accident qui lui aurait coûté la vie !!!
À l’entente de ces mots, Airk, ne put contenir sa rage et s’élança contre le roi en ordonnant à ses hommes de ne rien faire. Ce combat était entre lui et le roi. Hastur fit de même avec ses gardes.
La salle du trône devint alors le théâtre d’un duel entre Sorsha, Airk et Hastur.
Le jeune prince se battait avec fougue, ses mouvements guidés par la colère, la soif de venger sa sœur. Sorsha se battait avec grâce et agilité, montrant à Hastur qu’elle n’était pas uniquement une reine mais une combattante. La haine envers elle-même d’avoir était prête à envoyer sa fille à la mort, attisait son agressivité et ses mouvements.
Hastur faisait preuve d’une férocité sans égale, mais la détermination d'Airk et la force de Sorsha étaient supérieurs.
Mère et fils se battaient comme un seul cœur, une seule âme. Ce n’étaient plus deux souverains qui combattaient mais le symbole de la résistance contre la trahison et les ténèbres.
Malheureusement, Hastur réussit à blesser Airk, mais envahi par la hargne, ce dernier continua à se battre, ignorant la douleur.
Finalement, dans un dernier élan de violence, la reine et le prince, donnèrent un dernier coup qui fit trébucher le traître. Hastur à terre, le jeune homme sous l’emprise de la fureur et de la vengeance de leur dernier affrontement en ce lieu, était prêt à en finir, la lame de son épée contre la gorge du roi déchu. Mais Sorsha l’interrompit.
— Mon fils ! Ne sombrons pas dans la cruauté. Nous ne sommes pas comme lui.
Airk se détourna d'Hastur avec réticence mais il comprenait la sagesse des paroles de sa mère. Un violent bruit résonna soudainement, dans les couloirs du palais qui fit sursauter, la reine, son fils et les hommes présents dans la salle. Hastur arborait un sourire cynique. Un frisson d’appréhension parcourut la pièce alors que tous se demandaient ce qui se tramait. Tous se préparèrent à affronter cette nouvelle menace mais leur Reine donna l’ordre de partir.
À mesure qu’ils quittaient la salle du trône, Sorsha ne pouvait s’empêcher de se demander comment Hastur et les démons avaient pu franchir la barrière de Cherlindrea. Dans les couloirs, la réponse lui fit donnée, lorsqu'elle et son fils virent au loin les regards démoniaques de Graydon et d'Elora. Horriblement choqués par ce qu’ils voyaient. Graydon vivant, Elora tellement différente, ne pouvaient être les investigateurs de cette attaque.
Le cœur d'Airk se serra en voyant son ex-amante entièrement tournée vers les ténèbres. Ce ne pouvait être possible. Elora était tellement lumineuse, amour et espoir.
Il se murmura à lui-même avec tristesse « Elora… Comment... »
Il voulait courir vers elle mais sa mère l’en empêcha « Non, elle a choisi son chemin. »
Sorsha fut terriblement désemparée par cette Elora, perdue dans les ténèbres, cette enfant qu’elle avait tant protégée toutes ces années, au détriment de ses enfants et de son époux. Comment et où avait-elle failli dans son devoir ?
Le cœur brisé, Airk lança un dernier regard vers l’Impératrice avant de détourner les yeux.
La trahison était partout et la menace bien plus grande qu’ils ne l’avaient imaginée.
En partant, Sorsha donna l’ordre aux soldats d’évacuer les lieux en emmenant les habitants avec eux.
La reine et son fils quittèrent le royaume accompagnés de leurs sujets. Ils devaient désormais trouver un endroit où se réfugier et soigner le jeune prince.
Ils se retournèrent une dernière fois, et virent Tir Asleen sombrer dans les ténèbres.
— Nous reprendrons notre royaume mon fils. Nous sauverons notre monde.
— Comment mère. Elora n’est… sa voix se brisa.
Tous deux savait qu’ils devraient rassembler leurs forces et trouver des alliés dignes de confiance. Le mal s’était déjà répandu sur Andowyne.
Sorsha murmura, pensant à son ami, inquiète « Où es-tu Willow ? »
Part 11
Rédemption Au Cœur des Ténèbres
Vidée de sa clientèle, la taverne Chop-Chop, semblait paisible. Les tables, autrefois occupées par les clients animés, étaient désormais nettoyées avec soin.
Boorman aidait sa mère. Ces gestes familiers, qu’ils avaient maintes fois exécutés. Son balai glissait silencieusement sur le sol, ramassant les dernières miettes et la poussière restantes. Il jetait de temps en temps des coups d’œil à Elianor qui était l’âme et le cœur de cette taverne. Vêtue d’un tablier usé, elle s’attaquait aux tables. Avoir son fils à ses côtés, la ravivait de joie. Toutes ces années à gérer seule cet endroit. Chaque coin de ce lieu avait gravé les souvenirs de leur histoire.
Il l’observait tendrement, son visage trahissant sa vieillesse et sa fatigue, les traits tirés par le poids des années. Ses gestes autrefois agiles, se mouvaient lentement mais toujours avec cette même détermination.
Boorman sentait un pincement dans son cœur en voyant la façon dont elle avait vieillie, mais il éprouvait aussi une profonde gratitude pour cette femme qui avait supporté ses comportements difficiles.
Il s’approcha d’elle et lui prit les mains tendrement.
— Repose-toi. Je m’occupe de tout.
Elianor leva les yeux vers son fils, rencontrant son regard chargé d’amour. Chaque mouvement qu’il faisait semblait être une tentative de racheter ses erreurs du passé.
La taverne Chop-Chop était leur refuge, leur sanctuaire.
Les souvenirs douloureux hantaient toujours Boorman. Ces ombres du passé qui refusaient de s’évanouir. Les blessures, causées par les actes de ce père, qui les avait abandonnés et qui fit une réapparition dans leur vie, avaient laissé de profondes cicatrices. Il ne pouvait s’empêcher de se sentir responsable du retour de cet homme toxique, trop axé sur son égoïsme à poursuivre ses propres intérêts.
Ce jour où cet homme fit son apparition, colérique et menaçant alors que la taverne était submergée d'une ambiance chaleureuse.
Accablé par le poids de la culpabilité, Boorman ne pouvait plus laisser sa mère être victime une fois de plus. Les yeux brûlants de rage, il se dressa contre son père.
— Ça suffit !!!!
— Écarte-toi de mon chemin, sale morveux !!!
— Tu n’as plus aucun droit ici !!!! Dégage !!!
— Je suis ton père !!! Tu me dois le respect !!!
— Tu as perdu le respect le jour où tu nous as abandonnés !!!
Boorman se rappelait les larmes versées de sa mère en silence, en cachette. Il serra les poings, son visage submergé par la rage.
— Que comptes-tu faire !!! gronda son père.
— Te mettre dehors !
Le rire cynique de cet homme abject retentit, sa voix pleine de mépris et d’arrogance.
Une violente confrontation éclata entre les deux hommes. Malgré la carrure imposante de son père et lui frêle et maigrichon, Boorman puisa une force inattendue en lui. La volonté brûlait dans son regard, nullement intimidé, poussé par cette rage de protéger sa mère. Chaque coup porté était guidé par la colère, le remord. Chaque mot dur de cet homme odieux, alimentait la haine en lui. Le souvenir de ces instants où sa mère pleurait, endurant les conséquences de la violence de cet homme infâme, nourrissait en Boorman un courage qu’il n’avait jamais cru pouvoir posséder. Il contrait les attaques, déstabilisait son adversaire. Finalement, après un échange de coups épuisants, il vainquit son père et le jeta hors de la taverne.
— T’avoir observé et détesté chaque jour m’a appris à me battre et devenir plus fort pour enfin savourer cet instant. Écoute-moi bien, parce que je ne le répéterai pas !! Ne reviens plus jamais en ce lieu !! Si je te revois, crois-moi, je n’hésiterai pas à te tuer !!!
Les mots sortirent avec force et violence, chacun d’entre eux portait le poids des années de colère et de souffrance mêlé à une satisfaction de l’avoir mis à terre.
Le souvenir était affligeant, Elianor s’approcha de son fils et lui prit les mains avec tendresse.
— Mon fils, je sais à quoi tu penses. Tout cela appartient au passé.
Il lui offrit un sourire affectueux mais chargé de regrets et de remords. Soudainement, son regard se figea lorsque ses yeux se tournèrent vers la fenêtre.
— Qu’est-ce que…
Il s’en approcha, rejoint par Elianor. Une brume, menaçante, au loin, obscurcissait l’horizon.
— Que se passe-t-il, mon fils.
Boorman se tourna vers sa mère, inquiet
— C’est… en direction de Tir Asleen. La dernière fois que j’ai vu cette étendue ténébreuse, engloutir le royaume, Tir Asleen fut attaqué par les Gales, il serra les poings, le regard anxieux et déchirant. Mère, je dois…
— Mon fils, tu m’as protégée de tant de façons. Aujourd’hui ce sont eux qui ont besoin de ta protection.
— Je ne laisserai pas les ténèbres détruire tout ce que nous aimons.
Il prit les mains de sa mère dans les siennes pour un « au revoir » et partit en direction de Tir Asleen.
*******
La marche semblait interminable, chaque effort fourni devait surmonter, la fatigue, la souffrance et cette défaite qui pesait sur chacun.
Sorsha se déplaçait, silencieuse, la vision accablante de Dark Elora qui l’anéantissait émotionnellement. À ses côtés, fatigué, Airk essayait d’oublier la douleur que sa blessure lui apportait à chacun de ses pas, plus préoccupé pour sa mère, sa sœur et désormais Elora. Il s’interdisait de sombrer. Les chevaliers et les habitants les suivaient de près, les visages fermés. Chacun portait les stigmates de la bataille, de tout ce qu’ils venaient de perdre. Leurs foyers, leur royaume réduit en cendres et envahi par les ténèbres.
Soudain, sous le poids de la douleur, le jeune prince chancela. Son visage crispé, sa respiration saccadée. Deux chevaliers se précipitèrent pour l’aider et le soutenir.
Sorsha se précipita vers son fils.
— Apportez-moi de quoi faire des bandages !!! Vite !!!
Les personnes présentes s’activèrent afin d’apporter le nécessaire à leur reine pour soigner le prince.
— Ça va aller Airk, respire doucement.
Le jeune homme grimaçait de douleur.
— Tu t’es enfin décidé à porter l’armure que ton père a créée pour toi.
— J’espère juste en être digne.
Sorsha caressa tendrement la joue de son fils
— Mon fils, cette armure est le symbole de ta force, de ton courage et de ton héritage. À travers toi, ton père est avec nous. Les hommes n’hésiteront pas à te suivre. Ton père serait fier de toi, tout comme je le suis.
Les paroles de Sorsha touchèrent profondément le jeune homme. Jamais il n’aurait imaginé qu’elle puisse être fière de lui. Après tout, il avait toujours eu ce comportement d’insouciance, à passer son temps à courir après les filles et ne pas prendre au sérieux son rôle de prince. Mais peut-être que le fait d’avoir eu le courage de revêtir cette armure et de défendre son royaume, démontrèrent une facette de lui-même qu’il n’avait jamais explorée et suscitèrent la fierté de sa mère.
Pour la première fois dans sa vie, Airk voyait toute la tristesse cachée dans les yeux de Sorsha. Il comprit à cet instant précis que derrière chaque regard, chaque action, chaque choix, chaque erreur, se cachait une femme qui avait enduré bien des épreuves, bien des sacrifices pour protéger tous ceux qu’elle aimait.
Une vague de compassion et de reconnaissance l’envahit.
— Tous ceux que j’ai essayé de protéger, tout est détruit désormais, s’exprima la reine, la voix brisée.
Airk posa sa main sur celle de sa mère ;
— Je sais à quel point c’est difficile mais nous n’avons pas le droit d’abandonner.
Et pour la première fois il vit des larmes couler sur les joues de sa mère.
— J’ai… J’ai tout sacrifié, ta sœur, toi… Par ma faute, vous avez grandi sans votre père. Et… Elora, comment est-ce possible ? Où ai-je commis une erreur ? Son regard était... si sombre. Nous l’avons perdue mon fils. Si cela venait à se savoir, ce serait la fin de tout espoir, elle s’exprimait avec une telle tristesse.
— Nous allons la sauver mère. Nous trouverons un moyen de la ramener.
Peut-être que son plan de retourner à Nockmaar, récupérer la Malatrium pourrait non seulement sauver Kit mais également Elora.
— Cela me semble tellement impossible. Elle seule pouvait nous sauver des ténèbres mais elle les a rejoints.
— Nous y arriverons. Nous ne serons pas seuls. Nous trouverons des alliés. L’union sera notre force.
— Puisses-tu avoir raison. En attendant, nous devons trouver un abri pour tous ces gens. Tu dois te reposer. Nous devons tous nous reposer.
Tous deux se regardèrent, ayant la même pensée.
— Mère, si nous prenons la direction des Wildwoods, Scorpia te tuera dès qu’elle te verra.
— C’est le seul endroit sûr et je suis prête à prendre ce risque. Et puis, nous avons Jade, et ta sœur est là-bas.
Airk acquiesça d’un signe de la tête.
*******
Arrivés à la lisière de Tir Asleen, Wilow, Mims et Elora, s’arrêtèrent brusquement.
Une brume étrange enveloppait le royaume d’un voile mystérieux et menaçant, le plongeant dans l’obscurité. La végétation déformée, les arbres autrefois majestueux se dressaient désormais comme des sentinelles décharnées, leurs branches biscornues évoquant des doigts crochus prêts à les attraper au moindre mouvement. Des murmures inquiétants résonnaient dans l’air, créant un mélange de voix étouffées et de rires démoniaques, rendant l’atmosphère oppressante.
La vision de Tir Asleen dévasté, pesait lourdement dans le cœur de Willow, Mims et Elora. Un frisson leur parcourut l’échine.
Elora regarda autour d’elle, inquiète : « Que s’est-il passé ? »
Willow fronça les sourcils et scruta les alentours. Son cœur se serra, craignant que l’ennemi se fut emparé du royaume « Cette brume… Nous arrivons trop tard. »
Mais Mims ne se laissa pas emporter par le désespoir : « Nous devons entrer. Sorsha, la princesse, le prince sont peut-être encore là et ont besoin de nous. »
Willow regarda sa fille avec une lueur d’angoisse dans ses yeux : « Mims, c’est trop dangereux. Nous ne savons pas ce qui nous attend à l’intérieur. Nous ne savons pas s’ils sont encore... » Il n’eut pas le courage de terminer sa phrase.
Elora posa sur Willow un regard empreint de réconfort afin de le rassurer : « Mims a raison. À l’intérieur de ces murs, se trouvent mon foyer, ma... famille. Nous devons tout faire pour les retrouver et les sauver. »
Willow prit une profonde inspiration, son regard se tournant vers un Tir Asleen ravagé qui s’étendait devant eux. « Très bien. Allons-y, mais restons prudents. Nous ignorons ce que nous allons découvrir derrière ces murs. »
Ils s’avancèrent lentement et prudemment, leurs visages cachés par la capuche de leur tunique. Lorsqu’ils pénétrèrent à l’intérieur de la cité, une scène d’horreur se dévoila.
Le palais royal n’était plus que l’ombre de sa splendeur passée. Les étendards flottaient en lambeau. Les murs du château étaient maculés de sang et ébréchés, gravés des symboles du Wyrm.
Alors qu’ils avançaient entre les décombres et les corps mutilés, le vent semblait contenir les échos des lamentations des victimes de ce carnage. Les bâtiments autrefois majestueux, réduits à des carcasses défigurées, dévorées par les flammes.
Les traces d’une bataille omniprésente, des éclats d’armes brisées sur le sol. Des ombres furtives en mouvements évoquaient une présence malveillante.
Ils étaient horrifiés et apeurés. L’odeur de chair brûlée et de putréfaction leur donnait la nausée. Ils se recouvrirent la bouche et le nez de leur bandana.
En voyant toute l’horreur, Elora se murmura à elle-même, la voix brisée : « Il mettra le monde à feu et à sang. Tous ceux que tu aimes mourront. »
Willow et Mims lui jetèrent un regard d’incompréhension.
— Tout est ma faute. Si j’avais accepté de me soumettre au Wyrm, Tir Asleen, Sorsha, Kit, Jade, Graydon, tout cela aurait pu être évité. » murmura-t-elle, d’une voix submergée par la douleur.
— Elora, tu ne peux pas te blâmer pour ce qui s’est passé. Nous serions tous sous l’emprise du Wyrm, nos âmes corrompues. Nous aurions perdu toute notre humanité. Tu as fait ce qui était juste, rétorqua Willow.
Mims lui prit la main avec tendresse : « Nous ne pouvons laisser la culpabilité nous accabler. Nous devons nous battre pour restaurer l’espoir et la lumière dans notre royaume. Au milieu de ces ténèbres, tu es notre lueur d’espoir, Elora. »
La jeune Impératrice inspira profondément et lui rendit un sourire timide.
À chacun de leurs pas, le brouillard s’épaississait et le silence devenait étouffant.
Soudain, une brume d’une intense noirceur, commença à s’élever du sol. Les ombres qui en résultaient, semblaient presque vivantes.
Wllow ne put cacher sa peur grandissante : « Restons unis et vigilants. »
— J’entends quelque chose, des murmures à peine audibles, souffla Mims.
Des silhouettes, indescriptibles, comme des spectres, émergèrent de cette brume.
Effrayée, Mims s’apprêta à sortir son glaive, prête à combattre.
Une ombre, difforme, ténébreuse, menaçante, se dressa devant eux. Brusquement, elle poussa un cri perçant et effrayant avant que d’autres ombres les encerclèrent peu à peu, devenant des liens sombres qui les retenaient. Les enserrant de plus en plus fort et les immobilisant complètement.
Willow s’écria : « Elora utilise ta magie !!!! »
Mais la jeune Impératrice se retrouva une fois de plus envahie par le doute malgré tous les entraînements qu’elle avait suivis.
Mims essaya de la rassurer : « Elora, ne doute pas ni de tes pouvoirs, ni de celle que tu es. Je crois en toi. Tu es plus forte que tu ne le penses. »
La jeune femme tourna son regard vers son amie. « Et si je ne pouvais maîtriser toute cette magie. Et si je n’étais pas Celle que vous attendez tous que je sois ! »
Willow essaya de l’encourager : « La magie ne se limite pas à des formules. Elle vient du cœur. Oublie tes doutes. Tu veux sauver Tir Asleen, ta famille !!! Alors concentre toi sur tes émotions, tes peurs, ta colère. Elles font parties de toi. Laisse-les te guider vers la magie. »
Elle fixa le royaume dévasté, pensa à sa famille, leur souffrance, leur détresse. La colère commença à s’emparer d’elle, alimentée par le désir de sauver ceux qu’elle aimait. Sa magie se réveilla et s’intensifia. Une lueur orangée enveloppa tout son être, presque brûlante. Les chaînes qui les retenaient prisonniers se brisèrent et les démons se disloquèrent.
Libérés, tous échangèrent des regards chargés d’émotions. Celui de Willow était empreint de gratitude et traduisait toute la confiance et l’espoir qu’il avait placé en elle.
Elora comprit à cet instant, que pour maîtriser sa magie elle devait puiser dans ses émotions profondes.
Après avoir bravé les démons, ils arrivèrent enfin dans la salle du trône mais ce qu’ils découvrirent les anéantit. Leurs cœurs se serrèrent douloureusement. Les yeux d'Elora se remplirent d’une profonde tristesse.
La jeune Impératrice s’exprima d’une voix tremblante : « Graydon… »
Elle se leva pour le rejoindre, le cœur déchiré mais Willow et Mims la retinrent.
— Elora non… Ce n’est plus Graydon, clama Willow.
Elle insista, attristée : « Je dois l’aider. »
Mims essaya de la raisonner à ne pas agir impulsivement. « Elora, nous devons comprendre ce qui se passe. Pour l’instant nous devons restés cachés. »
La jeune Impératrice acquiesça même si cela lui semblait difficile.
Willow fixa son regard vers cette silhouette mystérieuse, restée dans l’obscurité près du jeune prince de Galladoorn. « Ils ne sont pas seuls. Cette ombre… »
Tout d’un coup, un hurlement strident déchira l’air derrière eux, glaçant leur sang. Un démon surgit de l’ombre, ses yeux flamboyants. Graydon et Hastur, attirés par le tumulte tournèrent leurs regards vers le groupe.
Graydon afficha un sourire cruel : « Tiens, regardez qui vient à nous. »
Les trois amis se retrouvaient désormais face à face avec l’ennemi, sans échappatoire possible.
*******
Kit acheva sa longue route solitaire, portant le fardeau de l'abandon de Jade et de la confusion liée au comportement de son frère. Son esprit était encombré de douleurs profondes alors qu'elle pénétrait chez les Bone Reavers, son corps épuisé par les péripéties du voyage. Cependant, lorsque Lori, la stoppa, pensant l'avoir maîtrisée, dans sa vulnérabilité, la jeune princesse puisa en elle une force inopinée pour se défendre.
— Lâche-moi !!!
Le combat qui s'ensuivit. Malgré sa fatigue écrasante, Kit se battait, bloquant chaque coup porté par son adversaire, esquivant avec précision chaque attaque. Le regard déterminé dans les yeux de la jeune princesse, démontrait sa volonté de se battre jusqu’au bout, sans céder.
Au moment où la confrontation devenait plus intense, Scorpia arriva. Une tension électrique imprégna l’air.
Elle s’exprima froidement : « Tiens donc, notre princesse, tumultueuse, arrogante et impulsive !!! »
Kit la défia du regard, les yeux brûlants de colère mais aussi de douleur. « Tu ne m’impressionnes pas. Il me reste encore de la force pour t’affronter ! » Ses paroles étaient empreintes d’une volonté à ne pas reculer face à l’adversité.
Les deux femmes se fixaient, mélange de défi et de méfiance. Chacune était prête à se mesurer à l’autre.
Puis, au milieu de ce défi visuel, une voix familière s’éleva. « Ça suffit !!! »
Le silence s’installa. Kit tourna son attention vers Jade. Alors que les deux amantes se fixaient, leurs regards reflétaient une multitude d’émotions. Leur amour qu’elles avaient partagé était toujours présent mais le doute, la colère et la blessure avaient envahi la jeune princesse. Elle ne reconnaissait plus Jade, ce n’était plus la personne qui l’avait laissée après leur nuit d’amour, transformée par les choix difficiles qu’elle dû faire. Une complexité de sentiments submergea la jeune femme. Elle serra aussi fort qu’elle le put le collier dans sa main ensanglantée.
Part 12
Entre Lumière et Ténèbres
La pièce était plongée dans une obscurité suffocante, une noirceur qui semblait s’épaissir autour d’eux, oppressant leur poitrine et étouffant leur souffle. De faibles rayons lunaires parvenaient à percer les vitraux, créant des ombres et accentuant le regard maléfique de Graydon.
Le jeune prince trônait aux côtés de son père, son sourire satanique renforçait l’aura menaçante qui imprégnait cet endroit.
Face à eux, Elora, se tenait droite, meurtrie. Les battements de son cœur résonnaient dans ce silence écrasant. À ses côtés Mims, son glaive à la main, prête à combattre, tandis que Willow ne pouvait détourner son regard de cette ombre, proche du prince de Galladoorn.
Une angoisse profonde nouait l’estomac de la jeune Impératrice, alors qu’elle luttait pour maintenir un visage impassible. Ses mains tremblaient légèrement, elle s’avança tentant de raisonner son ancien ami.
— Graydon, tu peux résister à l’emprise des ténèbres, supplia-t-elle, des larmes refoulées menaçaient de briser sa voix.
Le jeune prince la fixait, ses yeux jadis doux et aimants, désormais, emplis d’une lueur maléfique. Il éclata de rire tonitruant.
— Résister ? Pourquoi le ferais-je ?
Mims s’approcha lentement, prenant la main d’Elora, la tirant légèrement en arrière.
— Il est trop tard. Il a fait son choix, murmura-t-elle. Ses yeux trahissant un mélange de peur et de responsabilité, résolue à protéger l’Impératrice.
Un silence pesant s’abattit sur le groupe. Les émotions étaient intenses entre le désespoir d’Elora et la cruauté du prince de Galladoorn.
La jeune Impératrice, craignant profondément que Mims n’ait raison, refusa d’abandonner
— Te souviens-tu m’avoir avoué ton amour.
Graydon rétorqua d’un ton glacial
— Un amour inexistant, je n’étais qu’un faible, bercé d’illusions.
— Graydon, je t’en prie, ne laisse pas le Wyrm te transformer. Mon plus grand regret, et de ne pas t’avoir empêché d’utiliser the Wand pour me protéger, la voix d'Elora était submergée de tristesse.
— Mon plus grand regret, c’est d’avoir empêché the Crone de te tuer. Mais je vais y remédier.
Les mots de Grayon résonnèrent comme un coup de poignard dans le cœur d’Elora. Son visage se crispa en entendant le nom de « The Crone », une expression de douleur mêlée à de la colère. Elle était déchirée entre l’être sensible qu’elle avait connu et l’être maléfique qu’il était devenu.
Pendant ce temps, le roi Hastur observait la scène, silencieux, avec un sourire satisfait. Impassible, il attendait un simple geste de son fils, ses yeux rivés sur Elora comme une menace suspendue.
Willow sentait le poids de la situation peser sur ses épaules. Il avait conscience qu’il ne pouvait laisser les ténèbres triompher. Sans hésiter, avec assurance, mais tout son être tremblant de l’intérieur, il s’adressa à Hastur
— Comment as-tu pu trahir Sorsha, Tir Asleen et la mémoire de Madmartigan !
Hastur tourna son regard lentement vers Willow
— J’ai tant attendu pour prendre le contrôle de Tir Asleen. Des lunes à devoir rester dans l’ombre de votre reine et son époux, alors que tout me destinait à être le souverain de ces deux royaumes. Mais Madmartigan en a décidé autrement !!!! Le plus insupportable, fut la naissance de ses deux rejetons qui m’ont condamné à n’être que le simple roi de Galladoorn !!! Les ténèbres offrent le véritable pouvoir, ce pouvoir que tu n’as jamais voulu saisir. Tu aurais pu être le plus grand des sorciers Willow mais tu t’es contenté d’être faible, en restant dans l’ombre de Sorsha.
Willow ne se laissa pas déstabiliser par les propos de Zivian.
— Le vrai pouvoir réside dans la lumière, l’amour et la compassion. Pas dans la tyrannie et la destruction !
Hastur laissa éclater un rire glacial
— Tu es bien naïf. Vous avez tous cru en cet espoir que vous avez placé en votre Elora Danan. Tant de sacrifices pour la protéger ! Regarde-la !!! Impuissante. Où sont donc tes pouvoirs jeune Impératrice !! Que vas-tu faire pour sauver tes amis et ton royaume !!!!
Soudain, l’air vibra, des ombres surgirent du néant, prenant la forme de démons derrière le petit groupe d’amis. Face à cette menace, Elora leva son regard, fixa Hastur dans les yeux et s’exprima d’une voix ferme.
— Ce que je vais faire ! Me battre quoi qu’il m’en coûte. Je ne suis pas seule. Nous sommes unis par l’amour et la lumière qui triompheront sur les ténèbres !
Le groupe se préparait à la confrontation. Mims ajustait la prise sur son glaive, déterminée. Willow, sentait qu’une menace bien plus sinistre que celle incarnée par Graydon ou Hastur planait en ce lieu lugubre.
Le jeune prince de Galladoorn laissa échapper un rire sarcastique qui résonna dans la salle
— Où es ton armée Elora !!! il écarta les bras, présentant les ombres démoniaques qui étaient prêtes à lui obéir. Regarde autour de toi, je n’ai qu’un mot à dire, et tous agiront dans l’unique but de te détruire.
Malgré la menace, la jeune Impératrice ne fléchit pas
— Est-ce vraiment ce que tu désires !!! Tu n’as pas hésité à te sacrifier par amour pour moi !
— Ça suffit !!!!
Furieux, il lança un éclair rouge sang qui frappa Elora en pleine poitrine, la projetant au sol. Mims accourut vers elle afin de la protéger, tandis que Willow s’agenouilla auprès de la jeune Impératrice, prenant doucement son visage entre ses mains. Il chuchota, inquiet : « Elora ? »
La jeune femme lui adressa un faible hochement de tête pour le rassurer. Consumé par la colère, il se tourna vers Graydon.
— Tu es voué à devenir un grand sorcier, pas une créature maléfique !
Willow se pencha vers Mims « Nous devons la protéger à n’importe quel prix. » murmura-t-il
— Je suis prête à me battre jusqu’au bout, popa.
Sentant le poids des circonstances, il baissa légèrement la tête, « Mims, je suis désolé de t’avoir entraînée dans cette histoire. »
— l’ai fait le choix de venir, lui répondit-elle.
Elora se releva et s'écria « Non, plus personne ne se battra pour moi ! Plus personne ne mourra pour moi ! » Elle laissa toute sa fureur s’exprimer au travers d’un hurlement et projeta un éclair éblouissant qui envoya Graydon à terre contre le siège du trône. Elle regretta immédiatement son geste, mais elle savait au fond d’elle-même qu’elle n’avait pas d’autre option.
La salle du trône sombra dans un silence absolu. Alors que Graydon reprenait ses esprits, rempli de colère. Elora était prête à le combattre bien que son cœur se serrait. Tout d'un coup, un cri strident perça l’air. Un démon se précipita en direction de la jeune Impératrice. Mims, se plaça instinctivement entre la créature et son amie et s’engagea dans un combat cruel. Dans cette lutte impitoyable, la jeune Nelwyn fut projetée violemment à terre, son glaive glissant hors de sa portée.
Malgré ses peurs, Willow ramassa le glaive et se précipita vers sa fille « Mims !!! Non !!!! »
La jeune Nelwyn lança un regard désespéré vers son père et s’exprima dans un murmure presque inaudible, le souffle coupé « Utilise ta magie. »
Mais les yeux de Willow reflétaient, le doute et l’incertitude sur ses capacités de grand sorcier.
Une lumière brillante commença à émaner d’Elora, de plus en plus intense, puisant dans ses sentiments de colère et de rage enfouis en elle. Fixant droit le démon qui s’en était pris à Mims. Elle le fit reculer, hurlant de douleur jusqu’à sa dislocation.
Le souffle court, elle se tourna vers Graydon et Hastur. Un sourire énigmatique « Doutez-vous toujours de ma puissance ? » Ses paroles résonnaient comme un défi.
Mims et Willow avaient rejoint Elora, tous se fixaient, inébranlables, prêts à agir au moindre mouvement. Une ombre se faufila derrière Graydon tel un tourbillon de ténèbres, émettant une aura dévorante. Cette même ombre que Willow avait perçue dès leur arrivée.
Il s’adressa à Elora : « Ressens-tu cela ? Cette présence, si sombre, si puissante. »
La jeune femme hocha la tête, préoccupée : « C’est comme si… Elle vibrait en moi. »
Au moment où elle prononça ces derniers mots, l’ombre se manifesta et s’exprima d’une voix sinistre : « C’est tout simplement parce que toute cette puissance est en toi jeune Impératrice. »
L’ombre s’avança lentement, dévoilant progressivement sa véritable forme. La révélation de son essence véritable, plongea Elora, Mims et Willow dans un abîme de désespoir et de frayeur, anéantissant toute étincelle d'espoir.
Elora ne put que murmurer : « Ce n’est pas possible. »
Mims, les yeux écarquillés, échangea un bref regard avec son père.
La voix tremblante, Willow s’exprima à lui-même : « Ce que je redoutais le plus. »
— Non, Popa, ce ne peut être... Elora.
Les deux Elora se fixaient mutuellement. La jeune impératrice semblait désemparée, incapable d’accepter l’apparence qui se dressait devant elle. Dark Elora la scrutait avec un sourire narquois et un regard glacial, empreint de noirceur et de froideur.
— Non… Tu ne peux être… s’exclama l’Impératrice.
— Toi ! la coupa son double maléfique.
Dark Elora se jeta violemment sur l’Impératrice, saisissant sa gorge, l’étouffant et la projetant au sol. Une bataille, d’une terrifiante intensité, s’engagea entre elles deux.
— Dis-moi, comment vas-tu combattre la part sombre de toi-même ?
Elora luttait pour reprendre son souffle. Elle puisait dans sa magie, évoquant l’énergie de lumière qui vibrait en elle depuis toujours.
— Avec l’amour et l’espoir bien plus puissants que la haine et l’affliction que tu incarnes.
Les ténèbres qui l’entouraient, vacillaient. Un éclat de lumière, émanant d’elle brilla d’une intensité aveuglante.
Dark Elora, repoussée par la lumière, roula sur le sol pour se relever rapidement. Son regard démoniaque, empli de fureur.
— L’amour et l’espoir ne peuvent rien contre la puissance des ténèbres.
La jeune Impératrice, debout, créa une barrière lumineuse autour d’elle afin de se protéger des attaques de son double.
Mais cela s’avéra insuffisant. Dark Elora chargea, déclenchant un affrontement féroce. Le combat entre les deux Elora devenait de plus en plus brutal. La salle du trône, témoin de cette bataille épique, tremblait sous l’intensité des pouvoirs en conflits. Leurs mouvements, rapides et mortels, créaient des étincelles incandescentes qui zébraient l’air.
Elora se battait pour son âme et le destin du royaume mais sous la puissance maléfique, elle s’effondra. Ses forces l’abandonnaient, la douleur des éclairs de Dark Elora lui était insoutenable. Elle sentait sa résistance faiblir.
— Je suis ce que tu pourrais devenir, si tu laissais, la colère, la peur et le pouvoir te dominer. Cette obscurité en toi que tu as longtemps réprimée. Où est donc ta protectrice ? puis, Dark Elora s’adressa à Hastur et Graydon. Qu’on en finisse !! Tuez-les !!!
Graydon foudroya Willow, le propulsant à terre, ne pouvant lutter contre la toute-puissance du prince de Galladoorn. Mims se sentit déchirée entre son devoir envers l’Impératrice et son amour pour son père. Le voir, à terre, impuissant, alimentait son angoisse. Les paroles de Willow résonnèrent « Sauve Elora !! » Mais elle se retrouva face au roi Hastur qui l’empêcha d’agir. Le combat fut inévitable. Le regard de Mims ne pouvait s’empêcher de se tourner vers Elora qui luttait contre son double diabolique et son père en danger.
Graydon se montrait impitoyable envers Willow, le maintenant à terre, déterminé à l’achever.
— Où est ta prétendue puissance sorcier, toi, qui a trompé le monde avec ton récit de victoire sur Bavmorda !!! Montre-moi de quoi tu es vraiment capable !!!
Anéanti et se sentant mourir, Willow eut soudainement une vision ; Kaiya, si réelle, si proche qu’il semblait presque pouvoir la toucher. Ses mots d’encouragement résonnèrent dans son esprit « Mon cher et tendre, j’ai toujours cru en toi, en tes capacités, à aucun moment le doute n’est venu ébranler cette confiance que je te porte. Protège-la comme tu l’as toujours fait depuis sa naissance. Relève-toi mon époux, bas-toi. » Instinctivement, Willow glissa sa main dans sa poche, resserrant ses doigts sur la mèche de cheveux de sa femme, le souvenir de sa culpabilité constante d’avoir abandonné sa défunte épouse.
Alors que tout semblait perdu, l’espoir surgit. Accompagné d’une poignée de chevaliers de la Shining Legion, refusant de s’allier à Hastur, Boorman contra brutalement Zivian sur le point de transpercer Mims à terre. D’un geste puissant, il le projeta en arrière
— Il semblerait que je n’ai pas été invité à la fête, ironisa-t-il.
Mims se releva, des démons firent leur apparition de tous côtés.
Au même instant, Graydon et Dark Elora furent pris au dépourvu. Une guerrière à l’aura infernale, déploya ses pouvoirs sombres d’une puissance inimaginable et projeta violemment le prince de Galladoorn. L’impact fut si brutal qu’il roula au sol, désorienté et incapable de se relever. Un éclair puissant et glacial, frappa Dark Elora, la propulsant hors de portée de la jeune Impératrice. Lorsqu’elle se releva, une silhouette familière se tenait devant elle, bien que son visage, restait caché sous sa tunique châtaigne :
— Il n’y a qu’un seul être capable d’attaquer avec une telle puissance, clama-t-elle.
Dark Elora restait immobile, face à son ancien assassin de confiance
— Aniel, tu ne pourras jamais échapper à celui que tu es réellement. Mon ancien fidèle compagnon.
— J’ai payé le prix fort de mes erreurs. Il est temps que tu paies pour les tiennes, sa voix était empreinte de gravité.
— Je suis bien plus puissante que jamais, depuis ta trahison.
Elle l’attaqua par traîtrise mais il esquiva le coup fatal.
Au même instant, le combat entre Boorman, Mims et les chevaliers de la Shining Legion contre les démons et Hastur faisait rage.
La guerrière rouge-sang tranchait les créatures de ses deux épées acérées. D’un geste fluide, elle s’accroupit et, sans même jeter un coup d’œil par-dessus son épaule, transperça un démon qui tentait de l’attaquer.
Aniel l’interpella
— Kida, sauve le sorcier !!
Elle se dirigea vers Willow, encerclé de créatures, d’un geste précis, elle les décapita une à une, puis lui tendit sa main et l’aida à se relever
— Viens avec moi, sorcier.
Aniel se précipita vers Elora et la prit dans ses bras
— Kida, nous devons quitter les lieux. La vie de l’Impératrice en dépend !!!
Pendant que les chevaliers tenaient les créatures démoniaques à distance et que Boorman combattait Hastur, Aniel, portant Elora dans ses bras, accompagné de Mims et Willow, se frayaient un chemin vers une porte dérobée.
Chacun maniait son arme pour repousser les démons qui les encerclaient. Kida gardait Graydon à distance, le maintenant sous contrôle avec sa puissance démoniaque.
Finalement, ils atteignirent le passage. Mais tous ne purent s’enfuir.
— Sauve-les Boorman. Nous allons les retenir ! déclara un des chevaliers.
Les chevaliers de la Shining Legion se sacrifièrent pour que le groupe d’amis puisse s’échapper. Boorman bloqua la porte avec une barre de métal. Ce fut le cœur lourd qu’il entendit le combat de l’autre côté, et les cris de ses anciens compagnons, sacrifiés pour préserver la vie de l’Impératrice.
Tous portaient en eux le lourd fardeau de ce sacrifice, en particulier Boorman. Il s’approcha de Willow :
— Heureux de te revoir mon ami, sa voix emplie d’émotions.
Willow lui répondit mais ses yeux trahissaient un mélange de soulagement et de tristesse
— Moi de même. Je pensais tous les chevaliers de Gallardoorn contre Tir Asleen.
— Je les ai croisés à l’entrée du royaume. Tous n’acceptent pas le massacre perpétré par Hastur, Boorman marqua une courte pause. Ils m’ont informé que Sorsha et Airk ont réussi à s’échapper.
Willow eut un moment de silence avant d’ajouter
— Et Kit ?
— Je l’ignore. Elle est insupportable mais j’ai fini par m’attacher à elle, la voix de Boorman se brisa.
Willow tourna son regard vers Elora
— Nous avons failli la perdre aujourd’hui. Sans l’intervention de… Sais-tu qui ils sont ?
Boorman haussa les épaules
— Pas le moins du monde. Vous ne vous connaissez pas tous, vous, les sorciers ?
Soudain les deux amis furent interrompus par Kida
— Hé, toi l’excentrique, occupe-toi de l’Impératrice !! aucune empathie ne vibrait dans le son de sa voix.
Boorman ricana légèrement
— Je crois que l’excentrique c’est moi, ajouta-t-il avant de prendre Elora afin de l’aider à se déplacer.
Willow s’approcha des deux inconnus, sceptique
— Qui êtes-vous ! Comment pouvons-nous vous faire confiance !!
Kida riposta d’un ton sec
— Nous vous avons sauvé la vie, sorcier, n’est-ce pas suffisant !
Mais Aniel la stoppa de la main
— Effectivement, tu ne peux nous faire confiance, mais tu le dois. Car nous sommes liés par un serment fait à un ami commun.
Kida et Aniel s’exprimaient avec une telle froideur dépourvue d'émotions qui suscitait la méfiance auprès du groupe d’amis.
Un court silence s’ensuivit jusqu’à ce que Willow réponde :
— Madmartigan.
— Nous devons mettre l’Impératrice en sécurité, pour qu’elle puisse récupérer ses forces, ordonna Aniel
— Je sais où nous pourrions aller, mais je ne garantis pas l’accueil, répondit Boorman.
Part 13
La Promesse Renouvelée
Kit se tenait devant Jade, son cœur déchiré entre la colère et la douleur. Serrant le bracelet dans sa main avec une telle intensité que cela accentuait la blessure et le déchirement qu’elle s’efforça d’ignorer. Leurs regards portaient les traces de leurs émotions passées. Le souvenir brûlant de leur nuit d’amour restait gravé dans l’esprit de la jeune princesse. Elle désirait prendre Jade dans ses bras, l’embrasser tendrement et partager de nouveau cet amour qui les avait unies, mais la souffrance de l’abandon la retenait. Elle voulait comprendre pourquoi elle avait fait ce choix, pourquoi l’avait-elle laissée ? Kit sentait l’amertume et la tristesse bouillonner en elle. Finalement, elle murmura, fatiguée :
— Jade, ton visage.
Elle se retourna brusquement, la rage dans ses yeux, face à Scorpia.
— Que lui as-tu fait !
— Rien. Elle a juste retrouvé sa véritable famille et pris conscience de qui elle est réellement, répondit fermement Scorpia.
Kit se sentait déconcertée, elle ne reconnaissait plus celle qu’elle aimait. La jeune chevalière ne portait plus les couleurs de Tir Asleen. Son visage était peinturé de motifs étranges. Ses yeux encadrés par d’intrigants losanges, la rendaient mystérieuse et fascinante. Chaque losange tracé avec finesse semblait être une fenêtre ouverte sur les recoins les plus profonds de son âme, son courage, sa souffrance, les épreuves qu’elle avait dû affronter et les choix difficiles qu’elle avait dû prendre. Un récit d’adversité, de bravoure et de sacrifices.
Alors que Kit restait silencieuse, luttant pour ne pas sombrer, la fatigue la submergea, elle chancela, mais avant qu’elle ne cédât, Jade la prit dans ses bras
— Je suis là, je te tiens, murmura-t-elle, tout en se dirigeant vers sa tente.
L’atmosphère était intense, mêlant tendresse et incertitude. Au moment où Jade s’approcha pour lui prodiguer des soins, Kit refusa, la douleur était encore trop vive. La jeune Bone Reaver percevait toute la détresse dans son regard, cette souffrance que son départ avait provoquée.
— Laisse-moi te soigner, s’exprima-t-elle tendrement.
— Comment peux-tu guérir une blessure que tu as causée. Tu m’as abandonnée après que toi et moi nous… Sais-tu ce que j’ai ressenti, lorsque je me suis réveillée sans toi à mes côtés ! La colère, mais le pire fut cette douleur qui m’a compressé le cœur, répondit la princesse, la voix brisée.
— Je n’ai jamais eu l’intention de te faire du mal. Je m’en veux terriblement. Ne pense pas que je sois partie le cœur léger.
— Je ne sais plus qui tu es. Tu portes leurs couleurs, tu leur ressembles tant.
— Le sang qui coule dans mes veines est celui du général Kael, mais ce que je ressens pour toi, depuis toujours, est ancré dans mon âme.
Jade prit doucement la main de Kit, qui finit par accepter son aide, sentant la peau douce et chaude contre sa paume. Leurs doigts se joignirent, déclenchant un frisson dans le corps de la jeune princesse.
En voyant la main ensanglantée, Jade ne put s’empêcher de ressentir de la culpabilité. Le collier, maculé de sang, au centre de la plaie, reflétait toute la souffrance de son amante
— Pourquoi t’es-tu infligé une telle douleur ?
— Pour ne pas oublier, répondit Kit d’une voix faible chargée d’émotions.
— Ça va faire mal, le ton de la jeune Bone Reaver se voulait rassurant et doux.
Kit hocha légèrement la tête, les yeux fixés sur le visage de sa dulcinée. La tension entre elles était pesante, mais subsisté également un désir de briser les barrières, de trouver un moyen de se retrouver.
Lorsqu'elle appliqua le désinfectant, une légère sensation de brûlure se fit sentir. Kit ferma brièvement les yeux pour contenir cette douleur, pendant que Jade l’observait attentivement. Elle savait que soigner cette blessure allait bien au-delà d’un simple bandage ; elle devait également apaiser la fracture émotionnelle qu’elle avait causée.
Après avoir prodigué les soins, elle prit le collier, le nettoya méticuleusement et le passa doucement autour du cou de la princesse.
Leurs respirations s’entremêlaient, l’espace entre leurs visages se réduisait lentement. Chaque millimètre rapprochait leurs lèvres. Cependant, avant qu’elles ne purent sceller cet instant par un baiser, Kit recula légèrement, incapable de se laisser aller complètement.
Jade avait bien conscience que les blessures du passé ne pouvaient être effacées d’un simple geste. Elle lui caressa tendrement la joue tout en murmurant :
— Je ne t’abandonnerai pas. Je serai là, à ton réveil, à tes côtés.
— Pourtant tu l’as fait. Tu as trahi notre serment, submergée de désir et de peur, Kit cherchait des signes de vérité dans le regard de sa compagne.
— Je n’ai jamais trahi notre serment, tout comme je ne briserai pas celui-ci. Je sais que nos chemins ont été tortueux, mais mon cœur et mon engagement envers toi sont sincères.
Juste au moment où Jade se leva, prête à quitter la pièce, le cœur lourd, elle sentit une main douce attraper la sienne, la retenant. Son regard se posa sur celui de la princesse, rempli d’une profonde intensité émotionnelle.
— Je ne peux nier ce que je ressens pour toi, Jade. Même si tu m’as brisé le cœur, je n’arrive pas à te détester, avant que la jeune chevalière n’ait pu réagir, Kit scella l’espace entre elles dans un baiser doux et intense.
Tout d’abord surprise, la jeune Bone Reaver se laissa transporter par cette passion et ce désir qui s’emparaient d’elle.
Après un moment suspendu dans le temps, leurs lèvres se séparèrent doucement, mais le contact physique persista. Leurs fronts se touchèrent, et les yeux de Jade plongèrent dans ceux de sa bien-aimée, reflétant intensément l’amour et la passion.
— Avançons ensemble, murmura Kit d’une voix incertaine.
Jade laissa échapper un sourire, sentant son cœur s’emballer sous un mélange de joie et de soulagement. Doucement, elle prit le visage de Kit entre ses mains avant de l’embrasser. Le contact de leurs lèvres embrasa chaque parcelle de leur corps.
Leurs mains se lièrent, explorant doucement chaque centimètre de peau, cherchant à se connaître à nouveau après cette douloureuse séparation. Les émotions trop longtemps retenues, furent libérées dans un acte d’amour profond et intime. Les vêtements tombèrent avec une délicatesse presque timide, révélant leurs corps nus à la lueur tamisée. Chaque geste était rempli de respect, cherchant à offrir autant de plaisir qu’à en recevoir. Lorsque les mains de Jade caressèrent sensuellement le corps de Kit, cette dernière laissa échapper ses premiers gémissements d’un délice que le contact de ses doigts provoquait sur sa peau. Elle répondit par des effleurements doux, explorant le corps de son amante avec une tendresse nouvelle. Dans un élan de passion et d’amour, elles s’abandonnèrent l’une à l’autre, trouvèrent un moyen de se rapprocher et de guérir ensemble.
Alors que la nuit se déroulait comme un voyage érotique avec des moments de douceurs et de passions, Kit détourna son regard à un moment donné, submergée par une multitude d’émotions contradictoires. Ne voulant pas laisser les ombres du passé ternir cet instant, Jade prit délicatement le visage de sa partenaire entre ses mains :
— Regarde-moi. Aie confiance en moi, en nous.
Elle plaça sa main dans celle de Kit, entrelaçant leurs doigts, renforçant ainsi leur serment. Chaque baiser était une promesse. Chaque murmure de plaisir qui s’échappait des lèvres de son amante était une mélodie envoûtante pour la jeune Bone Reaver, attentive à chaque réaction de sa partenaire. Explorant chaque parcelle de sa peau avec une tendresse qui reflétait son désir de la chérir.
Le lit devint leur sanctuaire où elles s’aimèrent avec intensité.
Comblée, Kit se blottit contre Jade, laissant son souffle se calmer peu à peu. Elle laissa ses doigts effleurer la douce peau de sa dulcinée. La quiétude de ce moment, semblait l’encourager à exprimer ce qu’elle ressentait tout en essayant de chasser ses angoisses. Dans un murmure à peine audible, elle laissa échapper les mots qui pesaient sur son cœur :
— Je t’aime.
Elle pensait que Jade s’était endormie. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres.
Alors qu’elle se sentait apaisée, enlacée dans les bras chaleureux de son amante, Kit fut soudainement submergée par une anxiété naissante. Ses muscles se crispèrent et sa respiration devint irrégulière. Des convulsions secouèrent son être tout entier.
Jade qui la serrait tout contre son cœur, sursauta, alertée par ses mouvements brusques. Elle prit doucement le visage de Kit entre ses mains afin de la rassurer et comprendre la source de sa détresse.
— Kit, réveille-toi mon amour. Regarde-moi, tout va bien. Je suis là avec toi. Respire doucement.
Bien que les tremblements de la jeune femme se calmaient, ses yeux trahissaient une certaine terreur.
— Elle… Elle m’appelle, dit-elle d’une voix remplie d’inquiétude.
Jade arqua un sourcil, confuse
— Qui t’appelle ?
La jeune princesse hésita un instant avant de répondre, cherchant du réconfort auprès de sa bien-aimée.
— Ma grand-mère. Je vois son visage, j’entends sa voix, c’est tellement réel. J’ai l’impression de perdre le contrôle de moi-même, comme si elle m’attirait vers les ténèbres, comme si elle m’attendait, elle marqua une courte pause et fixa sa compagne. Et si j’étais comme elle.
Jade lui caressa tendrement la joue, murmurant des paroles réconfortantes.
— Écoute-moi mon amour, tu n’es pas comme elle. Tu es bien plus forte que tu ne le penses. Ton cœur est pur, elle l’embrassa sur le front. Nous affronterons cette épreuve ensemble.
Les deux amantes se serrèrent l’une contre l’autre, conscientes que la bataille ne faisait que commencer. Jade resserra son étreinte, enveloppant Kit dans un geste protecteur. Cherchant à la préserver de la présence maléfique de Bavmorda qui hantait ses nuits, prête à affronter les ténèbres qui menaçaient d’emporter celle qu'elle aimait.
Part 14
Co-autrice : Elodie DragonMistic
Fragile Trêve
La blessure d’Airk empirait, son visage trahissait chaque frémissement de souffrance. Chacun de ses pas devenait une torture. La fatigue s’engouffrant dans toutes les fibres de son être s’ajoutait à cette affliction qui rongeait son corps meurtri. Malgré le soutien physique de deux chevaliers, rester debout devenait insurmontable. Les regards qu’il échangeait avec sa mère exprimaient son déchirement. Sorsha déterminée à rester forte, tentait de cacher ses inquiétudes. Mais chaque grimace de douleur de son fils l’affligée intérieurement. Elle remarqua le sang s’écoulant à travers le bandage, signalant que la plaie s’était rouverte. La situation devenait urgente. Mais malgré ce supplice, Airk faisait preuve de courage en avançant, silencieusement.
Sorsha lui prit la main, essayant de lui donner un réconfort fragile au milieu de cette agonie
— Nous ne sommes plus très loin, mon fils. Il faut que tu tiennes le coup, murmura-t-elle.
Le jeune prince répondit d’un sourire crispé.
— Ho, je n’ai pas l’intention de faiblir, mère.
*******
Pendant ce temps, Kit et Jade partageaient des moments tendres, apprenant lentement à reconstruire leur relation. Mais, malgré leurs efforts, la jeune Bone Reaver ressentait une culpabilité écrasante qui lui étreignait le cœur à chaque fois qu’elle croisait le regard de celle qu’elle aimait. Dans un élan de tendresse et de dévouement, elle enveloppa délicatement la main blessée de sa compagne, ses doigts s’enroulant doucement autour de la paume meurtrie. Elle pouvait encore ressentir la tension causée par la douleur. À travers ce geste, elle désirait effacer les blessures aussi bien visibles qu’invisibles et rétablir la confiance. Kit, sentant la chaleur rassurante de ce contact se laissa imprégner par cet apaisement et répondit par une légère pression de sa main, acceptant cette promesse silencieuse d’avancer ensemble.
Jade menait Kit à la rencontre des siens, essayant de lui dévoiler que derrière leurs apparences d’assassins, se cachaient des êtres cherchant à survivre et se libérer des chaînes de l’esclavage qu’ils avaient subi depuis tant d’années. Chaque visage que la jeune princesse croisait, portait les stigmates d’un long combat pour gagner leur liberté, des cicatrices gravées dans leur chair.
Kit réalisait à quel point elle avait été élevée dans un environnement doré mais surtout dans un monde de fausses vérités et de tromperies. Elle ressentait bien le poids de ce passé à chacun de ses pas, les regards méfiants et coléreux posés sur elle en raison de ce qu’elle représentait à leurs yeux.
Jade prit la parole avec assurance.
— Regarde-les Kit, ce ne sont que des personnes, utilisées, traquées, cherchant tout simplement à survivre et se libérer de toutes ces années d’oppression.
La jeune princesse remarquait sur chaque visage, la fatigue et la résilience. Jade poursuivit :
— Ce ne sont pas des assassins, mais juste des victimes d’un conflit entre deux royaumes.
Kit baissa les yeux un bref instant, avant de croiser ceux de Jade. Elle cherchait à aller au-delà des convictions semées en elle depuis son enfance.
— J’entends tes paroles Jade, mais ils ont servi la cause de Bavmorda.
— Pour une liberté promise qu’ils n’ont jamais obtenue, répondit Jade fermement. Elle posa ses mains sur les épaules de sa compagne. Tir Asleen n’est pas innocente dans cette guerre, enlevant leurs enfants pour en faire de loyaux soldats et faisant passer leurs familles pour des assassins. N’est-ce pas ce que Sorsha a fait de moi ?
Kit ressentait tout le poids de la culpabilité des agissements de sa famille envers les Bone Reavers.
La nuit avait enveloppé les Wildwoods de son voile nocturne. Jade s’approcha silencieusement de Kit. Elle la trouva assise près d’un feu, le regard perdu dans les flammes dansantes, ses pensées oscillaient entre la colère et la douleur. Elle s’exprima, sa voix lourde de tristesse et d’amertume.
— J’ai grandi dans un monde de privilèges et de mensonges. Finalement, nous ne sommes pas si différentes l’une de l’autre, Jade lui prit la main qu’elle resserra et poursuivit. Ma grand-mère, mes parents, sont à l’origine de tout cela.
— Nous ne sommes pas nos parents, tu n’as pas à porter ce lourd fardeau seule. Ensemble nous pouvons essayer de réconcilier nos deux peuples.
— Tu oublies une chose, Jade : Scorpia. Jamais elle n’acceptera. Ce différend entre nos deux peuples est trop enraciné et l’idée d’une réconciliation est impossible à envisager.
À ce moment précis, un bruit inquiétant jaillit des bois environnants, plongeant les deux jeunes femmes dans une angoisse. Des ombres insaisissables se mouvaient rapidement dans l’obscurité. Désarmées et incapables de faire face au danger imminent, elles échangèrent un regard inquiet, partageant leur crainte. Cependant, à mesure que ces silhouettes s’approchaient, la nuit révélait des visages familiers, laissant des expressions de surprise et d’interrogation chez les deux jeunes femmes. Mais lorsqu’elles reconnurent Sorsha, Airk, les chevaliers et les habitants de Tir Asleen, l’inquiétude céda sa place à l’apaisement.
Kit se précipita vers sa mère heureuse et soulagée de la savoir en vie mais également inquiète.
— Mère tu n’aurais pas dû. Si Scorpia te voit, l’angoisse étouffait sa voix.
Sorsha caressa tendrement la joue de sa fille l’observant avec un léger sourire.
— Pour toi, pour ton frère, aucun risque n’est trop grand, une lueur de fierté passa dans son regard, illustrant son amour pour ses enfants et son dévouement à les protéger.
Pendant ce temps, Jade s’occupait d’Airk, l’aidant à se maintenir debout.
Des pas lourds et des voix coléreuses se faisaient entendre au loin. Scorpia apparut, entourée de Lori et ses hommes. Son visage figé dans une expression de fureur en apercevant Sorsha.
— Quelle belle surprise ! cracha-t-elle avec mépris.
Sorsha, pensant plus à sauver son fils et les habitants de Tir Asleen que sa propre vie, tenta d’apaiser la situation.
— Scorpia, nous avons été attaqués par… mon fils est blessé, nous devons le soigner sans plus attendre. J’implore ta clémence. Nous cherchons un refuge pour les habitants de Tir Asleen. Fais ce que tu veux de moi, emprisonne-moi si tu le souhaites, je n’ai pas la force de me battre. Je viens de tout perdre. Mais je t’en prie accepte ma requête.
Malgré les supplications de Sorsha, Scorpia demeurait impitoyable.
— Emparez-vous d’elle !
Ses hommes se précipitèrent pour la capturer, mais Kit s’y opposa.
— Laissez-là ! recevant un coup à la mâchoire qui la fit trébucher.
La tension montait alors que la situation dégénérait en un affrontement à venir entre les deux clans. Les chevaliers prêts à défendre leur reine, se préparaient à affronter les Bone Reavers. Allongée au sol, Kit, lança un regard suppliant à Jade.
Souhaitant mettre un terme à ce conflit imminent, la jeune Bone Reaver s’écria violemment.
— Arrêtez ! Assez de haine et de violence ! Regardez-vous ! Est ce cela que vous voulez, semer encore plus de douleur, de morts ! Sorsha est venue vers nous pour protéger son peuple et soigner le prince, elle s’adressa à sa sœur. Que veux-tu ? Donner l’image d’une personne sans cœur et sanguinaire ? Ne crois-tu pas que nous avons assez soufferts de cette image ? Étant ta sœur, je dirige autant que toi notre peuple. Je vous ordonne de soigner le prince et de cesser tout conflit !
Tout le monde resta silencieux, attendant une réponse de Scorpia. Les deux sœurs se regardèrent, l’une sans pitié, l’autre suppliante.
— J’accède à ta requête, Sorsha. Le prince sera soigné et ton peuple protégé. Quant à toi, tu restes ma prisonnière ainsi que tes chevaliers. Enfermez-les dans la fosse !
Lorsque Jade s’approcha de Kit pour l’aider à se relever, cette dernière la repoussa.
Quelques instants plus tard, la jeune princesse s’approcha de la fosse où sa mère et les chevaliers étaient emprisonnés. Son cœur battait violemment, submergée de colère.
— Je vais te sortir de là, mère.
Sorsha prit tendrement la main de sa fille à travers les barreaux d’os.
— Ma fille, écoute-moi attentivement. Le danger est bien plus grand que je n’aurais pu l’anticiper. La trahison est tout autour de nous. Restés unis ton frère et toi, vous êtes tout ce qui me reste. Ne t’aventure pas sur des chemins que tu pourrais regretter.
— Parfois, pour sauver ce que nous aimons, nous sommes obligés d’accomplir des gestes regrettables, répondit la jeune princesse avec agressivité.
*******
En entrant dans la tente, Jade découvrit Kit en train de saisir son épée, se préparant à combattre. Inquiète elle l’interpela.
— Que fais-tu ?
Sans même la regarder, la jeune femme lui répondit d’une voix empreinte de colère.
— Je vais libérer ma mère.
La jeune Bone Reaver tenta de la raisonner mais en vain.
— Écoute-moi ! Je vais trouver une solution. Fais-moi confiance.
— Te faire confiance !!! Tu as laissé Scorpia emprisonner ma mère !!!
— Mais j’ai sauvé ton frère et ton peuple !
Un lourd silence s’installa, seulement rompu par la respiration haletante de Kit. Elle fixa son amante et baissa le ton de sa voix un court instant.
— Tu es devenue l’une des leurs.
Jade tendit la main pour la retenir mais cette dernière la repoussa fermement.
— Nous pouvons tout arranger, nous pouvons instaurer la paix entre nos deux peuples.
La jeune princesse la toisa, ses yeux brûlant d’une rage ardente et d’une douleur intense.
— La seule façon d’instaurer la paix est que je tue Scorpia.
Kit s’en alla, emportée par la fureur.
— Je ne peux pas te laisser faire, murmura Jade, sa voix empreinte de regrets.
*******
La jeune princesse hurlait rageusement le nom de Scorpia à travers les Wildwood, Son cri déchirait l’air, faisant frissonner chaque branche d’arbre.
— Scorpia !!!! Scorpia !!! Je t’attends !!!
— Je suis là.
Kit se retourna brusquement, son regard enflammé fixait la cheffe des Bone Reavers avec toute la haine qui coulait dans ses veines.
— Libère ma mère !
Scorpia se dressait face à la jeune femme, impitoyable, ne reflétant aucune peur devant la menace que représentait la princesse.
— Tu sais bien que je ne peux pas faire ça.
— Libère-là je te l’ordonne. Elle serra ses poings, essayant en vain de contenir cette rage qui embrasait chaque fibre de son être, la submergeant d’une puissance incontrôlable.
— Je n’ai aucun ordre à recevoir de toi, princesse. Sais-tu pourquoi tu es encore libre ? À cause de ta proximité avec ma petite sœur.
Kit resta silencieuse un laps de temps avant de s’exprimer d’une voix tranchante.
— Je te défie. Si je gagne, ma mère est libre
— Et si tu perds ?
— Je prends sa place.
— Apporte-moi mon épée, Lori, ordonna sèchement Scorpia.
Les deux jeunes femmes se faisaient face, la fureur bouillonnait dans les yeux de Kit, croisant la froideur de Scorpia qui la provoquait.
— Viens !!!
Dans un élan de colère, la jeune princesse s’élança, en s’écriant, l’arme au poing, mais son épée s’entrechoqua brutalement contre une lame. Surprise et bouleversée, elle découvrit Jade se tenant devant elle.
— Il s’agit de ma sœur Kit. Je ne peux pas te laisser faire.
Face à celle qu’elle aimait la jeune femme se figea, plongeant son regard enflammé de rage dans celui de son amante où brillait tout l’amour qu’elle ressentait pour elle. Dans cet échange visuel, une chaleur réconfortante, émanant de Jade semblait s’infiltrer dans l’âme tourmentée de Kit, apaisant peu à peu ce torrent de haine qui l’avait envahie. Quelques larmes commencèrent à couler le long des joues de la princesse, submergée par toute cette tendresse qui se reflétait dans les yeux de Jade. Elle baissa sa garde, épuisée.
— Je ne peux pas te combattre, et s’éloigna le cœur lourd de conflits intérieurs.
Scorpia s’approcha de Jade, son regard incisif.
— Tu sais que je ne peux pas la laisser en liberté après ce qu’elle vient de faire.
— Laisse-moi la gérer. Je dois parler à Sorsha.
Avant de partir, Jade se retourna vers sa sœur, le regard fermé, démontrant l’urgence de la situation.
— Ce qui nous menace est bien plus grand que ce conflit entre nos deux peuples. Toi seule peut maintenir cette trêve aussi mince soit-elle.
Part 15
Co-autrice : Elodie DragonMistic
Merveilleuses Retrouvailles... ou Presque
Abattue, Elora s’accrochait aux bras de Boorman, ses pensées tournées vers son double maléfique. Comment pouvait-elle protéger ceux qu’elle aimait en ayant été confrontée à sa part sombre, bien plus puissante qu’elle ne l’était ? Une forte angoisse s’empara d’elle.
Restés en retrait du groupe, Kida s’approcha d’Aniel, partageant ses inquiétudes au sujet de Willow dans leur langage pnakotic
— Ana ekallu dannu ul uḫabbu ša kiṣiršu ? » (Comment un sorcier aussi puissant peut-il perdre sa magie ?)
— La nādi lā ištaqqal šarru. Ana nakāšu miṯallim narkabtišu, ina mušakku inaššu tamītim (Il n’a pas perdu sa magie. Depuis la mort de sa femme dont il se sent responsable, il a perdu toute confiance en lui.) répondit sereinement Aniel.
*******
En revenant à lui progressivement, le premier visage qu’aperçut Airk en ouvrant les yeux, fut celui de sa sœur. Il lui sourit tendrement tout en lui prenant la main, se remettant doucement de sa blessure.
— Salut petite sœur,murmura-t-il
— Comment te sens-tu ?
— Je vais bien.
Il tenta de se redresser, mais une légère douleur le fit grimacer. En remarquant l’expression sombre dans les yeux de sa sœur, il l’interrogea du regard, mais elle l’ignora et le questionna.
— Que s’est-il passé ?
Le jeune prince baissa ses yeux et s’exprima tristement.
— Nous avons perdu Tir Asleen. Le roi Hastur, accompagné de démons, nous ont attaqués. Il a trahi notre mère, notre père, notre alliance.
Les doigts de Kit se resserrèrent violemment autour de ceux de son frère, tandis que la colère s’embrasait en elle.
— Je n’ai jamais eu confiance en lui, elle jeta un œil sur l’armure. C’est quoi cette armure ?
— C’est père qui l’a conçue pour moi, croyant que je deviendrais la personne qu’il espérait tant, le souvenir de ce que son père attendait de lui et la personne qu’il était devenu, lui déchira le cœur.
Alors qu’il s’exprimait, la terrible vision de ses cauchemars vint se superposer à l’image de sa sœur, propageant en lui une intense anxiété.
— Airk que t’arrive-t-il ? demanda Kit, préoccupée.
— Il faut que tu saches que je t’aime et que je ferai tout pour te protéger, répondit-il la voix tremblante. Puis pensant à Sorsha, il ajouta : Comment va notre mère ?
— Scorpia la faite emprisonner.
Devant le regard soucieux de sa sœur, le jeune prince tenta de la rassurer.
— Ne t’en fais pas, Jade trouvera une solution. Elle est avec nous. Fais-lui confiance. Nous devons éviter d’envenimer le conflit déjà existant. Promets-moi que tu ne feras rien de stupide.
Mais le silence de Kit affirmait le contraire. Intrigué, Airk insista
— Tu n’as rien fait de stupide ?
La jeune femme ne répondit pas et partit, malgré les appels insistants de son frère.
— Kit ! Kit !
*******
Au même instant, Jade s’approchait de la fosse où Sorsha était emprisonnée.
— Je suis désolée ma Reine, je vais vous sortir de là.
Sorsha avait le regard meurtri et fatigué, pour la première fois, la reine de Tir Asleen se confia à la jeune chevaleresse.
— Je ne voulais pas que cela se passe ainsi. Je n’ai jamais voulu te séparer de ta famille, déclara-t-elle avec regrets.
Elle fit une courte pause avant de poursuivre.
— Lorsque Ballantine t’a vue au milieu de cette poussière, ce champ de cadavres et ces cris de souffrances, tenant le corps de ta mère dans tes bras, il a voulu te protéger, te sauver. Il me disait que tu étais le plus beau cadeau que la vie lui ait donné, la raison pour laquelle, il voulait combattre les ténèbres.
Jade, bouleversée, sentait quelques larmes couler le long de ses joues, la perte de celui qui avait été son père adoptif, était encore trop présente dans son cœur.
Sorsha regarda la jeune femme les yeux remplis de remords.
— Malgré tout l’amour qu’il éprouvait pour toi, il était rongé par ce secret. Il voulait te révéler la vérité à ton sujet afin que tu aies le choix. Il n’a fait qu’obéir à mes ordres.
Bien que Jade fût profondément touchée par les paroles de la reine, son inquiétude pour Kit surpassait toute autre émotion.
— Je suis venue pour Kit. Elle a essayé de tuer ma sœur. Toute cette rage, cette noirceur dans son regard, étaient si effrayants, s’exprima la jeune femme.
Sorsha, resta silencieuse, accablée, avant de répondre avec gravité.
— Je redoutais ce moment. Si tu savais à quel point j’aurais souhaité que son père soit présent.
Elle fixa Jade d’un regard profondément triste.
— Je ressens qu’un danger menace ma fille mais je me sens si impuissante.
Après une courte pause, elle poursuivit.
— En grandissant, je la voyais d’avantage s’intéresser aux aventures de son père, partager des moments de combats, un simple bout de bois, elle en faisait une épée, plutôt que de se plier aux obligations de son rang de princesse. J’ai essayé de l’éloigner de tout cela, mais je me rendis bien vite compte que c’était impossible. Lorsque Madmartigan quitta le royaume, je devais trouver une personne qui lui permettrait de canaliser ses désirs de batailles et ce fut toi. Tous ces entraînements n’avaient qu’un seul but.
— Quelque soit ce danger, je la protégerai, Votre Majesté.
Sorsha regardait la jeune femme avec estime.
— Non seulement tu es en passe de devenir une très grande chevaleresse mais également une très grande dirigeante.
*******
Après sa conversation avec Sorsha, Jade se hâta de rejoindre Kit. Inquiète de ne pas la trouver dans la tente, elle se lança à sa recherche dans les Wildwood obscurcis par la nuit. Des pensées agitées traversèrent son esprit, faisant suite aux agissements récents de sa compagne. Lorsqu’elle l’aperçut au pied d’un arbre en train d’aiguiser son épée, un sentiment de soulagement l’envahit. Elle s’assit à ses côtés. Cependant, la jeune princesse l’ignora.
Jade posa tendrement sa main sur celle de son amante, qui serrait son arme.
— Kit, nous devons parler. Tu ne peux pas fuir cette discussion.
La jeune princesse, s’immobilisa, le regard rivé sur son épée, laissant un court silence s’installer entre elles deux, avant de s’exprimer, sa voix chargée de chagrin.
— Je ne pouvais pas la contrôler.
— Contrôler quoi ?
— Cette voix, ma grand-mère, qui ne cessait de marteler dans ma tête, que la mort de Scorpia libérerait ma mère et ramènerait la paix. Jusqu’à ce que…
Kit tourna ses yeux embués de larmes vers celle qu’elle aimait et poursuivit.
— Je ne pourrais jamais te faire de mal, Jade.
La jeune Bone Reaver prit le visage de sa bien-aimée entre ses mains.
— Je sais, murmura-t-elle, avant de la serrer dans ses bras.
Lorsque Kit se libéra de son étreinte, elle plongea son regard dans celui de son amante et l’embrassa. Elle se laissa submerger par cet apaisement et cette douceur que seule Jade pouvait lui donner.
*******
Les premiers signes de fatigue commençaient à se faire ressentir. Le froid nocturne endolorissait les membres de chacun. Se déplacer dans l’obscurité au cœur des Wildwoods, revenait à avancer à l’aveugle, sachant que le danger pouvait surgir à tout instant. Des craquements de branches, de brindilles, les firent stopper net, chacun sur ses gardes.
— Ne faites pas un pas de plus, ordonna sèchement Aniel, sentant une menace imminente. Il s’adressa à Kida « Ana āluk tappānu. » (Tiens-toi prête).
Mais malgré les avertissements, Boorman avança d’un pas de trop. Une étrange sensation de pression s’empara de leurs pieds. Des filets se matérialisèrent, les soulevant et les emprisonnant à plusieurs mètres au-dessus du sol.
Kida, agacée, s’énerva contre Boorman.
— Espèce d’imbécile, l’excentrique. Qu’est-ce que tu n’as pas compris dans : ne faites pas un pas de plus. Je te jure que dès que l’on sera libérés, je t’étriperai et je le ferai très lentement avec délectation !!! elle prit son épée afin de trancher les cordes du filet.
Tous s’écrièrent « Attends ! Ne faits rien !!! » Trop tard, la chute fut brutale.
Allongé au sol, Aniel, furieux, réprimanda Kida.
— Šūtu inaššu wa āleku ! (Tu recommences et je te tue !)
— Anā ul ukallim. Ina qabluša rēmu mīšu. (Je ne crois pas. Tu as trop besoin de moi.) ironisa-t-elle.
Alors qu’il s’apprêtaient tous à se relever, les Bone Reavers les encerclèrent, prêts au combat. Intrépide, Kida saisît ses deux épées, défiant leurs assaillants.
— Venez, je vous attends. Ça va me défouler !
Cependant, Mims, essayant de la raisonner, murmura :
— Je ne crois pas que ce soit une bonne idée de les provoquer.
Lori répliqua à la guerrière, agressif.
— Avec plaisir !
À l’instant même où chacun se préparait à l’affrontement, il ordonna brusquement à ses hommes de s’arrêter, ayant reconnu la jeune Impératrice. Subitement, le son de sa voix passa de l’agressivité à la douceur.
— Elora.
Tous les regards se tournèrent vers lui, étonnés. Il s’approcha de la jeune femme et l’enveloppa de ses bras. Elora était épuisée aussi bien physiquement que moralement.
— Que t’est-il arrivé ? demanda-t-il d’une voix compatissante.
— C’est une longue histoire Lorin s’exprima-t-elle, la voix brisée.
— L’Impératrice doit se reposer, intervint Aniel.
— Suivez-moi.
Il les installa dans une tente, afin qu’ils puissent passer la nuit bien au chaud et se reposer, fit apporter des repas et rejoignit la cheffe des Bone Reavers.
— Scorpia, j’ai croisé Elora dans les bois, accompagnée du sorcier, Boorman, une nelwyn, un être étrange et une folle alliée. Je les ai installés sous une tente pour la nuit.
— Tu as fait quoi ! Mais qu’est-ce qui t’es passé par la tête, Lori !
— Il s’agit d’Elora. Je ne pouvais pas la laisser à la merci des dangers de la forêt.
— Tu sais bien que le seul danger des Wildwoods c’est nous. Sont-ils au courant pour Sorsha ?
— Non.
— Poste un garde devant l’entrée de la tente pour la nuit. Je m’occuperai d’eux demain à l’aube.
— Bien.
— Lori, ce n’est ni Elora, ni le sorcier, ni Sorsha qui me préoccupent mais la princesse. Garde un œil sur elle.
À l’intérieur de la tente, l’atmosphère était assez tendue. Mims se tenait auprès d’Elora, veillant sur elle tandis que Boorman gardait un œil vigilant sur Kida et Aniel, communiquant en pnakotic. Willow s’approcha de lui.
— Tu leur fais confiance ? chuchota Boorman.
— Ils connaissent Madmartigan donc, oui… un peu.
Mais lorsque Willow s’aperçut de la façon dont Boorman fixait Kida, les yeux écarquillés, traduisant une légère crainte, il ne put s’empêcher de sourire.
— Aurais-tu peur d’elle ?
— Oh ! Non, absolument pas. Rien ne m’effraie, il se pencha vers son ami. Tu ne trouves pas qu’elle est un peu… psychopathe ?
— Elle est une guerrière. Ils ne sont animés que par un seul but ; protéger Elora. Ils sont prêts à tout, peu importe les circonstances et les sacrifices.
Impatiente, Kida, observait le garde à l’entrée de la tente, prête à sortir malgré l’obscurité. Aniel posa une main rassurante sur son épaule.
— Pulû, Samāšu. Šumma libbišu ina šat iqbi. (Attends. Il est préférable d’attendre le levé du jour.) murmura-t-il afin de la retenir.
— Mīn ša arhu innūnišma ? Anāwum lā šumma ina hūrummūtī. Ina ša anāwum lā šumma napāḫuwa āru !!! (Que crois-tu qu’ils vont faire de nous ? Nous ne sommes pas leurs invités. Sinon ils n’auraient pas posté ce garde !!! )
Willow, prenant conscience de la tension entre les deux individus, essaya d’atténuer la situation afin d’éviter toute action qui pourrait susciter l’hostilité de la cheffe des Bone Reavers.
— Nous connaissons Scorpia, elle ne nous fera aucun mal.
— J’espère que tu as raison, sorcier. Kida lui répondit sèchement.
Avant de s’allonger, elle lança un regard noir à Boorman qui ne ferma pas l’œil de la nuit.
*******
L’aube se levait progressivement sur les Wilwoods. Scorpia, accompagnée de Lori, se dirigea vers la tente où le groupe avait passé la nuit. Elle observa chacun d’eux, remarquant leur fatigue, leur état émotionnel. Cependant, son attention se focalisait surtout sur Aniel et Kida, dont leurs regards se croisèrent, déterminés. Lori se tenait à ses côtés, prêt à agir au moindre signe d’agitation de la guerrière qu’il ne quittait pas des yeux.
—Qu’allez-vous faire de nous ? interrogea Kida d’une voix ferme, brisant ce lourd silence.
Les deux femmes s’affrontaient visuellement, chacune défiant l’autre. Jusqu’à ce que Scorpia, méfiante interpella Kida d’une voix sévère.
— Qui êtes-vous ?
Voyant la tension s’aggraver, Elora prit l’initiative d’intervenir, afin d’apaiser les esprits.
— Nous avons vécu des évènements dramatiques, Scorpia. Tir Asleen est tombé aux mains de… elle n’eut pas le courage de prononcer le nom ni de Graydon ni le sien. Nous ignorons si Airk, Kit, Jade ou Sorsha sont encore en vie. Sans Boorman et eux, elle se retourna vers Kida et Aniel, nous n’aurions pas survécu. Tu es notre seul refuge.
Les souvenirs de cette terrible bataille remontaient à la surface, rappelant les visages démoniaques de ceux qui les avaient attaqués.
Scorpia posa un regard interrogateur vers Lori. Les yeux du Bone Reaver ne laissaient aucun doute sur sa réponse.
— Amène-les ici, lui ordonna-t-elle.
Lorsqu’il quitta les lieux, tous les regards se tournèrent vers Scorpia, inquiets et interrogateurs.
Quelques instants plus tard, Lori revint, accompagné de Jade, la princesse et son frère dont la douleur liée à sa blessure se faisait encore légèrement ressentir. Tous restèrent brièvement immobiles et silencieux, avant de réaliser que chacun d’entre eux étaient sortis vivant de ce terrible combat. Mais, ces retrouvailles furent de courte durée, brutalement Interrompues, lorsque Airk, aperçut le visage d’Elora. Il se rua vers elle, en criant, dans l'unique but de la tuer, sous les yeux incompréhensibles de tous. Avant qu’il ne put l’atteindre, Kida s’interposa violemment, le jetant à terre, brandissant son épée pour l’abattre. Prête à le transpercer de sa lame. Sans que tous n’aient eu le temps de réagir, elle fut stoppée net par Aniel.
— ša rēšu. ša māru Madmartigan. (C’est le prince. Le fils de Madmartigan.)
Elle se calma et rengaina son épée.
— Aššū lu ikkaru ana bānūtu šarri. (Tu sais ce que je pense de la famille royale.)
— Ana aššū. Ina ša kī ana qātīšu. (Je sais. Mais n’oublie pas notre serment.)
Kit se précipita vers son frère, tout en agressant verbalement Kida, son regard s’assombrit, submergée par la colère.
— Si tu t’en prends de nouveau à mon frère, je te tue !!!
— Oh comme j’ai peur !!!! C’est avec un grand plaisir que je planterai ma lame, lacérant chaque parcelle de ton corps de princesse, tout en savourant la souffrance dans ton regard !!!
La jeune femme s’apprêta à se jeter sur la guerrière pour la combattre mais fut stoppée par Jade.
— Kit, occupe-toi d’Airk.
— Merveilleuses retrouvailles familiales. Tu ne trouves pas Lori, ironisa Scorpia.
— Merveilleuses, en effet.
Dès que le prince se fut relevé, il s’exprima, affolé.
— Elora est devenue une disciple du Wyrm !!!!
— Quoi ! Mais qu’est ce tu racontes ! le questionna Kit.
Il se tourna vers sa sœur.
— Elle nous a tout pris !!! Notre royaume n’est plus qu’un vaste champs brûlé aux demeures détruites, un lieu chaotique !!! il la prit par les épaules. Je t’en prie, écoute-moi, elle et Graydon agissent pour le Wyrm.
Kit avait du mal à croire les paroles de son frère, lorsqu'Elora intervint d’une voix brisée.
— Regarde-moi, Airk. Je ne suis pas elle. Je suis certainement la cause de tout ce qui est arrivé, mais crois-moi, ce n'était pas moi.
La tension était devenue trop forte, chacun ne sachant quoi penser, ni comment agir. Afin d’adoucir les esprits enragés, Willow intervint.
— Calmons-nous, et discutons posément de tout ce qui s’est passé. Il nous faut trouver une explication.
Part 16
Co-autrice : Elodie DragonMistic
Confessions & Secrets
Pendant que tous se rassemblaient à l’extérieur autour d’un festin préparé par Lori, Jade se retira discrètement avec sa sœur.
— Tu devrais libérer Sorsha.
— Tu sais bien que cela m’est impossible.
— En tant que cheffe des Bone Reavers, tout t’est possible. Nous avons besoin d’elle. Ton geste unifiera nos forces, et renforcera la confiance en toi. Je ne te demande pas d’oublier ta rancœur, mais simplement d’accepter cette trêve.
Jade rejoignit le groupe, tandis que Scorpia, se dirigeait vers la fosse où était emprisonnée Sorsha.
— Comment se portent mes enfants, demanda la reine.
— Ils sont toujours en vie.
La cheffe des Bone Reavers toisait la reine de Tir Asleen, réfléchissant, avant de s’exprimer.
— Je vais ordonner ta libération et celle de tes hommes. Mais sache, que ce geste ne met pas un terme à notre conflit. Voici l'accord que je te propose Sorsha : en échange de ta liberté, dès cette situation réglée, tu redeviendras ma prisonnière.
— J’accepte et je tiendrai parole, mais mes enfants ne doivent rien savoir.
D’un simple hochement de tête, Scorpia donna l’ordre à ses hommes de libérer la reine et ses chevaliers.
Pendant ce temps, Kida s’approchait de Lori, occupé à préparer le repas.
— On a plusieurs facettes, guerrier.
Lori la regarda avec étonnement. Sans attendre la moindre réponse de sa part, elle trempa l’index dans la marmite et goûta la soupe, la trouvant excellente.
— Un mélange de douceur et d’agressivité, ironisa-t-elle avant de partir.
Se retrouvant seul, Lori se murmura à lui-même « Elle est complètement folle. »
Elle s’assit aux côtés de Boorman, lui lançant un regard assez froid. Il la fixa brièvement, une légère crainte dans ses yeux avant de lui adresser la parole.
— Pourquoi tu t’assois là ?
— Cette place me convient parfaitement. Je pourrais agir au moindre geste stupide de ta part, l’excentrique.
Lorsque Scorpia arriva accompagnée de Sorsha, Kit et Airk la prirent dans leurs bras.
— Je vais bien.
Kit échangea un bref regard de gratitude avec Jade.
À l'instant même où Sorsha aperçut Elora, un sentiment de soulagement mêlé d’espoir l’envahit, en réalisant qu’elle n’était pas devenue une disciple du Wyrm. Elle s’approcha d’elle et lui prit la main afin de la réconforter.
— J’ai cru t’avoir perdue à tout jamais.
Assis, côte à côte, tous ressentaient une atmosphère pesante et chargée d’interrogations. Les regards s’entrecroisaient, chacun cherchait à comprendre l’existence de Dark Elora et la transformation de Graydon en Harbinger du Wyrm.
— Comment est-ce possible pour Graydon. Nous l’avons vu mourir, s’exprima Kit avec fermeté.
Kida et Aniel échangèrent un regard, empreint de douloureux souvenirs, remémorant leur sombre passé en tant qu’assassins du Wyrm. La guerrière prit la parole.
— Il a été propulsé dans un autre espace-temps, lui donnant l’illusion d’agir aux côtés de la véritable Impératrice. Persuadé que ses actions sauveront votre monde mais ce n’est que mensonge, son véritable dessein est de le détruire.
— Quelle est donc cette histoire avec Elora ? demanda Jade, perplexe.
Sorsha lui répondit, partageant les moments sombres de l’attaque de Tir Asleen.
— Pendant l’attaque du royaume par Hastur, nous avons croisé Graydon et Elora, plongés dans une noirceur si machiavélique, qu’en quelques secondes, tous mes espoirs furent anéantis. J’étais persuadée qu’elle avait sombré dans les ténèbres.
Ressentant tout le poids de la situation, la jeune Impératrice prit la parole, dévastée.
— J’ignore ce qui a déclenché l’existence de mon côté sombre. Tout ce que je sais, c’est qu’elle est bien plus puissante que moi. Je n’ai pas pu la combattre.
— Comment être sûre que tu sois la vraie Elora ? répliqua Kit avec fermeté.
Sa remarque déclencha la colère de Kida.
— Nous ne l’aurions jamais sauvée si elle n’était pas l’Impératrice !
Elles se lancèrent un regard chargé d'hostilité.
— Crois-moi Kit, j’ai vu la mort dans ses yeux, intervint Airk.
— Il y avait une telle haine dans sa voix et une violence si démoniaque, ajouta Mims.
Willow prit la parole, plongeant mentalement dans le souvenir de ce terrible combat, au cours duquel, tous faillirent perdre la vie.
— Face à ces forces diaboliques de Graydon et Dark Elora qui menaçaient de tout détruire, nous étions impuissants. Si Elora incarne l’espoir, la lumière et l’amour, autant son double incarne le désespoir, les ténèbres et la mort. Tout comme elle peut sauver notre monde, elle peut également le détruire.
Soudain, à la surprise générale, Airk se leva pour s’adresser à Willow et à Elora.
— Vous avez utilisé le Malatrium pour sauver Graydon. Elora tu as dit avoir appris la magie interdite lorsque tu étais à Nockmaar. Le Malatrium s’est nourri de toi et a donné naissance à ton double maléfique !
— Comment pouvons-nous la détruire ? demanda Kit avec détermination.
Kida se tourna vers Aniel avant de répondre.
— Elle ne peut être détruire que d’une seule façon.
— Laquelle ? interrogea Kit.
— Les deux sont liées. Si l’une meurt, l’autre aussi.
La jeune princesse soutint froidement le regard de Kida avant de lui répondre d’un ton sec.
— N’y pense même pas. Il doit y avoir une autre solution.
— Princesse, si j’avais souhaité la mort de l’Impératrice, ce serait déjà fait.
Kit se leva, emportée par la colère et s’approcha de Kida.
— Qui nous dit que tu n’es pas une disciple du Wyrm prête à tous nous tuer !
La guerrière resta imperturbable face à la rage de la jeune princesse.
— Si mon but était de tous vous tuer, et crois-moi ce n’est pas l’envie qui me manque de te transpercer de ma lame, vous seriez déjà tous morts.
Kit dégaina son épée.
— Qu’attends-tu ?
— Ne me provoque pas, princesse. Je vais te dire ce qu’il en est. Si ta famille royale avait permis à l’Impératrice d’utiliser ses pouvoirs, au lieu de les dissimuler, peut-être n’en serions-nous pas là aujourd’hui. Mon ultime but est de protéger l’Impératrice et d’éliminer tout ceux qui représenteront une menace à son égard.
Kit, furieuse, brandit son épée pour attaquer Kida mais Aniel intercepta brusquement son geste, déclenchant un échange de regards remplis de rage.
— Tu ne devrais pas l’affronter, lui dit-il.
Il se tourna vers Kida.
— Kū. Lā šumšu uldu. (Arrête. Ne la provoque pas.)
— Attē, kīma ša naqû, ina kūdušišu u kīma anašišu, illikū amēlu ušākul, lā izuzzu ša ilī. Lā tišimma ša atta adī, Aniel. (Tu sais tout comme moi, s’ils avaient laissé l’Impératrice suivre sa destinée, il y aurait eu moins de souffrance. N’oublie pas ce que tu as perdu, Aniel.)
— Anāku annaša lā išannak ? (Comment pourrais-je l’oublier ?)
— Pourquoi ne nous montres-tu pas ton visage ! s’exclama Kit avec fureur envers Aniel.
— Je ne ferais pas ça à ta place, intervint Kida d’un ton ferme.
Au moment où la princesse s’apprêtait à retirer la capuche qui dissimulait le visage d’Aniel, ce dernier agrippa fortement son poignet et s’exprima d’un ton neutre.
—Tu as encore beaucoup à apprendre, jeune princesse. Je ne te demande pas de nous faire confiance. Mais sache que nous ne sommes pas l’ennemi.
Jade s’approcha de Kit, posant doucement sa main sur son épaule afin d’atténuer sa colère.
— Kit, peu importe qui ils sont ou d’où ils viennent. Je sais que c’est difficile pour toi. Tu viens de perdre ton royaume, tu as failli perdre ton frère, ta mère. Mais nous avons besoin de toute l’aide nécessaire pour comprendre, protéger Elora et sauver notre monde.
— Tout le monde ne se bat pas uniquement pour Elora, Jade.
Kida observait silencieusement Jade, notant la tranquillité dans sa voix et la sagesse de ses paroles. Elle remarqua comment chaque geste de la Bone Reaver semblait apaiser sa compagne. Bien que, dépourvue d’émotions, un mystère la poussait à s’intéressait d’une manière inhabituelle à Jade. Aniel perçut le changement naissant chez sa sœur d’arme mais garda le silence.
— Je dois partir pour Nockmaar ! s’écria Airk.
La stupéfaction se peignit sur les visages de chacun, suivie d’un instant de silence, rompu par la réaction vive de Kit.
— Il n’en est pas question ! Nockmaar est un lieu trop dangereux, submergé d’une sombre magie !
— Je dois m’y rendre absolument, insista le jeune prince.
— Tu n’iras nulle part. Nockmaar est maudit. Il utilisera tes peurs, tes angoisses contre toi. Tu ne sauras plus faire la différence entre le réel et l’illusion.
Voyant la situation s’aggraver, Sorsha intervint, essayant de raisonner son fils.
— Airk, mon fils, ta sœur a raison. L’esprit de Bavmorda hante ce lieu, le lien familial pourrait faciliter son intrusion dans ton esprit.
Le jeune prince se laissa emporter par la colère envers sa mère.
— Mère, n’est-ce pas un peu tard pour me parler des liens qui nous attachent à Bavmorda. Difficile à admettre, mais l’excitée a raison, notre famille est responsable de la situation actuelle ! Vous avez créé Bavmorda, lui avez enseigné la magie dans nos murs !
Sorsha essayait d’apaiser son fils justifiant ses actions passées, mais en vain.
— Airk, calme-toi ! Ta grand-mère était vouée à une toute autre destinée, mais elle a fait le choix de se tourner vers les ténèbres.
— Mais toi, tu as fait le choix de nous dissimuler la vérité ! Si tu nous avez ne serait-ce préparés, peut-être que nous n’aurions pas perdu notre père, peut-être qu’Elora aurait été prête à embrasser sa destinée. Toutes ces années à la croiser dans les murs de notre palais, vivant et grandissant dans l’ignorance, entourés de secrets !
— Mon unique but était de vous protéger, ta sœur et toi.
— C’était aussi pour nous protéger que tu nous a caché l’existence du « Serment Secret de Tir Asleen »
Sorsha ne put cacher sa colère et stupéfaction.
— Qu’as-tu fait, Airk ? Demanda-t-elle.
— Je l’ai lu. Chaque page que je tournais, dévoilait notre histoire, notre passé jusqu’à la dernière où… Airk ne put terminer sa phrase, revoyant la mort de sa sœur. Quoi qu’il m’en coûtera, j’irai à Nockmaar, Je dois sauver… Notre royaume.
Alors qu’Airk démontrait fermement ses intentions, une lourde tension pesait entre lui et sa mère. C’est à ce moment que Kit, imperturbable, prit la parole d’une voix tranchante.
— Je préférais mon frère coureur de filles que celui qui se prend pour un sauveur.
L’impact des paroles de Kit se refléta clairement sur le visage du jeune prince, trahissant la blessure infligée.
Aniel décida d’intervenir, conservant son calme et sa fermeté.
— Jeune prince, en ayant lu le « Serment Secret de Tir Asleen », tu as malencontreusement réveillé le lien qui l’unit au Malatrium. Les deux manuscrits se nourrissent de la magie : l’un de la lumière, l’autre des ténèbres. Désormais, le Wyrm est conscient que la puissance de l’Impératrice a été réactivée. C’est pour cette raison que ta mère, l’avait placé sous scellé.
Face à cette querelle, Scorpia ne put s’empêcher d’ironiser, s’adressant à Lori.
— Finalement, je n’aurai pas besoin de les tuer, ils vont le faire d’eux-mêmes.
— Cette famille est rongée par une terrible souffrance, celle de la perte de Madmartigan, lui répondit Willow.
Au même moment, Kida, imperturbable, prit l’assiette des mains de Boorman.
— C’était mon repas.
— Je pourrais très bien, si l’envie me prend, venir t’égorger pendant ton sommeil.
— Ok, tu peux la garder. De toute façon, je n’ai plus faim.
À la surprise générale, Mims s’exprima avec une courageuse détermination.
— J’accompagnerai le prince à Nockmaar.
Willow s’y opposa strictement, son regard trahissant une inquiétude profonde.
— Mims, tu ignores les dangers qui vous attendent là-bas. C’est bien trop risqué. Je refuse !
— Popa, nous avons tous un devoir à accomplir dans cette bataille à venir et le mien est d’accompagner le prince.
— Je ne peux te laisser faire. Tu es tout ce qui me reste. Je ne peux prendre le risque de te perdre !
Les derniers mots de Willow se brisèrent. Mims essaya de le rassurer.
— Je sais que la perte de maman t’est inconsolable ainsi que le départ de Ranon, mais tu ne peux me protéger définitivement, je me dois de le faire, pour moi, pour ma famille, mon village, pour honorer la mémoire de maman.
La colère de Willow atteignit son paroxysme, une fureur qui ne lui ressemblait pas. Il répondit catégoriquement.
— Je te le redis, hors de question que tu partes pour Nockmaar !!!! Je t’ai déjà laissée venir avec nous, ce que je n’aurais jamais dû accepter !
Incapable de supporter davantage de discorde parmi ses compagnons, Elora s’écria d’une voix submergée de colère. Ses mots résonnèrent, coupant court à toutes les disputes.
— Assez ! Nous parviendrons à rien en nous déchirant ainsi ! Nous devons rester unis si nous voulons faire face à ce qui nous attend. Seul notre solidarité nous permettra de surmonter cela !
Puis, elle adressa une requête à Scorpia.
— En tant que cheffe des Bone Reavers, allie-toi à nous, apporte-nous ton aide, tes guerriers, afin de combattre les ténèbres.
Mais Scorpia restait inflexible.
— Mon seul combat est la liberté de mon peuple, jeune Impératrice.
— Il n’y aura plus de liberté pour personne si nous perdons cette guerre, répondit Kit sur un ton autoritaire.
Scorpia la fixait d’un regard glacial avant de lui répondre avec mépris.
— Tu ne peux comprendre, princesse, le combat quotidien pour obtenir sa liberté, toi qui a toujours tout eu, sans jamais avoir à te battre et sans le mériter !
Blessée et irritée par les propos de Scorpia, Kit rétorqua avec agressivité.
— Ne crois pas connaître mon histoire ! Tes jugements hâtifs ne font que révéler ton ignorance à mon sujet !
Exacerbée par ce conflit entre les deux personnes qu’elle aimait, Jade explosa de colère.
— J’en ai assez !!! Faites comme bon vous semble, mais trouvez un terrain d’entente. Je ne veux pas savoir lequel. Toi, Scorpia tu es ma sœur, Kit tu es… je t’aime. Impossible pour moi de choisir entre vous deux. Débrouillez-vous, mais en ma présence, je ne veux plus vous entendre vous agresser mutuellement !
Elle s’éloigna afin de retrouver son calme.
Scorpia et Kit se regardèrent silencieuses, avant de s’exprimer.
— Je crois que nous n’avons pas trop le choix, princesse.
— Non, en effet.
— Ce n’est pas parce que je ne t’agresserai plus en présence de ma sœur que je t’apprécie.
— Il en est de même pour moi.
— Je t’accompagnerai, Elora, annonça Lori.
Scorpia, surprise, se retourna.
— Quoi ! Lori, je te l’interdis.
— Avec tout le respect que je te dois, Scorpia, j’ai consacré ma vie entière à te servir. Aujourd’hui je me mets au service d’Elora avec ou son ton accord.
*******
Alors que tout le monde s’était dispersé, Elora se retrouva seule avec Sorsha.
— Ma Reine, je ne peux nier ma part de responsabilité. Dark Elora est née de mes erreurs, de la fusion de la magie interdite et de ma propre douleur, avoua-t-elle.
Sorsha réagit en la prenant dans ses bras.
— Ne te blâme pas, mon enfant. Nous sommes tous liés par des événements que nous n'avons pu prévoir. J’ai moi aussi commis mes propres erreurs.
La jeune Impératrice plongea son regard dans celui de la reine avant de s’exprimer d’un ton grave.
— Il est nécessaire que nous en discutions, mais si la seule issue est que je…
— Inenvisageable, nous trouverons une solution.
À cet instant précis, Kida fit irruption, s’immisçant dans la conversation.
— Impératrice, si vous m’en donnez l’ordre, je m’en chargerai.
*******
Au même instant, Willow se retrouvant seul avec Boorman, partagea ses craintes.
— Face au pouvoir des ténèbres, je me suis senti totalement démuni, me voyant mourir, perdre ma fille ainsi qu’Elora. Mims a raison, je ne peux la retenir d’avantage pour la protéger. L’idée de la perdre me déchire le cœur.
— Je les accompagnerai à Nockmaar. Je veillerai sur ta fille et la protégerai. Et puis ça me permettra d’être loin de la psychopathe, en espérant qu’elle ne vienne pas avec nous.
Un sourire se dessina sur le visage de Willow, tandis qu’à l’écart du campement, Kida et Aniel furent rejoints par Sorsha.
— Merci Aniel d’avoir sauvé Elora.
— J’ai simplement honoré notre serment ma Reine.
— Au sujet de ma fille, je sais que parfois elle peut-être… tempétueuse par moments.
Kida ne put cacher sa colère et son inimitié envers Kit.
— Elle mérite une bonne leçon !
— Kida ! Attû tušannû ilatu ! (Kida, tu t’adresses à la Reine!) la réprimanda Aniel.
La guerrière s’excusa.
— Veuillez m’excuser ma Reine.
— Elle est encore jeune, votre Majesté. Elle apprendra de ses expériences, ajouta Aniel.
Lorsque Sorsha s’éloigna, Kida profita de l’occasion pour discuter avec son frère d’arme.
— Tu devrais dire à la princesse qui tu es réellement.
— Moins elle en sait, mieux c’est.
— Encore des secrets, que feras-tu le jour où elle le découvrira ?
Aniel resta silencieux. À l’instant même où Kida s’apprêtait à partir, il la retint par le bras.
— J’ai remarqué ton regard envers la jeune Bone Reaver. Je sais, que tu ignores ce que le mot « aimer » signifie. Ne t’approche pas d’elle. Elle appartient à la princesse.
— Personne n’appartient à personne, répliqua-t-elle avant de s’éloigner.
*******
Seule, plongée dans ses pensées, Elora sursauta en remarquant la présence d’Airk.
— Comment te sens-tu ? demanda-t-il.
— Si on oublie le fait que tout le monde veut me tuer, je survie. Et toi, ta blessure ?
— Oh, je survie.
Un silence s’installa, Le jeune prince prit une profonde inspiration avant de poursuivre, tout d’abord hésitant.
— Elora, je sais que je ne suis pas la personne que tu espérais que je sois… Mais, mes sentiments envers toi…
Avant qu’il ne puisse terminer sa phrase, Elora l'interrompît doucement.
— Airk, je t’apprécie énormément, mais les choses ont changé.
— Je t’aime, je suis prêt à faire des efforts, à être cette personne que tu attends que je sois.
— Je ne te demande pas d’être quelqu’un d’autre. Je ne peux me permettre de laisser qui que ce soit m’aimer, sans que sa vie ne soit en danger ou qu’il décide de me tuer. Je suis désolée Airk.
Un silence pesant s’installa entre eux. Airk acceptait, le cœur lourd, la réalité de cet amour éteint. Il la laissa seule.
En chemin, il croisa la route d’Aniel qui le fit tressaillir.
— Désolé, jeune prince, je ne voulais pas t’effrayer.
— Je n’ai pas eu peur.
Pourtant, son regard trahissait le contraire.
— Ok peut-être un peu.
— J’ai besoin que tu me dises ce que « Le Serment Secret de Tir Asleen » t’a dévoilé dans sa dernière page.
Airk hésita. Aniel insista.
— Je dois savoir, jeune prince, afin de pouvoir vous protéger.
Le fait d’évoquer ce passage, des frissons d’angoisse parcoururent l’échine du jeune prince.
— Depuis que j’ai été sous l’emprise de The Crown, je ne cesse de faire ce terrible cauchemar, de ma sœur, son corps inerte, transpercé d’une épée. Le manuscrit m’a dévoilé la même scène. Mais j’ignore qui est son assassin, resté dans l’ombre.
Aniel ressentait le fardeau qui pesait sur les épaules du jeune homme.
— The Crown a révélé des fragments de ton destin et celui de ta sœur. Ne prends pas pour acquis les images qu’elle a implantées dans ton esprit.
— Et si ces images n’étaient qu’une infime partie des secrets qui entourent ma famille ?
— Les mystères du passé sont souvent les ombres du présent. Les réponses que tu cherches sont souvent liées à ce que nous préférons oublier.
Airk s’emporta.
— Justement, je veux découvrir ce qui m’a été caché ! Je me dois de sauver ma sœur même si ce n’est qu’un fragment de son destin ! Je suis prêt à sacrifier ma vie s’il le faut !
— Jeune prince, certaines vérités, si douloureuses soient-elles devraient rester enfouies.
Une brindille craqua, Aniel et Airk se retournèrent, découvrant Mims.
— Désolée, je n’avais pas l’intention de vous déranger, dit-elle, gênée.
Aniel lui répondit sereinement.
— J’étais sur le point de partir.
Airk fixait Mims de son regard intense, ce qui la déstabilisa. Elle rompit le silence.
— C’est courageux de retourner à Nockmaar.
— Courageux ou pure folie, répondit Airk en marquant une courte pause.
Tous deux se regardaient, d’une profondeur d’âme partagée avant que le jeune prince ne poursuive.
— J’ai dû apprendre à vivre avec la perte de mon père. Je ne sais si je pourrai continuer sans ma sœur.
Mims, les yeux empreints d’une empathie profonde, laissa échapper un soupir.
— La douleur de la perte nous fait croire que nous ne pourrons continuer. Mais nous trouvons le courage et la force d’avancer, pour eux, pour leur mémoire, pour les garder en vie dans nos cœurs.
Airk esquissa un léger sourire.
— J’ai hérité d’un royaume mais je ne sais comment le gouverner, comment rendre mon peuple, mes chevaliers fier de leur prince et futur roi. Je vis constamment dans l’ombre de mon père. Est-ce que je serai à la hauteur de son héritage ?
Mims s’approcha d’Airk.
— Mon Prince, ne cherchez pas à être votre père, soyez-vous même.
— Qui suis-je réellement ? Peut-être que Nockmaar me fournira quelques réponses.
Mims détourna son regard, observant les profondeurs des Wildwoods.
— Le chemin qui mène à Nockmaar sera pavé de grands dangers. Il nous faudra être prêts à affronter l’inconnue et ses démons
Part 17
Co-autrice : Elodie DragonMistic
Le Pacte d'Hastur
Dans les profondeurs d’Immemorial City, s’étendait un gouffre infernal d’une horreur sans nom. Un royaume de terreur, dévasté, sous un ciel ténébreux, lacéré à intervalles réguliers par des éclairs incandescents. Les terres cendrées étaient fissurées par des siècles d’un chaos sans fin et brûlées par le flux ardent du vermiscus. L’air, rempli de poussière et de soufre, étouffait toute vie.
Les entités démoniaques erraient parmi les ténèbres, leurs silhouettes déformées, chassant et s’entre-dévorant, afin d’assouvir un trop plein d’instincts meurtriers et sanguinaires. Leurs cris de souffrance se mêlaient aux rugissements lourds des tornades de feu.
Toute une armée satanique se levait, attendant de pouvoir se répandre à la surface.
Au cœur de cette terre damnée, se dressait une colossale tour sombre en forme de pyramide, flanquée de tourelles acérées, telles des flèches déployant leur venin empoisonné, menaçante et déversant son ombre maléfique.
Dark Elora et Graydon, avançaient d’un pas lent.
— Quel est donc cet endroit ? s’interrogea le jeune prince déchu, sa voix remplie d’inquiétude.
— L’Antre du Wyrm, répliqua fermement Dark Elora.
Elle s’approcha des murs et posa sa main sur les parois craquelées.
— Ces symboles sont d’une grande beauté, ses doigts effleuraient lentement, en une douce caresse, les inscriptions en pnakotiques. Je peux ressentir toute cette puissance qui émane du vermiscus, elle plongea sa main dans le liquide visqueux, qui s’écoulait le long des fissures, et la porta à ses lèvres.
Graydon ne pouvait détourner son regard, fasciné, devant le calme et l’assurance dont faisait preuve Dark Elora.
— Ces chaînes… un frisson glacial lui parcourut l’échine, à l’instant même où il réalisa ce qu’elles emprisonnaient. Ce sont... des restes démembrés. Qu’est-ce que c’est, ma Reine, le mur des tortures ?
— Oh, non, mon cher et tendre, Dark Elora agrippa l’une des chaînes rouillées. Notre Maître sait comment punir les traites et satisfaire ses instincts sanguinaires.
Les deux amants se déplaçaient parmi des cadavres desséchés, entendant le claquement de leur pas. Un son lointain parvenait aux oreilles de Graydon.
— Tu entends ? demanda-t-il, tandis qu’il cherchait du regard la provenance des sons. Cela ressemble à des murmures d’agonies.
— Prisonniers pour l’éternité dans leur prison de martyres, telle est la sentence de notre Maître, souffla Dark Elora.
Graydon prit la main de son amante, s’offrant ainsi du réconfort.
Tous deux stoppèrent à quelques mètres d’un immense rideau de feu, terrifiant et rougeoyant, projetant des éclats orangés sur leurs visages respectifs, accentuant leur aspect maléfique.
Un terrible rugissement transperça l’air, secouant et faisant trembler la terre sous leurs pieds. Une créature satanique surgit des flammes de l’enfer, ses iris aussi ambrés que le vermiscus, sa silhouette monstrueuse et diabolique se découpait au milieu de ce rideau de lave, accompagnée d’une aura de terreur indescriptible.
Le vermiscus s’écoulait le long de ce corps immonde, identique à de la sève infectée, inondant sa colonne vertébrale. Le visage, hideux et terrifiant de la créature, était scarifié de symboles pnakotiques, entaillés dans sa chair cendrée. Quatre cornes surplombaient son crâne d’où semblait émaner le liquide visqueux. Sa bouche, aux dents affûtées, renforçait sa nature abjecte.
— Comment a-t-elle pu vous échapper ! la voix, d’outre-tombe de la bête gronda avec une telle violence, que la pièce entière sembla se fissurer.
Graydon resserra ses doigts autour de ceux de Dark Elora, tandis qu’elle essayait d’apaiser la fureur du Wyrm.
— Je la tenais, mon Maître. Elle était à ma merci, si Aniel et Kida n’étaient pas intervenus, pour la sauver.
Le Wyrm poussa un hurlement de rage.
— Je m’occuperai d’eux en tant voulu. Je les broierai dans cette salle et je savourerai chaque instant de leur souffrance. Quant à l’Impératrice, vous n’avez pas droit à l’erreur, si vous ne voulez par finir comme ces cadavres à vos pieds.
— Je suis bien plus forte qu’elle, mon Maître. J’ai ressenti sa faiblesse lors de notre affrontement.
Un lourd silence s’ensuivit, pesant sur l’atmosphère déjà angoissante, avant que le Wyrm ne poursuivit.
— J’avais mis tous mes espoirs en Bavmorda. Elle fut le meilleur de mes sujets et aurait pu régner à mes côtés. Mais son erreur lui fut fatale. Ne me déçois pas, Elora.
Une silhouette sombre et fantasmagorique se matérialisa aux cotés du Wyrm, déformée par le rideau de feu. Les ténèbres qui l’entouraient personnifiaient un froid glacial et une terreur indescriptible.
*******
L’Arbre de Vie de Tir Asleen avait été infecté. Son feuillage blanc diamant qui étincelait jadis de mille couleurs, se fanait lentement. Les feuilles tombaient une à une sur le sol meurtri, portant encore les cicatrices du carnage passé. Les cadavres des chevaliers de la Pacalcade gisaient aux côtés de ceux des démons qu’ils avaient combattus. Du tronc, jadis resplendissant de vie, jaillissait un liquide noirâtre et visqueux.
Hastur, roi maudit, accompagné de deux gardes, se réjouissait devant la détérioration de l’Arbre de Vie. Ses yeux brillaient d’une lueur maléfique, tandis qu’il caressait du bout des doigts, l’écorce noircie.
L’un des gardes osa rompre le silence.
— Mon Seigneur, l’Arbre se meurt.
Hastur lui répondit, esquissant un sourire maléfique, les yeux rivés sur l’Arbre.
— Il ne se meurt pas. La magie qu’il renferme mène un combat de l’intérieur. Le Malatrium s’infiltre dans ses veines, corrompant chaque filtre de son être. Bientôt, il sombrera définitivement et je récolterai le fruit de mes longues attentes. Je forgerai l’arme qui me permettra de posséder la magie interdite.
Les gardes se regardèrent et frissonnèrent, conscients d’être les témoins d’un pacte sombre sous le signe de la trahison.
Après la reconstruction de Galladoorn, suite à sa défaite contre les sbires de Bavmorda, Hastur fut proclamé roi. Mais sa soif de vengeance et de pouvoir qui naquit en ce jour sombre, ne fit que s’intensifier. Déterminé à prendre sa revanche et étendre son règne sur tout le royaume d’Andowyne. Il se mémorisait cette rencontre fatidique qui lui permit d’élaborer son plan diabolique.
*******
Hastur déambulait, seul, dans les jardins royaux, absorbé par ses sombres pensées, cherchant à échafauder un plan qui lui permettrait d’assouvir ses projets machiavéliques. Le parfum des fleurs environnantes ne parvenait pas à atténuer le tourbillon de haine et d’ambition qui le hantait.
Il s’assit au bord d’une fontaine, sculptée dans un marbre blanc éclatant, plongea sa main dans l’eau fraîche et cristalline, qui s’écoulait entre ses doigts. Il leva les yeux vers une déesse de marbre, tenant une jarre, d’où jaillissait le filet d’eau scintillant.
Il resta ainsi, un moment, le regard perdu, ses pensées en quête de trahison et de conquête. La mélodie de l’eau apaisait ce lieu, contrastant avec son désir inextinguible de pouvoir qui brûlait en lui, et semblait se nourrir de ses cruels desseins, le poussant un peu plus vers les ténèbres. Hastur était prêt à tout pour atteindre ses objectifs quitte à trahir les siens.
Alors que le murmure de la fontaine semblait lui chuchoter des mots en pnakotiques, l’ombre de son visage démoniaque se superposa à son reflet dans l’eau translucide. Les éléments environnants s’assombrirent progressivement. Les fleurs se fanèrent et l’eau de la fontaine se noircit.
Les chuchotements s’intensifiaient dans son esprit, poussant Hastur à se lever et se diriger vers le labyrinthe de haies. Un lieu diabolique, au chemin sinueux et trompeur. Chacun de ses pas semblaient l’entraîner plus profondément vers les ténèbres.
— Qui va là ! s’écria le roi, ayant senti une présence. Il resserra sa main sur la poignée de son épée, prêt à combattre.
Une entité fantasmagorique se forma au sein de l’épaisse brume. Une voix spectrale résonna dans son esprit.
— Nous pouvons t’offrir ce que tu désires.
— Que savez-vous de mes désirs ! Qui êtes-vous ?! demanda fermement le roi.
— L’Ordre du Wyrm. Rejoins-nous et Tir Asleen t’appartiendra.
— Quel en est le prix ?!
— Ton fils cadet.
Zivian hésita un instant, bien que son désir de pouvoir fût bien trop puissant.
— Cela m’est impossible !
Un rire démoniaque rugit.
— Ton sang est tellement corrompu par la haine et l’avidité que la vie de ton fils est moindre face à tes sombres desseins.
Zivian resta silencieux avant de prendre sa décision.
— Il te suffit de te soumettre. À genoux !
Le roi maudit s’exécuta et s’agenouilla devant l’entité.
— Renonces-tu à ton fils.
— Oui j’y renonce.
— Acceptes-tu de rejoindre l’Ordre du Wyrm et de consacrer ta vie à son dessein.
— Je l’accepte.
Un rire glacial retentit, tandis que les ténèbres s’amenuisaient, rendant la clarté au jardin et l’eau de nouveau cristalline. Le pacte venait d’être signé.
Hastur se releva, les yeux injectés de sang et le visage déformé par la haine et l’avidité. Il quitta les jardins. Lorsqu’il atteignit la salle du trône, il fit signe aux gardes de le laisser seul.
Le roi maudit, s’assit sur le trône, sa main droite crispée sur l’accoudoir, sentant toute la puissance du Wyrm se mêler à son sang. Des ombres fugaces, apparaissaient autour de lui. Un léger sourire machiavélique se dessina sur ses lèvres.
Part 18
Co-autrice : Elodie DragonMistic
Alliances et Sacrifices
La nuit pesait lourdement sur chacun, après les conflits et les révélations de la journée.
Tandis que les Wildwoods baignaient dans une obscurité oppressante, Elora, encore bouleversée par les évènements récents, cherchait un semblant de sérénité au milieu du chaos qui régnait dans son esprit. Seule, les yeux rivés vers un ciel sombre, sans étoiles.
Les images de son double maléfique, ainsi que son sentiment de culpabilité ne cessaient de la hanter. Elle se sentait responsable d’avoir créé une telle menace avec sa magie. Déchirée par la peur de mettre tous ses proches en danger en restant à leurs côtés.
Alors qu’elle luttait contre ses pensées, une présence familière s’approcha. En se retournant, son regard se posa sur celui de Willow, marqué par une inquiétude partagée.
Le sorcier s’efforça de lui offrir un sourire rassurant, malgré la gravité de la situation.
— J’ai l’impression que tout m’échappe, murmura-t-elle. Ma magie, mon double diabolique, et cette culpabilité qui ne cesse de me ronger.
— Tu n’es pas responsable, lui répondit doucement Willow.
Après un court instant de silence, l’Impératrice, s’exprima d’une voix lasse.
— J’ai peur Willow. Et si j’étais incapable de la combattre ? J’ai peur de ce que j’ai créé. Plus je vous implique tous dans mon combat, plus je mets vos vies en danger.
— Nous avons tous fait le choix de te suivre dans cette quête, parce que nous croyons tous en toi. Ton combat est aussi le nôtre.
Elora sourit faiblement. Tous deux restèrent ainsi, en silence, méditant sur les dangers qu’ils devraient affronter.
Soudain, des voix s’élevèrent, non loin. Elora et Willow se dirigèrent vers le vacarme, et trouvèrent Scorpia et Jade en pleine dispute.
— Pourquoi refuses-tu de nous aider ! criait Jade, les poings serrés.
Les bras croisés et le regard dur, Scorpia répliqua fermement.
— Je ne suis pas une suiveuse, Jade ! Je ne prête allégeance à aucune royauté qui a fait de nous des esclaves et des hors-la-loi ! J’honore notre père par mes actions, et cette soif de liberté qui nous a été volée ! Tu es ma sœur, tu devrais combattre à mes côtés et non le leur !!!
— Il n’y a aucun camp à choisir, Scorpia ! Nous devons tous rester unis ! Le monde est en train de sombrer ! J’ai besoin de ma sœur, supplia-t-elle.
La tension était à son paroxysme et tous les regards tournés vers les deux sœurs. Kida, observant la scène, s’approcha et leva la main, réclamant le silence.
— Scorpia, j’ai une proposition à te faire, déclara la guerrière, sur un ton autoritaire et froid. Un duel amical, toi et moi. Si tu gagnes, je respecterai ton choix. Mais si tu perds, tu t’engageras à nos côtés.
La cheffe des Bone Reavers haussa un sourcil, un sourire en coin.
— J’accepte ton défi. Cela pourrait s’avérer très intéressant, rétorqua-t-elle, d’une voix tranchante.
Tous, intrigués, formèrent un cercle autour des deux combattantes.
Le duel débuta sous les reflets de la lune à travers le ciel obscur. La guerrière, rapide et précise, esquivait les attaques de la Bone Reaver. Scorpia se battait avec acharnement sans ne jamais atteindre sa cible. Le combat monta en intensité, captivant l’attention de la foule.
Kida trouva une ouverture et assena un violent coup de poing précis au visage et à l’estomac de son adversaire, la forçant à mettre un genou à terre. Scorpia, haletante, cracha du sang, et leva des yeux emplis de rage vers la guerrière.
Kida se tourna vers le groupe, tous surpris par l’issue du duel, sa voix résonnant aussi puissamment que le grondement d’un tonnerre.
— Écoutez-moi tous ! Il y en a d’autres comme moi dans l’armée du Wyrm bien pires encore !! Un seul d’entre eux peut tous vous anéantir sans que vous n’ayez le temps de lui infliger la moindre égratignure ! Nous avons besoin de toutes les alliances possibles pour protéger l’Impératrice et vaincre le mal qui vous menace tous ! Y compris toi Scorpia, dit-elle en se retournant vers la cheffe des Bone Reaver.
Un silence lourd s’ensuivit, les visages marqués par l’inquiétude et la peur.
Elora qui avait assisté à la scène, s’approcha de Scorpia, toujours à terre.
— Je te fais la promesse solennelle, Scorpia, que si tu nous aides à vaincre le Wyrm, je libérerai ton peuple et vous donnerai une terre où vous installer, sans que vous n’ayez plus jamais à fuir ni à vous cacher.
La cheffe des Bone Reavers accepta de se joindre à la quête d’un hochement de tête.
*******
Kida avait décidé de passer la nuit à aiguiser ses épées, profitant de sa solitude. Aniel la rejoignit, l’observant avant de briser le silence nocturne, accablant.
— Tu nous a fait une très belle démonstration, dit-il sur un ton ironique.
Kida répondit sans lever les yeux, continuant assidûment sa tâche.
— Je n’avais pas le choix, nous avons besoin de tout le monde pour combattre ce qui nous menace. Tu sais de quoi le Wyrm est capable.
Le guerrier s’assit aux côtés de sa sœur d’armes, sentant le poids de leur passé commun.
— Oh que oui, je le sais Kida. Nous avons participé à tant de massacres en son nom, murmura-t-il.
La guerrière posa ses lames et tourna son regard vers son ami.
— Nous étions persuadés d’agir pour ce qui était juste, dit-elle. Nous avons été façonnés dans un monde de mensonges et de tromperies. Nous en avons payé le prix. Tu as perdu Thaïs.
Aniel ferma les yeux un court instant, se laissant envahir par les souvenirs de sa bien-aimée.
— Thaïs, souffla-t-il. Une femme d’un courage inébranlable, malgré les chaînes de l’esclavage sous le joug du Wyrm. Sa sagesse m’apportait tellement de réconfort.
Kida hocha la tête, se souvenant des rares moments où elle avait pu croiser la jeune femme, mais resta silencieuse, laissant son ami d’arme exprimer sa perte et sa douleur.
— Elle avait cette grâce, qui m’apportait une lueur d’espoir dans ce monde chaotique, faisant ressortir mon côté humain. Notre amour fut forgé dans la souffrance. La voir assassiner de la main du Wyrm… Aniel ne put poursuivre.
La jeune guerrière posa une main compatissante sur l’épaule de son acolyte.
— Sa mort ne sera pas vaine. Nous nous battrons pour que ce monde ne sombre pas sous l’asservissement de ce démon. Plus personne ne souffrira. Nous irons jusqu’au bout pour protéger l’Impératrice.
Aniel hocha la tête.
— Ce ne sera pas facile, mon amie, tuer Dark Elora signifie tuer l’Impératrice.
Kida serra ses épées, déterminée.
— Nous trouverons un moyen.
— Et si, c’était cela la solution ? Tu l’as vu, tout comme moi, elle fut incapable de la combattre.
— Alors j’agirai en conséquence.
Les deux amis de guerre restèrent plongés dans leur réflexion silencieuse. Kida examina ses lames, brillantes sous la lueur de la lune.
— Prêtes à être utiliser, s’exclama-t-elle fièrement.
*******
Pendant ce temps, assis non loin du lieu du duel, Boorman échangeait quelques mots avec Scorpia, essayant de détendre l’atmosphère.
— Tu as pris une sacrée raclée, dit-il en riant légèrement.
Scorpia grogna.
— Tais-toi ! adoucissant le ton de sa voix, elle poursuivit. Je dois bien reconnaître que Kida est redoutable. Rapide, précise, intrépide et d’une force incroyable.
— Je confirme, mieux vaut l’avoir comme amie que comme ennemie, Boorman prit un air sérieux. On a besoin de toi. Tu es également une guerrière exceptionnelle. Ton soutien pourrait faire toute la différence.
La cheffe des Bone Reavers marqua un courte pause avant de répondre.
— Ai-je vraiment le choix ? Je viens de me faire ridiculiser devant mon peuple ? Et si je dois combattre, autant que je le fasse aux côtés de mon égale.
Elle se leva et se retourna vers son amant.
— Il y a une place pour toi sous ma tente qui t’attend. Si ce doit être notre dernière nuit autant en profiter, dit-elle avec un clin d’œil.
Boorman leva un sourcil, surpris par l’invitation de Scorpia. Il jeta un regard circulaire autour de lui avant de répondre et de la suivre.
— Si tu réclames mes services, je suis tout à toi.
*******
Airk et Mims, vérifiaient leurs équipements et les vivres pour le périple qu’ils s’apprêtaient à entamer très tôt dès l’aube. Le jeune prince semblait perdu dans ses pensées.
— Vous semblez préoccupé, mon prince, l’interrogea la jeune Nelwyn.
Airk soupira, laissant son regard intense se perdre dans celui de Mims qui baissa les yeux, troublée.
— J’ai peur pour nous tous. Et si je n’arrivais pas à sauver ma sœur, à résister à l’esprit de ma grand-mère ? J’ai sombré une fois, qu’est ce qui peut m’assurer que je ne sombrerai pas une seconde fois ?
— Nous avons tous peurs, mon prince. Mais c’est cette peur qui nous rend plus forts, plus courageux. Nous devons la combattre et non la laisser nous submerger.
Le jeune homme sourit faiblement, s’agenouilla et posa sa main sur celle de Mims. Au contact charnel, elle rougit et la retira aussitôt, gênée.
— Que vais-je découvrir ?
— Quoi que ce sera, nous l’affronterons ensemble.
Le jeune prince acquiesça. Tous deux se remirent au travail. Leurs regards se croisaient souvent, chargés d’émotion.
*******
Ne trouvant pas le sommeil, Kit et Jade décidèrent de s’entraîner au combat comme à leur habitude. Elles dégainèrent leurs épées, leurs mouvements se synchronisaient parfaitement. Kit, attentive aux émotions de sa partenaire, remarque que Jade était distraite et préoccupée.
— Qu’est ce qui ne va pas Jade ? Tu n’es pas avec moi ? demanda-t-elle, tout en parant une attaque de son adversaire.
La jeune Bone Reaver soupira.
— Il y a trop de conflits. Nous devons rester unis, si nous voulons vaincre le Wyrm. Et avec ce qui s’est passé toute à l’heure, je ne sais pas comment va réagir Scorpia vis-à-vis de Kida. Elle l’a quand même humiliée devant tout le monde.
La princesse rit doucement.
— Je dois admettre que c’était plutôt satisfaisant de la voir se faire battre par l’autre folle. Oh, cela ne veut pas dire que je l’apprécie.
— Kit, il s’agit de ma sœur dont on parle, lui reprocha Jade.
Après un court instant d’un silence pesant, la jeune princesse s’exprima.
— Airk me cache quelque chose. Je le sens, je vois de la peur dans son regard.
Jade s’approcha, prenant les mains de son amante dans les siennes.
— Peut-être cherche-t-il tout simplement à te protéger. Nous avons tous peurs face à la menace grandissante, surtout la puissance de Dark Elora. Si nous ne pouvons pas la vaincre sans blesser Elora, que ferons-nous ?
— Je ne sais pas, Jade. Nous ferons ce que nous avons toujours fait. Nous combattrons ensemble.
— Je suis fatiguée, je rentre me coucher, dit-elle d’une voix lasse.
Kit garda les yeux fixés sur la silhouette sombre de sa compagne, et soupira avant de la rejoindre.
*******
Les premières lueur du jour perçaient timidement à travers les Wildwoods. Chacun se rassemblait, conscient de la gravité de la situation, prêt à se séparer pour leur périple respectif.
— Willow, que devons-nous faire maintenant ? demanda Elora, la voix tremblante.
— Il est temps de rassembler l’armée autour de toi. Nous allons nous diriger vers Cashmere. Nous allons réclamer une audience avec le roi Hayrald Saigur, répondit Willow avec assurance.
Ses pensées le ramenèrent au jour où Cashmere fut assiégé par les sbires du Wyrm, et les sorciers qu’il devait mener en lieu sûr, assassinés, trahis par le chef de la garde. Pendant des lunes, il avait cru ne jamais revoir son ami et roi. Pourtant, contre toute attente, Hayrald était sorti victorieux de cette bataille, avait reconstruit son royaume et continué à régner avec sagesse.
Ils allaient se retrouver pour la première fois depuis cette effroyable épreuve. Willow se demandait comment son ami allait réagir en le revoyant.
Sorsha s’accroupit à hauteur du sorcier et posa une main réconfortante sur son épaule.
— Hayrald sera de notre côté. Il a pleinement conscience que le mal était déjà à l’intérieur de son royaume. Tu n’as rien à te reprocher, lui dit-elle avec compassion.
— Non seulement j’ai échoué mais, ce jour-là, j’ai perdu Kiaya et Ranon, s’exprima-t-il tristement.
Il détourna brièvement son regard inquiet vers sa fille, qui se tenait aux côtés d’Airk et des trois chevaliers se préparant au départ. Une angoisse le submergea à l’idée de ne plus la revoir.
De son côté, Kit regardait son frère, une boule à l’estomac, sachant qu’il allait partir pour un endroit dangereux. Elle s’approcha.
— Je ne veux pas que tu y ailles, lui dit-elle d’une voix tremblante.
Le jeune prince prit les mains de sa sœur dans les siennes.
— Kit, je dois y aller. C’est mon devoir envers notre peuple.
— Je sais que tu me caches quelque chose.
Airk soupira.
— Je ne ta cache rien, petite sœur. T’inquiète pas, je saurai faire face à la puissance de notre grand-mère.
Le jeune femme ne put s’empêcher de penser à la perte de leur père, une douleur qu’elle ne voulait pas revivre.
— Et si…, elle ne put terminer sa phrase.
Airk sourit tristement et serra sa sœur dans ses bras.
— Je te promets que je reviendrai. Tu ne me perdras jamais. Je serai toujours là pour toi.
Ils restèrent ainsi un moment, se serrant l’un contre l’autre, puis se séparèrent à contrecœur.
Pendant ce temps, Boorman et Scorpia s’éloignèrent du groupe, trouvant un endroit plus intime pour faire leurs adieux. Boorman lui prit la main et la regarda intensément.
— Je reviendrai, lui dit-il doucement.
La cheffe des Bone Reavers hocha la tête.
— Je ne te laisse pas le choix.
Il lui sourit et la prit dans ses bras.
— Nous avons encore beaucoup de choses à vivre ensemble, susurra-t-il.
Ils s’embrassèrent longuement, oubliant un instant les dangers qui les attendaient. Puis, avec un regard plein de promesses, ils se séparèrent, chacun reprenant sa place dans le groupe.
Willow, quant à lui, cherchait des yeux Mims. Lorsqu’il la trouva, il se précipita vers elle.
— Mims, promets-moi d’être très prudente. Tu es tout ce qu’il me reste. Reviens-moi, sa voix était chargée d’inquiétude.
La Nelwyn serra son père dans ses bras.
— Popa, je te le promets. Comprends que je dois partir avec le prince, elle le regarda droit dans les yeux.
— Je comprends, acquiesça Willow tristement.
Avant que Boorman ne parte avec le prince, Sorsha et Willow l’interpellèrent.
— Veille sur ma fille. La perdre m’anéantirait. Et si le prince s’approche un peu trop de Mims tu l’assommes, s’exprima Willow.
— Boorman, protège mon fils, au nom de ton fidèle ami, ajouta Sorsha avec gravité.
Boorman consentit à leur demande.
— Ne vous inquiétez pas. Je ne les quitterai pas des yeux.
S’apprêtant à partir, Kida l’intercepta.
— Hé ! L’Excentrique !
— Oh non, pas elle, grommela-t-il, avant de se retourner, se forçant à sourire, non rassuré.
— Reviens en un seul morceau. Je suis la seule à avoir le droit de t’étriper.
— Je ferai au mieux, répondit Boorman avant de s’éclipser.
Willow, Sorsha et Kit regardèrent, Airk prendre Mims avec lui sur son cheval, avant de s’éloigner avec les autres chevaliers accompagné de Boorman.
Part 19
Co-autrice : Elodie DragonMistic
L’Embuscade
Le vent s’engouffrait dans les Wildwoolds, Airk et son équipe chevauchaient, silencieux. Le jeune prince ne pouvait s’empêcher de penser à la promesse qu’il avait faite à sa sœur, mais surtout, aurait-il réellement la force de combattre la puissance de sa grand-mère ? Ayant découvert dans « Le Serment Secret de Tir Asleen », qu’il avait confié à Aniel, la toute puissance de Bavmorda. Un frisson d’effroi parcourut son échine. Comment allait-il pouvoir sauver Kit, s’emparer de Malatrium, et surtout revenir vivant de Nockmaar ? Il savait que, malgré toute la bravoure de Boorman et des chevaliers qui avaient décidé de le suivre, il devrait se préparer à affronter seul cette terrible épreuve. Le fait d’avoir accepté que Mims l’accompagne, et d’avoir mis sa vie en danger, commençait à lui faire regretter sa décision.
— Mims, soupira-t-il d’une douce voix, je ne suis pas sûr d’avoir pris la bonne décision en acceptant ton choix de me suivre… S’il t’arrivait quoi que ce soit…
La jeune Nelwyn, assise à l’avant du cheval du prince, se retourna brusquement et lui lança un regard froid, l’empêchant de poursuivre sa phrase.
— Je suis peut-être une Nelwyn mais je ne suis pas faible ! Vous ferez bien de vous en souvenir, mon Prince !
— Ce n’est pas toi qui m’inquiète, murmura-t-il. Mais… ton père. Si je m’en sors vivant, je n’ai pas intérêt à rentrer sans toi, il marqua une courte pause avant de poursuivre. Oublions le protocole étant donné que nous allons tous devoir nous battre pour notre survie.
Mims ne répondit pas, reportant son regard sur la route, envahie par un sentiment de doute et de crainte, face à la menace qui les attendait.
À quelques mètres derrière, accompagné des chevaliers, Boorman préoccupé, non seulement par les paroles de Kida, mais particulièrement par cette mission qui lui semblait bien trop risquée, accéléra légèrement le pas, se rapprochant du jeune prince.
— Un peu d’optimisme voyons ! Je connais tous les recoins de Nockmaar pour y avoir...
— Pour avoir essayé de piller le château de ma grand-mère, le coupa Airk, un sourire en coin.
— Non ! Absolument pas ! J’ai… risqué ma vie pour sauver tout le monde de cette malédiction qui règne en ce lieu ! Fiez-vous à moi ! répondit Boorman en posant sa main sur son torse.
— La véritable raison de ta venue ne serait-elle pas liée à une certaine guerrière que tu souhaites éviter ? ironisa Mims.
Airk se mit à rire.
— Mieux vaut l’avoir en amie qu’en ennemie et vu ta relation avec elle, disons qu’elle n’est pas en très bons termes avec toi.
— Elle ne m’effraie pas ! Ce n’est pas la psychopathe qu’il faut craindre le plus, soupira Boorman.
— Oh, je n’en suis pas si sûre, elle est très puissante, répliqua Mims. Je n’aimerais pas être à ta place.
— Peut-être faudrait-il mieux que je reste à Nockmaar finalement, se murmura Boorman à lui-même.
Malgré son sarcasme, l’idée de retourner dans ce lieu maudit, lui pesait plus qu’il ne voulait l’admettre.
*******
De leur côté, Willow, Elora et Sorsha menaient le groupe en direction de Cashmere. Le voyage serait long et périlleux, mais le roi Hayrald Saigur restait leur meilleure chance pour rassembler une armée.
Kit se déplaçait, le visage fermé et le regard au loin. Percevant l’agitation intérieure de sa compagne, Jade enlaça ses doigts autour de ceux de son amante.
— On va le revoir, lança-t-elle doucement.
La princesse acquiesça, mais son silence en disait long sur la lourdeur de son cœur. Elle s’arrêta soudain, obligeant Jade à faire de même, et plongea son regard dans celui de la Bone Reaver. Ses iris brillaient d’une fragilité qu’elle cachait d’ordinaire derrière son masque de princesse tumultueuse.
— Je… ses doigts se crispèrent autour de ceux de Jade, comme pour la retenir. Promets-moi que tu ne me quitteras jamais, Jade. Peu importe tout ce royaume dont j’hériterai un jour. Ma vie, c’est toi.
La jeune femme sentit son cœur se serrer face à cette confession. Elle prit le visage de Kit entre ses mains, lui caressa tendrement la joue.
— Rien ne me séparera de toi, Kit, murmura-t-elle avant de l’embrasser.
La princesse s’écarta lentement.
— Si tu savais à quel point j’ai besoin de toi.
Jade lui répondit par un sourire.
Aniel qui fermait la marche avec Kida, observait cette scène d’un regard discret. Son cœur se serra, ravivant en lui la perte de Thaïs, qui n’était plus qu’une ombre, un souvenir qui n’avait jamais cessé de le hanter, la femme de sa vie perdue à jamais. La chaleur de sa présence, la douceur de sa voix, tout cela lui manquait cruellement. Il aurait tout donné pour ressentir le contact de sa main contre la sienne, mais celle-ci resterait à jamais vide.
Kida, quant à elle, avançait en silence, son visage impassible. Elle était une guerrière façonnée par la violence, les guerres, la destruction. Depuis son plus jeune âge elle avait appris que tuer était l’unique voie. Le Wyrm lui avait volé son humanité, la forgeant dans la rage et la haine, la rendant insensible. Mais depuis qu’elle avait croisé le chemin de Jade, des sensations étranges naissaient. Des émotions qu’elle n’arrivait pas à nommer. Elle sentait quelque chose croître en elle, comme un nouveau souffle de vie.
Aniel en profita pour demander des explications à Kida sur son duel avec Scorpia.
— Qibi-ma, ša'alti ša'alta ana muḫḫika ina qabalka imti Bone Reaver. (Dis-moi, j’ai une ou deux questions à te poser à propos de ton duel avec la Bone Reaver)
— Qbû-ma, ul īde ina libbīya, tazkur-ma ! (On en a déjà parlé, je n’avais pas le choix, tu t’en souviens !) rétorqua sèchement la guerrière.
— Ul ša šu-ma ana dabābi-ma atta idū-ma tukallimšu-ma ina ṣīrišu-ma tukallimšu-ma. (Ce n'est pas de cela dont je veux parler, mais te connaissant, tu aurais pu la battre bien plus rapidement.)
— Ana ša-ma tukallimšu-ma ina tīmim-ma kīma ana tīmim-ma atta tukallimšu-ma ? (Je voulais la mettre en confiance, comme nous le faisions à l'époque, tu t'en rappelles ?)
— Enūma, īnu-ma ša'altu aḫritu. (Oh oui. Mais j'ai une dernière question.)
— Atta tīdi ša anāku akāšad-ma ? (Tu veux savoir si je me suis retenue ?)
— Enūma,.. šū ša šu. (Euh...oui c'est ça.)
— Enūma, makkūru ša anāku iddinakkūšu ittišu ša imūtu ina ša anāku akāšad-ma. ul tukallim-ma ana šimāti. (Évidemment que oui, le coup que je lui ai donné aurait pu la tuer si je m'étais pas retenue.)
Kit, voyant Aniel et Kida parler dans leur langage se retourna, agacée.
— Hé! C'est quoi ces messes basses ?
— On peut savoir de quoi vous parlez ? interrogea Jade.
En entendant la voix de Jade, Kida se mit légèrement à rougir, Aniel voyant sa sœur d’armes dans l'embarras intervint.
— Rien d’important, on se remémorait de vieux souvenirs.
Les deux jeunes femmes se regardèrent, intriguées par sa réponse.
— Ils nous mentent avec cette histoire de vieux souvenirs, j'en suis sûre, Jade, prétexta Kit.
— Je le pense aussi, mais peut-être qu'ils nous disent cela probablement pour ne pas nous inquiéter.
— Pour ne pas nous inquiéter ! Depuis le début ils nous cachent des choses et nous sommes obligés d'insister pour avoir des réponses !
— Mon amour, je le conçois, mais ils ont sûrement leurs raisons d’agir ainsi.
— Désolée Jade, mais j’en ai assez !
— Non ! Kit ne fait pas ça ! dit-elle en essayant d'empêcher sa compagne d'aller à la confrontation.
— Aniel !!! Je veux savoir de quoi Kida et toi vous parliez ! s’écria la jeune femme.
— Ce ne sont pas tes affaires, princesse ! la réprimanda Kida.
— Calme-toi ma sœur, puis, s’adressant à Kit, Aniel essaya de temporiser la situation. Je vous le dit princesse, Kida et moi, nous nous remémorions de vieux souvenirs afin de trouver un moyen de vaincre le Wyrm ainsi que nos frères.
— Je ne te crois pas une seconde ! gronda Kit.
— Tu le devrais pourtant ! s’exprima Kida sur un ton direct et froid.
Kit commença à s'énerver.
— Toi, je ne sais pas ce qui me retient de t'en coller une !
— Tout simplement, parce que tu sais que tu n'as aucune chance face à moi, la défia la guerrière.
Kit était sur le point de donner un coup de point au visage de Kida quand Willow intervint, en colère.
— ÇA SUFFIT VOUS DEUX !!! Arrêtez de vous comporter comme des enfants ! Il nous faut encore deux jours pour atteindre Cashmere, alors soit vous vous comportez comme deux adultes responsables, soit vous vous séparez et vous ne vous adressez plus la parole jusqu'à ce que l’on arrive. Vous décidez quoi ?!
Kit et Kida se regardèrent droit dans les yeux, la tension entre les deux femmes était palpable. Kida rompit le lien visuel et s'adressa au sorcier.
— Nous allons nous comporter en adultes, tu as ma parole sorcier.
— J'aime mieux ça.
Ils reprirent tous la marche, Kit se retourna vers Kida.
— Ce n’est pas fini, dit-elle frustrée en s'éloignant
— ÇA c'est sûr, princesse, s’exprima Kida à voix basse.
Aniel s'approcha de sa sœur sans un mot. Kida s’adressa à lui dans un murmure.
— Je tiens à te prévenir que si elle m'attaque encore j'aurai du mal à garder mon épée dans son fourreau.
— Tu devras te contrôler. Mais dans le cas où cela arriverait, évite de la tuer, contente toi de lui donner juste une leçon.
— Très bien, je ne contenterai de jouer un peu avec elle.
Aniel tourna la tête vers sa sœur d’armes. Ce qu’il vit dans ses yeux, cette lueur froide et calculatrice, lui fit immédiatement comprendre les intentions de la guerrière.
— Kida, lā tepuš ! (Kida, arrête !) lui ordonna-t-il de sa voix grave.
Elle se retourna vers lui, les sourcils froncés, faisant mine de ne pas comprendre. Mais c’était plus de la provocation.
— Mînu epësu ?! (Que j’arrête quoi ?!)
— Iddakka, iddi annü pânu. (Je te connais, je connais ce regard), lâcha-t-il.
Elle éclata d’un rire amer, s’arrêta de marcher, et le fixa avec une intensité glaciale.
— Annîtam, û mînu pânu, Aniel ?! Atta tûsa bârû ? (Ah oui, et quel regard, Aniel ?! Tu es devenu devin ?)
— Celui que tu lances en quête d’une proie. Ce regard là. Aniel sentait la colère monter en lui, mais il garda son calme. Jade n’est pas une proie, Kida. Elle aime Kit, sentiment que tu ignores, puisque tu es dépourvue de toute émotion.
Les mots frappèrent Kida comme une lame, mais elle ne le montra pas.
— L’amour ? Et qu’est ce que ça t’a apporté, hein, mon cher frère d’armes ? À part de la souffrance ?! souffla-t-elle avec mépris. Je ne suis pas comme toi, Aniel. Je ne suis pas brisée par une perte. Peut-être qu’elle serait encore en vie si tu n’avais pas été aussi faible !
Ce fut la première fois depuis qu’ils se connaissaient qu’ils s’affrontaient de la sorte, prêts à en venir aux mains.
— Il est temps que j’y mette un terme ! grogna Kit. Tout en avançant vers la guerrière, elle sortit son épée de son fourreau.
— Kit ! Que fais-tu ?
Jade tenta de la stopper, mais en vain.
— Viens te mesurer à moi ! lança la princesse à la guerrière.
Kida ne put s’empêcher d’afficher un sourire glacial. Elle dégaina sa lame, d’un calme en opposition avec la fougue de la princesse.
— Très bien, répondit-elle d’une voix rauque. Voyons ce que tu as dans le ventre.
Avant que le combat ne commence, Jade, horrifiée, s’avança pour les stopper, mais Aniel l’attrapa doucement par le bras, l’empêchant de continuer.
— Laisse-les faire, murmura-t-il de sa voix grave.
— Mais, Kida va la tuer ! s’exclama Jade, les yeux écarquillés.
— Fais-moi confiance, elle ne lui fera aucun mal.
En une fraction de seconde, Kit se rua sur Kida. Leurs lames s’entrechoquèrent violemment. Les coups pleuvaient. La guerrière, rapide et brutale frappait avec une force démesurée. Chacune de ses attaques obligeait Kit à reculer.
— C’est tout ce que tu as, princesse ? la nargua-t-elle.
Le duel s’intensifiait, devenant plus féroce. La princesse ne parvenait pas à atteindre le corps de son assaillante, beaucoup trop agile, et fut rapidement en difficulté. Tous les coups qu’elle portait, étaient bloqués sans efforts par la guerrière, qui contre-attaquait avec une précision impitoyable, et ne faiblissait pas.
Kit, furieuse, tenta un coup bas, espérant déstabiliser sa rivale. Mais Kida anticipa le mouvement, dévia la lame de la princesse, et la désarma d’un geste puissant. L’épée vola à quelques mètres, avant d’heurter le sol.
En un instant, Kida avait sa lame pointée contre la gorge de la princesse. La respiration haletante, à la fois effrayée et enragée, ses iris s’étaient assombris, Kit sentait la froideur de la lame contre sa peau, sous le regard terrifié de Jade. Aniel, quant à lui, restait immobile, tenant la Bone Reaver par le bras. Le combat n’avait été qu’un simple jeu pour la guerrière.
— Retiens bien ceci, princesse : je ne perds jamais, lui lança-t-elle d’un ton froid et austère.
— Ça suffit ! la voix de Sorsha invectiva les deux combattantes. Comment osez-vous agir de la sorte ! Ce que Willow vous a dit n’a donc pas suffit ! Kida, tu es censée protéger ma fille, non l’affronter ! Quant à toi, Kit, tu es la princesse de Tir Asleen, agis comme tel ! Nous ne sommes pas sur un terrain de jeu ! Prends tes responsabilités !
Sous l’emprise de sa colère, Sorsha s’adressa à tout le groupe, de sa voix claire et puissante, non en tant que guerrière mais en tant que reine.
— En tant que reine de Tir Asleen, je vous ordonne à tous de mettre vos différends de côtés ! Nous avons besoin les uns, les autres, seuls nous ne gagneront jamais cette guerre !
Le silence tomba lourdement. Jade se précipita vers Kit, mais lorsque ses yeux croisèrent les prunelles sombres de sa compagne, une vague d’effroi la parcourut dans tout le corps.
— Je suis désolée, ma Reine, s’excusa Kida, mais ses paroles n’étaient pas réellement une véritable excuse.
Tandis qu’Aniel, stoïque, la fixa de son regard acéré.
Un lourd silence s’était abattu sur le groupe, alors qu’ils progressaient le long du chemin boisé. Aniel jetait de coups d’œil furtifs aux alentours, pendant que Kida marchait d’un pas lent, ses instincts de guerrière aux aguets. Elle scrutait chaque mouvement dans l’ombre, prête à réagir à la moindre menace.
— On dirait que quelque chose ne tourne pas rond, murmura Jade.
C’est alors qu’ils entendirent le cri d’une jeune fille.
— Vous avez entendu ? questionna Elora, inquiète.
Sans attendre de réponse, tous s’avancèrent prudemment dans la direction d’où provenait cette voix. Tous sauf Aniel et Kida.
— C'est un piège, souffla Kida à son frère d’armes.
— Probablement, lui répondit le guerrier.
— Tu plonges avec eux ou c'est moi ?
— Je pense que tu as besoin de te défouler alors… je te laisse gérer.
— Merci, dit-elle avec un sourire.
— Mais ne tue personne.
— Ah! Ce n’est pas juste.
— Bon. Tu peux les assommer si tu veux.
— Ce n’est toujours pas juste mais je m'en contenterai.
Aniel rejoignit les autres, et trouvèrent une jeune fille apeurée.
— Que se passe-t-il mon enfant ? demanda tendrement Sorsha.
Mais la reine n'eut pas le temps d’obtenir une réponse qu'une flèche se planta dans l'arbre près d’elle.
— Je crois que nous avons notre réponse ! s’exclama Scorpia.
— Fuyez...vite! cria la jeune fille, effrayée. Ou ils vous auront tous !
— Qui ? questionna Scorpia
Elle n'eut pas le temps d’obtenir une réponse qu'Aniel rattrapa de justesse une flèche qui allait se planter dans la tête de la cheffe des Bone Reavers.
— Je crois que nous n’avons pas le temps pour ça, rétorqua le guerrier.
— Vite suivez moi, je sais où il ne pourra pas nous atteindre, leur proposa la jeune fille.
Voulant échapper au plus vite au danger, tous suivirent l'enfant. Elle les mena derrière un rocher suffisamment grand pour que leurs ennemis ne puissent pas les voir.
— Mais bon sang où est-il celui-là ? s’énerva Lori.
— Je n'ai pas eu le temps de voir, rétorqua Aniel.
Ils se demandaient tous comment ils allaient pouvoir se sortir de cette situation. Elora sentit quelque chose.
— Attendez, il y a quelque chose de pas normal ici.
La seconde suivante la sol se déroba sous leurs pieds, les faisant tomber dans un gouffre creusé à l'avance, tous sauf la jeune fille qui fut rejoint par un homme et la félicita.
— Bien joué ma p'tite, comme toujours.
— Merci, lui répondit l’enfant.
— Je n’arrive pas à croire que je me suis fait avoir par de vulgaires voleurs ! hurla Scorpia.
— Qu'allez-vous faire de nous ? demanda fermement Sorsha.
— Rien, rassurez-vous, pour montrer notre bonne fois, j'ai amené une corde pour vous faire sortir, rétorqua le voleur.
— C'est bien aimable à vous, ironisa Sorsha.
— Mais pas avant que vous n'ayez laissé derrière vous votre argent, vos bijoux...et vos armes aussi.
— Mais pour qui vous prenez-vous ?! s’écria Kit. On n'a pas que ça à faire !
— C'est le prix pour que je vous libère.
Voyant tout le monde essayer de trouver un moyen de se sortir de cette situation, Jade se rapprocha d’Aniel, resté en retrait.
— Où est Kida ? dit-elle en chuchotant.
— Tu verras, dit-il avec un léger sourire.
Le voleur prit une dernière fois la parole.
— Bon, si vous ne vous soumettez pas à mes exigences, je n'ai d'autres solutions que de vous laisser dans ce…
Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que Kida surgit et le jeta, lui et la jeune fille, à plusieurs mètres.
— Aniel, qu'est-ce que tu fais ? hurla-t-elle
— Je t'attendais !
— Reste pas planter là, aide les autres à sortir ! Je me charge d'eux !
— Kida, n'oublie pas ce que je t'ai dit !!!
— Je ne te promets rien !
Au même moment une flèche arriva juste derrière la tête de Kida. Elle l'attrape sans difficulté et la brisa en deux d'une seule main.
— Aniel sors de cette fosse, occupe toi de ses deux là, moi je m'occupe de l'archer !
— Tu l’as repéré ?
— Pas encore, mais je vais le trouver.
Une flèche fut tirée et Kida s’en saisit en plein vol.
— Je te tiens, murmura-t-elle.
L'archer se trouvait à une centaines de mètres, perché sur un arbre. Se sachant repérer, il décocha ses flèches aussi vite que possible. Mais, Kida avec son épée les brisa les unes après les autres. Elle arriva à l’endroit où se trouvait l’assaillant. Se sentant prit au piège, il voulut décocher une dernière flèche mais trouva son carquois vide, à sa grande stupéfaction.
Kida donna un violent coup de point dans la tronc qui brisa l'arbre en deux et fit tomber l'archer. Ce dernier tenta de s'enfuir mais fut rattraper par la guerrière. Elle le projeta dans les airs, le faisant atterrir dans la fosse que le groupe avait quittée.
Kida les rejoignit, tandis qu’Aniel balançait le voleur au même endroit que son acolyte.
— Où est la gamine ? demanda la guerrière sur un ton autoritaire.
— J'y travaille, lui répondit son frère d’armes.
— Nous n'avons pas le temps de la chercher, ordonna Elora.
— Elle est leur complice, elle… riposta Kida.
— Ça m'est égal ! Comme tu nous l’as bien fait comprendre, nous ne sommes pas de taille à affronter le Wyrm et son armée. Nous ignorons quand et comment il attaquera. Si nous voulons que le roi Hayrald Saigur accepte de s'allier à nos côtés, nous devons nous rendre au plus vite à Cashmere !
Kida prit quelques secondes pour se calmer avant de répondre.
— Très bien votre Altesse mais... on fait quoi de ces deux là ?
—Laissons-les où ils sont. Ils trouveront bien un moyen de s'échapper.
La jeune fille intervint.
— Vous n'irez nulle part !
Tous se retournèrent et virent la jeune fille tenant un couteau sous la gorge de Sorsha.
— Libérer mes amis et je vous laisse partir ! ordonna-t-elle.
— MAMAN ! Libère-la tout de suite ou je … gronda Kit.
— Un pas de plus et je la saigne !
— Raven, laisse tomber, intervint le voleur.
La jeune fille s'exécuta. Kit courut vers sa mère et la prit dans ses bras.
— Euh...avant que vous ne partiez, j’aurais une question à vous poser, s’exprima le voleur.
— Qu'est-ce que tu veux savoir ? le questionna Kida.
— Vous avez bien dit le Wyrm ?
— Comment pourriez-vous connaître le Wyrm ? demanda Willow, étonné.
— Quand j'étais enfant des soldats du Wyrm sont venus attaquer mon village. Ils ont tué tout le monde, hommes femmes et même les enfants, idem pour mon ami. Si je suis en vie aujourd'hui c'est parce que l'un d'eux m'a épargné et m'a dit de rester caché jusqu'à leur départ. Je jure que si j'avais une chance même petite de pouvoir venger ma famille alors je combattrais cette saloperie jusqu'en enfer s’il le faut.
— Moi aussi, s'il vous plaît laissez nous venir avec vous, supplia l’archer.
Kida ramassa l'arc et questionna son propriétaire.
— Quelle est la puissance de ton arc, archer ?
— Euh cent livres. Pourquoi ?
— Impressionnant, pour un simple humain.
— En tout cas c'est ce que le vendeur m'a dit.
— Eh bien tu t'es fait arnaquer. Il n'en fait que quatre vingt-dix.
— Je l'ai volé de toute façon.
— Pourquoi je ne suis pas étonnée, répondit Kida en chuchotant.
Elle se retourna vers Elora.
— Votre Altesse, je ne sais pas si ces deux là peuvent nous apporter quelque chose, elle jeta un regard furtif en direction de la jeune fille et du voleur. Mais je pense que l'archer nous serait très utile. Un homme utilisant un arc doté d'une telle puissance est rare et encore plus rare sont ceux qui savent viser avec une telle précision comme il l’a démontré. Quand pensez-vous ?
— Il est rare que tu dises des choses positives Kida. Si tu dis qu'ils peuvent nous être utiles alors ils sont les bienvenus. Même petite, une aide est toujours précieuse.
— Vous ne le regrettez pas, je vous le jure, s’exclama le voleur.
Kida sauta dans la fosse et fit sortir les deux prisonniers. Les deux hommes et la jeune fille se dirigèrent vers Elora.
— Au fait, je me nomme Lorcan, voleur de profession.
— Et moi Eldor, le meilleur archer, pour vous servir Altesse.
— Et toi ? demanda Elora à la jeune fille.
— Raven.
Willow connaissait la réputation d’Eldor qui n’était plus à faire. Un archer comme lui, serait un véritable atout pour l’équipe.
— Eldor et Lorcan, j’ai souvent entendu parler de vous, mais je vous ai toujours considérés comme un mythe, s’exprima Willow. Bien il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’arriver à Cashmere, alors en route.
— Attendez ! les stoppa Lorcan. Vous avez bien dit Cashmere ?
— Oui, pourquoi, il y a un problème ? s’inquiéta Willow.
— Un très gros problème, je dirais. Depuis la dernière attaque et trahison qu’il a subit, le roi Hayrald Saigur sera difficile à convaincre. Il refuse toute alliance. Il est devenu très méfiant et inapprochable. Il vous faudra plus qu’un simple discours.
Sorsha et Willow se regardèrent, silencieux, tandis que Kida intervint.
— Nous n’avons pas l’intention de discuter longtemps. Si les négociations échouent, je m’occuperai personnellement de le convaincre.
— NON !!! Kida, on gère !!! s’exclamèrent à l’unisson, Willow, Sorsha et Jade.
— On vous suit, répondit Lorcan, pendant qu’il aidait Raven.
Tous reprirent la route avec leurs nouveaux alliés. Aniel remarqua l’inquiétude de sa sœur d’armes sur son visage.
— Ne me dis pas que tu regrettes ta décision envers nos nouveaux compagnons de route.
— Je ne m'inquiète pas pour les deux hommes, répondit-elle. Ils sont inoffensifs, mais j'ai des doutes sur la jeune fille.
— Comment ça ?
— Mon instinct me dit de me méfier d'elle.
— Dans ce cas, restons vigilants.
— Il n'y a pas que ça, Aniel.
— Que veux-tu dire ?
— L'histoire de Lorcan, je sais qui est le soldat qui l’a épargné.
— Qui est-ce ?
— Moi.
Part 20
Co-autrice : Elodie DragonMistic
Nockmaar
Le voyage en direction des montagnes noires était rude. Les chemins n’étaient que des rochers tranchants, et l’atmosphère devenait de plus en plus froid et sinistre. Les collines se dressaient, menaçantes, surplombées d’une brume épaisse, rendant l’air quasi irrespirable. Le groupe se perdait peu à peu dans ce brouillard lugubre, tandis que l’ombre macabre de Nockmaar apparaissait à l’horizon.
— Nous devons rester vigilants, murmura Boorman, connaissant les dangers qu’ils allaient affronter.
Tous hochèrent la tête, un frisson leur parcourut l’échine. Airk ne pouvait se concentrer que sur une seule chose : la puissance de Bavmorda qu’il ressentait s’insinuer dans ses veines au fur et à mesure qu’il s’approchait de la forteresse maudite. Sa grand-mère avait terrorisé des générations entières et, d’une manière ou d’une autre, son esprit était encore présent.
Ils continuaient d’avancer, silencieux, tendus et non rassurés, pour seuls sons, le crissement du vent. Les montagnes noires étaient un paysage de désolation, où la végétation n’était plus. Les rochers avaient été corrompus par la magie interdite. La terre avait été rendue stérile. Pas un brin d’herbe ou de fleurs, pas une once de vie ne subsistaient, juste une dévastation sans fin.
Après des heures d’une marche épuisante, s’étendait devant eux, imposante et terrifiante, la forteresse de Nockmaar, dont la brume donnait l’impression que le château était en mouvement, attendant ses proies. Malgré son abandon depuis des lunes, une présence néfaste persistait en ce lieu damné.
Airk, Mims, Boorman et les trois chevaliers, en dépit de leur bravoure, ressentirent un frisson glacial les traverser. Rien à voir avec le froideur du vent des montagnes. Nockmaar était l’incarnation même de la démence de Bavmoda, un endroit où le mal avait pris racine. Les portes titanesques étaient gravées de symboles pnakotics.
Airk prit une profonde inspiration, rassemblant tout son courage. Il savait ce qu’il allait combattre, mais la vie de sa sœur dépendait de la réussite de cette mission.
— Allons-y, souffla-t-il.
Tous mirent pied à terre. Alors qu’ils s’apprêtaient à franchir le seuil, le jeune prince sentit une présence austère à ses côtés, sa vision se brouilla. Il se retrouva projeté dans un tourbillon infernal qui l’entraîna à l’intérieur du château, à l’époque où Bavmorda gouvernait. L’odeur du sang et de la magie noire, les chants des incantations des rituels interdits, envahissaient son esprit. Il voyait sa grand-mère dans toute sa gloire maléfique. Elle leva les yeux, et pour la première fois, Airk croisa son regard, reflet de cette âme corrompue, avide de pouvoir.
— Tu ne pourras la sauver, mon cher petit-fils. Elle m’appartient déjà. La peur coule dans tes veines, tout comme elle a coulé dans le sang de ton grand-père. Tu lui ressembles tant. Tu ne possèdes ni le courage, ni la force de ton père.
Airk était incapable d’effectuer le moindre mouvement. La sorcière lui montra des images de Tir Asleen en feu, de sa mère morte au combat au milieu de ses chevaliers, des royaumes en ruines, des peuples à genoux. Puis, elle lui montra sa sœur, transpercée d’une lame tenue fermement par une ombre, cette maudite ombre dont il ne pouvait distinguer le visage.
— Son destin est lié au mien, mon enfant, quoi que tu fasses, Bavmorda ricana d’un rire sadique.
— NON ! s’écria le jeune homme avant de s’écrouler à genoux, tout en sueur et tremblant de terreur, hanté par les paroles et le rire de sa grand-mère.
Boorman se précipita vers lui, l’aidant à se relever.
— Airk, ne te laisse pas submerger par les visions de ce lieu maudit.
Alors que Boorman le remettait debout, le jeune prince cachait ses angoisses aux yeux de tous afin de ne pas paraître faible. Le visage horrifique de sa grand-mère le dévoraient de l’intérieur. Il serra ses poings afin de chasser la vision de sa sœur, inerte. Il fixa les portes sombres et s’adressa à ses compagnons.
— Ne vous laissez-pas envahir par vos peurs ! Ne nous séparons pas !
Tous échangèrent des regards, cherchant force et encouragement en chacun. Ils resserrèrent leurs prises sur leurs armes, prêts à affronter les ténèbres de Nockmaar.
Le groupe franchit l’entrée. Une odeur suffocante de pourriture et de magie ancienne s’infiltra dans leurs narines. Le château était plongé dans une semi-obscurité. Les murs de pierres rongés par des années de maléfices, imprégnés d’écritures pnakotics, des chaînes rouillées pendaient au plafond et sur le sol, attestant de la barbarie de Bavmorda.
— Cet endroit est maudit. Il respire la mort, murmura Mims, l’intonation de sa voix trahissait ses peurs.
Boorman avait perdu son sourire et ses moqueries habituelles, revivre ces instants le pétrifiait. Il s’adressa à ses compagnons d’un air grave.
— Quoi que vous voyiez, ou entendiez, ne vous y fiez pas. Ne montrez pas vos peurs, ni vos angoisses.
— J’ai l’impression que quelque chose nous observe, répondit Mims. Finalement, mieux vaut subir les sarcasmes de la guerrière rouge, que d’être ici, ajouta-t-elle.
Les chevaliers, en retrait, gardaient leurs mains sur la garde de leurs épées, prêts à intervenir, luttant contre leurs craintes. Soudain, dans ce silence épouvantable, un craquement se fit entendre. Mims sursauta et s’agrippa instinctivement au bras d’Airk.
— Qu’est ce que c’était ? demanda-t-elle.
— Ce… ce n’est sûrement rien, juste… un vieux mur qui s’effrite, répondit Airk, essayant de garder son sang froid.
La Nelwyn réalisa soudainement son geste et retira rapidement sa main, ses joues s’empourprèrent légèrement. Elle baissa les yeux, embarrassée par cette démonstration involontaire.
— Désolée, murmura-t-elle, évitant le regard du prince.
Bien que concentré sur leur mission, le jeune homme ne put s’empêcher de ressentir, à ce contact, une émotion inattendue.
— Ce n’est rien, nous sommes tous un peu tendus, répondit-il.
— Vous sentez ça ? questionna l’un des chevaliers.
Tous se retournèrent vers lui, le regard inquiet, attendant.
— Ce… ce château est vivant. Il nous guette, poursuivit-il, incapable de dissimuler son affolement.
Une vision s’empara de nouveau du jeune prince : sa grand-mère affichant un sourire machiavélique.
— Elle est là, murmura-t-il à lui-même, son cœur s’arrachait dans sa poitrine. Ne nous éloignons pas de notre objectif. Nous devons trouver la Malatrium.
À l’entente de ce nom damné, Boorman ne put contenir sa colère.
— Le Malatrium ! Mais tu es devenu complètement fou ! Ce manuscrit est maudit ! Tu veux faire la même erreur que Willow et Elora !
— Il me faut absolument ce grimoire, avec ou sans ton aide !
— Mais c’est insensé ! Boorman se ravisa. Attends une minute… c’est pour cela que tu nous as tous menés ici, à risquer nos vies ?!
Airk s’emporta contre son ami ne contrôlant plus sa rage.
— C’est le seul moyen de LA sauver !!!
— Sauver qui ?!
Un lourd silence retomba, effroyable avant que Mims ne réponde à la place du jeune prince.
— La princesse.
Boorman ne put cacher sa stupéfaction devant cette révélation.
— Explique-toi, Airk.
— Je… depuis mon retour d’Immemorial City, toutes les nuits je suis hanté par cet affreux cauchemar dans lequel je vois ma sœur... morte.
— Es-tu crois que ce maudit bouquin…
— Grimoire, le coupa Mims
— Oui, grimoire, peu importe, va t’aider à la sauver ?
— Le Malatrium est lié à ma grand-mère, donc lié à Kit, à moi… Si c’est l’unique solution pour sauver ma sœur, je prendrai ce risque. Soit tu me suis, soit tu quittes cette forteresse, mais j’irai jusqu’au bout.
Il se retourna vers les chevaliers et s’adressa à eux sur un ton autoritaire.
— il en est de même pour vous, et pour toi Mims.
— Mon Prince, je vous ai donné ma parole de Nelwyn, je ne reviendrai pas là-dessus.
Le jeune homme acquiesça d’un hochement de tête, attendant la réponse de ses autres compagnons.
— J’ai promis de veiller sur toi, céda Boorman.
Les trois chevaliers firent allégeance à leur souverain.
— Bien, discussion close. Avançons et trouvons ce maudit grimoire.
Airk menait le groupe prudemment dans les couloirs sombres de Nockmaar. Soudain, un murmure à peine audible, semblant venir de partout et de nulle part, s’insinua dans l’esprit des chevaliers.
— Vous entendez ça ? demanda l’un d’eux, apeuré.
— Oui, répondit un autre, ses yeux scrutant les parois sombres avec méfiance.
— Je n’entends rien, rétorqua Boorman se tournant vers Mims et Airk qui confirmèrent ses dirent.
Mais les murmures continuaient, de plus en plus insistants et violents, se faufilant dans les esprits. Rapidement, les chevaliers commencèrent à se regarder avec suspicions, leurs mains serrées sur la garde de leurs lames.
— Tu n’es qu’un sale traite ! cracha l’un d’eux. Tu m’espionnes et veux ma chute !
— Non, c’est toi le traite ! répliqua un autre, les yeux écarquillés par la rage. Tu complotes dans l’ombre !
Le troisième restait silencieux, mais son regard infecté par la haine oscillait entre ses deux compagnons.
Les chevaliers s’invectivaient les uns les autres, comme possédés par une démence invisible. Leurs yeux étaient devenus vides, leurs paroles dénuées de sens. Ils se rapprochèrent, leurs épées levées.
— Qu’est-ce… ? interrogea Airk en se retournant.
— Arrêtez ! hurla Mims, vous êtes des frères d’armes !
Mais les murmures étaient bien trop puissants, ces voix sinistres qui attisaient leurs peurs les plus profondes. Le premier chevalier tira son épée.
— Je ne te laisserai pas nous trahir ! rugit-il en se jetant sur l’un de ses compagnons.
Leurs lames s’entrechoquèrent dans un vacarme, fusionnant avec leurs cris de démence. Leurs attaques étaient brutales. Chacun frappait, le visage déformé par un rictus de haine.
Airk, Mims et Boorman observaient la scène avec horreur, devant cette folie meurtrière.
— Nous devons les arrêter ! s’exclama Mims.
— Nous ne pouvons rien faire, ce n’est plus eux… Nockmaar les a déjà pris, rétorqua Boorman devant cette bataille sanglante qui se déroulait sous leurs yeux, impuissants.
Les chevaliers s’acharnaient les uns contre les autres, leur folie s’était emparée de leurs esprits, leurs gestes étaient de plus en plus désordonnés et violents. Le sol devenait une mare rougeâtre alors que le premier chevalier transperçait son compagnon, recevant à son tour un coup mortel à la gorge. Le dernier survivant regardait les corps ensanglantés, une expression de démence dans ses prunelles.
— Je savais… je savais que c’étaient des traites, murmura-t-il le souffle saccadé.
Ses iris vides se retournèrent vers Mims.
— Et toi… Tu agis pour eux !
La Nelwyn recula d’un pas, effrayée.
Le chevalier, dans un dernier élan de folie, brandit son épée et se rua vers elle, hurlant comme une bête.
— Non !!! cria Airk, se jetant devant Mims pour la protéger.
L’homme, possédé par la démence de Nockmaar, abattit sa lame avec une furie incontrôlable, mais Airk para le coup. Le choc résonna dans le silence lugubre du château. Le chevalier, devenu un pantin de folie, attaqua de nouveau. Poussé par un instinct de protection, le jeune prince riposta, n’ayant d’autre choix que de transpercer de sa lame le torse de son assaillant. Ce dernier s’effondra au sol, toujours submergé par cette aliénation.
Le silence retomba, pesant et glacial.
Boorman posa une main sur l’épaule du jeune prince, les yeux rivés vers le corps inerte.
— Nockmaar n’est pas seulement un lieu maudit, il s’attaque à l’esprit de tous ceux qui osent franchir son seuil.
— On… nous devons continuer, ordonna le jeune prince, détachant son regard de ce massacre démentiel.
— Espérons ne pas finir comme eux, marmonna Boorman.